Vaccination obligatoire des professionnels de santé
Question de :
M. Philippe Berta
Gard (6e circonscription) - Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés
Question posée en séance, et publiée le 14 octobre 2020
VACCINATION OBLIGATOIRE DES PERSONNELS DE SANTÉ
M. le président. La parole est à M. Philippe Berta.
M. Philippe Berta. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, je tiens à associer à ma question mon collègue Michel Fanget.
Vingt ans, c'est le gain d'espérance de vie obtenu par l'espèce humaine dans nos sociétés occidentales en quelques décennies. Si l'offre thérapeutique a explosé et explose dans bien des domaines, vaccinations et antibiotiques n'en restent pas moins la base de cette progression. Si l'antibiothérapie fait l'objet d'abus en santé humaine et animale, la vaccination a été et reste la cible régulière de fausses nouvelles, amplifiées par les réseaux sociaux et quelques mauvais esprits. L'éradication de la poliomyélite par la voie vaccinale en Afrique est pourtant un nouveau succès, tout juste annoncé dans l'Organisation mondiale de la santé.
Certains feignent de ne pas savoir que l'accès à une thérapie repose sur un rapport bénéfices-risques favorable, ce qui n'exclut aucunement la possibilité d'effets secondaires rencontrés dans quelques cas. La recherche de thérapeutiques pour contrer la pandémie covidique au moyen de nombreux essais cliniques réalisés dans le monde entier, basée sur le repositionnement d'antiviraux préexistants, n'a pas, à ce jour, abouti aux résultats escomptés. Notre espoir réside essentiellement dans l'obtention d'un ou plusieurs vaccins dans les mois voire les années à venir, même si nous mesurons aussi la difficulté de sa bioproduction à destination des 7 milliards d'êtres humains.
Cependant, les sondages qui se suivent et se ressemblent attestent de la méfiance, voire du rejet exprimés par une bonne part de la population française envers l'acte vaccinal, indépendamment de la cible et de l'urgence sanitaire. N'est-il pas temps, monsieur le ministre, de développer une communication massive,…
M. Pierre Cordier. Il est grand temps !
M. Philippe Berta. …empreinte de culture scientifique, à l'adresse du plus grand nombre, sans oublier le monde de l'éducation et de l'enseignement supérieur ?
Nombre d'infectiologues et d'immunologistes lancent l'alerte depuis quelques semaines en évoquant le risque d'une épidémie de grippe surajoutée dans les jours à venir. Cette double circulation virale pourrait faire encourir un risque vital majeur, en particulier aux plus âgés d'entre nous. Ne serait-il pas indispensable d'envisager la vaccination obligatoire des personnels de santé et des personnels accompagnants ? Aurons-nous les doses de vaccin antigrippal nécessaires pour faire face à ce qui risque d'être une demande sans égal ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Dans le pays de Pasteur, force est de reconnaître que le recul de la confiance des Français envers la vaccination est croissant et de plus en plus grave. Il est parfois alimenté par une partie des élites – je pense notamment à des élus qui siègent sur certains de ces bancs et à des maires de grandes communes, dont le discours sceptique contribue à la perte de confiance de la population.
C'est un débat que nous devrions avoir même en dehors de la crise épidémique : comment restaurer la confiance envers la parole scientifique dans ce qu'elle a de raisonné, et non de disparate, d'éclaté ou de prophétique – d'ailleurs, depuis le début de la crise, les prophéties, vous en conviendrez, ont toutes percuté le mur de la réalité ?
Nous devons donc encourager les Français à se faire vacciner. Je l'ai dit : s'agissant du covid-19, un vaccin doit être sûr et efficace. Quant à la vaccination antigrippale, la campagne commence ce jour, le 13 octobre, et vise en priorité les populations vulnérables ainsi que les soignants et les acteurs de l'aide à domicile qui sont parfois en contact avec des personnes fragiles et vulnérables. Notre objectif est d'élever le niveau de couverture de ces populations fragiles, sachant que la France est très en retard. L'Organisation mondiale de la santé recommande en effet d'atteindre au moins 75 % du public cible tandis que nous ne dépassons plus 50 % depuis des années – y compris parmi les soignants.
Nous nous sommes interrogés, monsieur le député, sur l'opportunité de rendre le vaccin antigrippal obligatoire pour les soignants. Nous ne le ferons pas pour une raison simple : nous avons besoin de la mobilisation de tous les soignants – je répondais à l'instant à M. Wulfranc sur ce point – et nous craignons que le fait de rendre la vaccination obligatoire ne se traduise par des retraits ; or, encore une fois, nous avons besoin de tous les soignants.
En revanche, nous encourageons les soignants – et comptons sur toutes les bonnes volontés du pays, parlementaires, élus, scientifiques, citoyens, pour les y encourager aussi – à se faire vacciner, ainsi que les populations vulnérables face à la grippe. N'ajoutons pas le fléau d'une nouvelle épidémie à celle que nous subissons ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Auteur : M. Philippe Berta
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 octobre 2020