Gestion de la crise sanitaire
Question de :
M. Jean-Christophe Lagarde
Seine-Saint-Denis (5e circonscription) - UDI et Indépendants
Question posée en séance, et publiée le 5 novembre 2020
GESTION DE LA CRISE SANITAIRE
M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
M. Jean-Christophe Lagarde. Le groupe UDI et indépendants veut, à son tour, exprimer sa solidarité et sa compassion à nos amis et alliés autrichiens, et rappeler la détermination que l'ensemble de l'Europe doit mettre à lutter contre les barbares qui veulent nous faire changer nos modes de vie et nos valeurs.
Monsieur le Premier ministre, je veux vous interroger sur la lutte contre le virus. Pour réussir cette bataille, vous avez besoin de l'adhésion des Français :…
M. Pierre Cordier. Très juste !
M. Jean-Christophe Lagarde. …c'est leur comportement qui, d'abord et avant tout, permettra de l'emporter. Mais pour qu'ils adhèrent, il faut qu'ils comprennent ce que vous faites. La difficulté essentielle à laquelle nous sommes confrontés est là : ils ne comprennent plus, donc n'adhèrent pas.
Je prendrai un exemple parmi d'autres : les décisions que vous avez prises s'agissant des commerces. Au printemps dernier, l'ensemble des commerces que vous qualifiez de non essentiels ont été fermés, car il n'y avait ni masques, ni gel ; l'habitude et la culture du risque sanitaire faisaient également défaut. Aujourd'hui, on ne comprend pas sur quel fondement vous avez pris la décision de fermer les commerces de proximité. Y a-t-il une étude scientifique qui montrerait qu'ils sont plus contaminants que d'autres ? Peut-on nous expliquer en quoi un marchand de tissus, resté ouvert, est moins contaminant qu'un marchand de vêtements, que vous avez décidé de fermer ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UDI-I. – M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit également.) Pourquoi sur les marchés, en milieu ouvert, les commerces alimentaires sont-ils là et les commerces non alimentaires, absents ? Pourquoi, dans une auto-école, peut-on passer l'examen du permis de conduire, mais ne peut-on plus avoir de leçons de conduite ? Où est la cohérence dans ces décisions ? (Mêmes mouvements.) C'est cela qui empêche aujourd'hui, hélas, la compréhension et donc l'adhésion des Français.
Monsieur le Premier ministre, en arrivant à votre poste, vous avez fait de la concertation et de la volonté de territorialisation votre marque de fabrique, mais on ne retrouve pas ces principes dans les décisions relatives au confinement. Je crains – et vous devriez craindre aussi – que nous ne soyons, actuellement, à la fois inefficaces sanitairement et destructeurs économiquement.
Il est encore temps de s'adapter au terrain : cet après-midi, nous examinons un projet de loi qui permettrait notamment, suivant la proposition du Sénat, au couple maire-préfet d'aménager vos décisions en fonction du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I et sur quelques bancs du groupe LR. – M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Comme vous le savez toutes et tous, hier encore, plus de 400 personnes sont décédées de la maladie covid-19. Des dizaines de milliers de nos concitoyens, tous âges confondus, sont malades, avec des conséquences parfois très graves et des séquelles non moins lourdes.
Mme Frédérique Meunier. Vous ne répondez pas à la question !
M. Jean Castex, Premier ministre . Oui, la France, comme tous les autres pays européens, est confrontée à une deuxième vague épidémique particulièrement grave, qui s'est accélérée dans les semaines passées.
M. Pierre Cordier. Répondez à la question !
M. Jean Castex, Premier ministre . Cette situation, je vous l'ai expliqué jeudi dernier, a conduit le Gouvernement à prendre des mesures importantes et difficiles par le biais d'un reconfinement adapté.
M. Fabien Di Filippo. En fait, c’était mieux quand il ne parlait pas…
M. Jean Castex, Premier ministre . Le confinement, vous le savez, consiste à faire en sorte que le maximum de nos concitoyens restent chez eux pour casser la progression épidémique et réduire l'afflux de malades dans les services d'urgence. Il suppose donc de limiter à l'essentiel les déplacements. L'essentiel, c'est d'abord, comme pour la première vague, le travail ;…
M. Fabien Di Filippo. Et donc ?
M. Jean Castex, Premier ministre . …ce sont les établissements scolaires – que vous m'aviez tous demandé de laisser ouverts ; ce sont les commerces de première nécessité qui permettent de s'alimenter. Aller au-delà, c'est – disons-le – ne plus faire de reconfinement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
M. Sylvain Maillard. Eh oui !
M. Jean Castex, Premier ministre . Monsieur le président Lagarde, autant je comprends parfaitement les souffrances endurées par les Françaises et les Français, notamment par les commerçants – qui ne sont pour rien dans la situation et que nous soutenons par des mesures indispensables –, autant, je vous le dis sans détour, je ne comprends pas…
M. Loïc Prud'homme. Vous ne comprenez rien : ce n'est pas nouveau !
M. Jean Castex, Premier ministre . …que vous vous adressiez aux maires adhérents de votre formation politique, leur suggérant vivement de prendre des arrêtés pour s'opposer aux décisions de l'état d'urgence sanitaire. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.) Quand les Françaises et les Français sont dans la difficulté, quand la situation exige des mesures courageuses,…
Mme Patricia Mirallès. Bravo !
M. Pierre Cordier. Vos mesures sont incohérentes !
M. Jean Castex, Premier ministre . …quand la République est confrontée à la plus grave crise sanitaire qu'elle ait subie depuis des décennies, on n'appelle pas les maires, serviteurs de la République, à en violer les lois ! (Mêmes mouvements. – De nombreux députés des groupes LaREM et Dem se lèvent aussi. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
M. Nicolas Dupont-Aignan. Zéro !
M. Jean Castex, Premier ministre . Ils ne s'y sont pas trompés : seuls 71 des 36 000 maires ont pris un tel arrêté ; hier, 16 l'avaient retiré et 55, maintenu. Vous avez raison : les maires sont des gens responsables ! (Nouveaux applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
Auteur : M. Jean-Christophe Lagarde
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 novembre 2020