Question au Gouvernement n° 3261 :
Éthique publique

15e Législature

Question de : Mme Cécile Untermaier
Saône-et-Loire (4e circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 29 juillet 2020


ÉTHIQUE PUBLIQUE

M. le président. La parole est à Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Le rapport remis par le GRÉCO, le groupe d'États contre la corruption du Conseil de l'Europe, publié le 9 janvier dernier, fait état de la persistance de « zones grises » au sein de l'exécutif en France. Ce n'est pas nouveau. Depuis le remaniement, votre gouvernement compte 43 ministres et secrétaires d'État et potentiellement 563 conseillers.

M. Pierre Cordier. Il n'y a plus de place sur ces bancs !

M. Maxime Minot. Les députés sont obligés de céder leur place !

Mme Cécile Untermaier. Il s’agit sans doute du gouvernement le plus important en nombre…

M. Philippe Gosselin. Depuis quinze ans !

Mme Cécile Untermaier. …et au coût le plus élevé de la Ve République. Sa gouvernance exige de tendre vers une exemplarité d'autant plus difficile à garantir que le nombre d'intervenants est élevé. Aujourd'hui seules demeurent pour le Gouvernement les règles imposées par les lois du 11 octobre 2013. La déontologie a fait son entrée dans les grandes institutions, dans la magistrature et au sein des grandes collectivités territoriales comme de l'administration. Elle doit d'ailleurs, à mon sens, évoluer davantage vers le conseil que vers le contrôle.

En amont et en aval des obligations de déclaration d'intérêt et de patrimoine, les ministres sont confrontés au quotidien à des pressions et méritent, comme partout ailleurs, d'être accompagnés, prévenus, conseillés par une instance déontologique. Il s'agit d'éviter les affaires du passé – l'affaire Delevoye étant le dernier exemple en date – en détectant les situations de conflit d'intérêts, de déport en conseil des ministres ou dans les commissions et sans doute aussi en renseignant les frais de représentation, mais en évitant la tyrannie de la transparence.

Tel n'est pas le rôle du secrétariat général du Gouvernement mais d'une personne identifiée au sein de votre exécutif de façon responsable et transparente. L'Observatoire de l'éthique publique, présidé par René Dosière, a fait une proposition en ce sens qui a reçu un écho très favorable.

Allez-vous, monsieur le Premier ministre, vous engager dans cette voie d’une gouvernance introduisant pour la première fois cette culture déontologique de conseil et de prévention des risques ? Elle est, au demeurant, essentielle à la relation de confiance avec les citoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Avant de vous répondre, je veux rendre hommage devant la représentation nationale, au nom du Gouvernement, en tant que garde des sceaux mais aussi en tant qu'ancien avocat, et finalement en tant que citoyen, à maître Gisèle Halimi, qui nous a quittés ce matin. (La plupart des députés applaudissent et se lèvent.) Toute sa vie, elle aura combattu, milité, défendu.

M. Maxime Minot. Vite, il ne reste plus beaucoup de temps ! (Exclamations sur divers bancs.)

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux . Son obsession était la justice pour tous - peut-être devrais-je dire pour toutes. À cet instant, toutes mes pensées, et celles du Gouvernement, vont à sa famille et à ses proches. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

Vous savez que le pouvoir exécutif est doté par la loi depuis plusieurs années d'outils destinés à veiller au respect de la déontologie par les membres du Gouvernement. Je ne vous rappellerai pas les lois d'octobre 2013, de décembre 2016 ni de septembre 2017. Les lois n'ont cessé de renforcer les outils de prévention déontologique. La déontologie des membres du Gouvernement est placée sous le contrôle de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, chargée de superviser la procédure de vérification.

Mme Cécile Untermaier. Ce n'est pas la question !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je vous réponds. Les membres du Gouvernement lui adressent ensuite leur déclaration de situation patrimoniale. Je tiens toutefois à rappeler qu'il est nécessaire que, sur ces questions, nous réfléchissions ensemble aux limites que nous souhaitons nous fixer.

M. Olivier Faure. Répondez donc à la question !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux . Il est indispensable que les dirigeants du pays, ses plus hauts représentants, donnent l'exemple.

M. Pierre Cordier. On en parlera à Alexandre Benalla !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux . Mais il ne faudrait pas tomber dans les travers inverses, quand la transparence devient la « transperçance », qui décourage les générations prêtes à s'engager pour réformer notre pays, craignant pour leur vie privée, celle de leurs proches, et craignant d'être livrées à la vindicte populaire, comme jadis aux chiens. À quand, madame la députée, le déontologue de la déontologie ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. M. Olivier Becht applaudit également.)

M. Éric Diard. Il a mis une cravate !

Données clés

Auteur : Mme Cécile Untermaier

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Gouvernement

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 juillet 2020

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