Question au Gouvernement n° 3302 :
Violences à Mayotte

15e Législature

Question de : Mme Ramlati Ali
Mayotte (1re circonscription) - La République en Marche

Question posée en séance, et publiée le 16 septembre 2020


VIOLENCES À MAYOTTE

M. le président. La parole est à Mme Ramlati Ali.

Mme Ramlati Ali. Monsieur le ministre des outre-mer, Mayotte connaît une flambée de violence sans précédent. En effet, depuis plus d'un mois, dans ce territoire, de très vives tensions se matérialisent par des actes de violence physique et sociale, qui se multiplient quotidiennement, accentués par une grave crise socio-économique.

Le problème est sévère et suscite une très forte inquiétude au sein de la population. Il ne se passe pas un jour sans que l'on assiste au triste spectacle de voitures dégradées, brûlées, de rackets d'automobilistes, de motards, de pillages et d'affrontements entre bandes rivales. Cette délinquance de jeunes est de plus en plus violente. Certains sont même armés de machettes et sèment le chaos. De plus, la colère des habitants contre les immigrés clandestins s'exacerbe.

Mayotte se trouve donc dans une situation de pourrissement. Les habitants sont apeurés, exaspérés, et décident de se protéger par eux-mêmes. La rentrée scolaire est mouvementée et l'économie se fragilise toujours davantage. Il ne se passe pas un jour sans que soit annoncée une nouvelle grève sociale, touchant tous les secteurs d'activité. Je pense tout particulièrement aux employés du supermarché Jumbo Score, dont le mouvement dure depuis plus de soixante jours. Dans deux jours, l'intersyndicale de Mayotte commencera une grève d'une durée indéterminée.

Pour apaiser ces tensions, des élus ont fait des propositions, notamment celle de recourir aux militaires et de déployer à Mayotte un « plan Harpie », à l'instar de l'opération Harpie menée en Guyane contre l'orpaillage clandestin. Cette possibilité avait d'ailleurs été évoquée par le Président de la République, Emmanuel Macron, lors de sa rencontre avec les maires d'outre-mer à l'Élysée, en février 2019, dans le cadre du grand débat national.

La direction territoriale de la police nationale, nouveau service déconcentré de l'État à Mayotte, ne demande qu'à voir ses équipes renforcées. Force est de constater qu'en dépit des efforts de l'État, l'arsenal disponible pour la lutte contre l'insécurité dans l'île est insuffisant au regard de la situation incendiaire que connaît Mayotte. Le désespoir et le sentiment d'abandon sont très forts au sein de la population mahoraise, excédée par l'insuffisance des réactions face à cette violence sans fin. Les Mahorais sont des Français ; ils attendent des résultats concrets et des mesures adéquates…

M. le président. Merci, madame la députée.

Mme Ramlati Ali. …afin de rétablir la loi et l'ordre sur le territoire mahorais. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – M. Philippe Naillet applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des outre-mer.

M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer. Parlons franchement : la situation à Mayotte est extraordinairement préoccupante. Malheureusement, elle ne date pas d'hier.

Pour répondre aux défis qui nous attendent et élaborer des solutions, il nous faut regarder les choses en face et en parler sans tabou.

Premièrement, nous répondons par une montée en puissance régalienne – cette affaire est évidemment suivie par le ministre de l'intérieur. Je rappelle que plus de 1 200 militaires de la gendarmerie et policiers nationaux sont désormais déployés à Mayotte, ce qui représente un effectif supplémentaire de près de 400 agents depuis 2015. L'autorité judiciaire a aussi bénéficié de renforts.

Le deuxième défi à relever est celui de l'immigration – sur ce point aussi, il faut se débarrasser des tabous. Nous savons très bien que l'opération Shikandra, dont les résultats en 2019 ont été tout à fait significatifs, a malheureusement été gênée par le confinement et la crise de la covid. Pour produire ses effets, ce dispositif doit regagner en puissance, en lien avec les forces armées déployées dans le cadre de l'action de l'État en mer, notamment la marine nationale. Comme vous le savez, madame la députée, il nous faut aussi parler vrai avec les Comores : une initiative diplomatique forte a donc été lancée afin d'obtenir des résultats en matière d'immigration.

Enfin, comme je l'ai déjà indiqué à l'ensemble des parlementaires et élus départementaux lors de la réunion très républicaine qui s'est tenue il y a quinze jours, alors que nous approchons du dixième anniversaire de la départementalisation de Mayotte, nous devons dresser sereinement, calmement, tranquillement, un premier bilan de celle-ci, notamment concernant les compétences transférées aux collectivités territoriales telles que l'aide sociale à l'enfance ou la protection maternelle et infantile. La sécurité, c'est aussi ces défis qu'il nous faut relever tous ensemble. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : Mme Ramlati Ali

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : Outre-mer

Ministère répondant : Outre-mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 septembre 2020

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