Destruction d'une statue à Fort-de-France
Question de :
M. Olivier Marleix
Eure-et-Loir (2e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 29 juillet 2020
DESTRUCTION D'UNE STATUE À FORT-DE-FRANCE
M. le président. La parole est à M. Olivier Marleix.
M. Olivier Marleix. Chacun sur ces bancs, j'en suis sûr, pourrait faire siens les mots d'Aimé Césaire, qualifiant la traite et l'esclavage de « sauvagerie insurpassée au cours des siècles ». Chacun sur ces bancs regarde avec fierté le vote unanime qui fut celui de l'Assemblée nationale il y a tout juste vingt ans, à l'initiative de Mme Taubira, reconnaissant la traite et l'esclavage comme un crime contre l'humanité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LaREM. – Mme Sylvia Pinel applaudit également.) Chacun sur ces bancs salue la décision de Jacques Chirac d'instituer une journée mémorielle le 10 mai et constate avec lui que « la République s'est construite avec le mouvement abolitionniste ». Enfin, nous avons aussi été nombreux, je crois, sur ces bancs, à saluer les propos du Président Macron, le 14 juin dernier, lorsqu'il affirmait : « La République n'effacera aucune trace ni aucun nom de son Histoire […] elle ne déboulonnera pas de statue ».
Il aura finalement fallu un petit mois seulement pour que la parole présidentielle atteigne sa date de péremption, puisque ce dimanche 26 juillet, à Fort-de-France, un petit groupe d'activistes a détruit, au terme d'un ultimatum, sous le regard passif de l'État – sous les fenêtres mêmes de la préfecture, monsieur le ministre de l'intérieur – une statue de Joséphine de Beauharnais.
M. Thibault Bazin. Quel scandale !
M. Olivier Marleix. Comment votre gouvernement, averti par ultimatum, a-t-il pu laisser faire ? Comment votre gouvernement, informé à l'avance, a-t-il pu laisser détruire un monument historique, se rendant juridiquement complice, par son abstention, d'un délit puni de dix ans de prison ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Par quelle faiblesse avez-vous pu renoncer aussi vite à tenir une promesse du chef de l'État ? Où était, monsieur le Premier ministre, l'autorité de votre gouvernement dimanche dernier à Fort-de-France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. Mme Agnès Thill et M. Meyer Habib applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur. Nous convenons évidemment que la République est l'institution qui a permis l'abolition de l'esclavage et qui a notamment accordé aux habitants des territoires ultramarins les mêmes droits qu'à ceux qui habitent sur le sol métropolitain. Comme vous, et comme l'ont fait plusieurs gouvernements, appartenant à différentes majorités, nous reconnaissons bien sûr que l'esclavage est une des choses les plus horribles que puisse commettre l'humanité.
Vous semblez d'accord avec les propos du Président de la République, c'est assez rare pour être souligné – cela a dû vous demander un effort important. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
M. Thibault Bazin. Lamentable !
M. Patrick Hetzel. C'est petit !
M. Maxime Minot. Quelle condescendance !
M. Gérald Darmanin, ministre. Je regrette que vous ayez perdu votre légendaire sens de l'humour collectif !
M. Éric Diard. C'est de l'humour à deux sous !
M. Gérald Darmanin, ministre . En revanche, je ne suis pas d'accord avec le fait que vous attaquiez ainsi les représentants de l'État, qui ont fait leur travail en Martinique, à commencer par M. le préfet, que je veux ici saluer et remercier, et les forces de l'ordre qui ont protégé la préfecture au moment où un groupuscule incendiaire attaquait des bâtiments publics, en pleine journée, dès 9h30 le matin, justement pour qu'on en parle. Le préfet a non seulement condamné ces actes mais il a aussi déposé auprès de la justice les plaintes nécessaires à leur poursuite et est intervenu pour que, dans les rues de Fort-de-France, ne règnent pas le chaos et la violence au sein de la population.
M. Julien Aubert. Qu'est-ce que ç'aurait été s'il ne l'avait pas fait !
M. Pierre Cordier. On ne parle pas de cela mais de la statue !
M. Patrick Hetzel. C'est un aveu de laxisme !
M. Gérald Darmanin, ministre . Vous avez oublié de dire que ce groupuscule, suivi par les services du ministère de l'intérieur,…
M. Julien Aubert. Nous sommes sauvés !
M. Gérald Darmanin, ministre . …s'en est également pris à la statue de M. Gandhi, le qualifiant de « négrophobe », ce qui prouve que ces extrémistes doivent être poursuivis et condamnés.
La Martinique n'a pas eu à rougir des représentants de l'État ni de leur intervention.
M. Julien Aubert. Cela n'a aucun rapport ! Vous ne faites rien !
M. Gérald Darmanin, ministre . Il est sans doute plus facile de faire des commentaires ici qu'à Fort-de France.
M. le président. La parole est à M. Olivier Marleix.
M. Olivier Marleix. La réalité, c'est que dimanche, vous avez laissé faire. Il n'y avait sur place ni forces de l'ordre ni corps préfectoral. En matière de sécurité, nous attendons moins de mots et plus d'action. Écoutez un peu plus les conseils de Nicolas Sarkozy. On n'en fait jamais assez. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
Auteur : M. Olivier Marleix
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Ordre public
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 juillet 2020