Gestion de la crise sanitaire
Question de :
M. Paul Molac
Morbihan (4e circonscription) - Libertés et Territoires
Question posée en séance, et publiée le 5 novembre 2020
GESTION DE LA CRISE SANITAIRE
M. le président. La parole est à M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Je souhaite, monsieur le Premier ministre, vous interroger sur votre méthode. Ce matin même, le porte-parole du Gouvernement déclare que le couvre-feu sera instauré à Paris à partir de vingt et une heures. Il est aussitôt démenti.
M. Sébastien Jumel. Mais que s'est-il donc passé ?
M. Paul Molac. Vos mesures manquent d'anticipation et de concertation, car elles sont annoncées parfois seulement quelques jours, voire quelques heures avant leur mise en place, sans concertation ni avec la représentation nationale, ni avec les syndicats représentants des professions touchées, ni même avec les élus locaux.
Si vos décisions sont contestées par les Français, ce n'est pas parce qu'ils contestent la lutte contre la pandémie mais parce qu'ils ne comprennent plus les mesures prises, qu'ils jugent brutales et injustes. Comment expliquer que les supermarchés, les écoles, les transports puissent rester ouverts, certes avec un protocole, mais que le petit commerce, lui, avec le même protocole, ne puisse être ouvert ? Nous sommes en fait dans la verticalité la plus absolue. Le Parlement est dessaisi de ses prérogatives, les élus locaux et les citoyens sont sommés de se soumettre à ces décisions qui viennent d'en haut.
Pourquoi ne pas avoir renforcé les mesures de protection pour les petits commerces avec la jauge des quatre mètres carrés, sans les fermer ? (M. Jean-Luc Mélenchon applaudit.) Pourquoi ne pas avoir pris appui sur les maires, comme pour les marchés, afin de permettre des protocoles adaptés rendant possible l'ouverture des petits commerces ? Vous avez dit, monsieur le Premier ministre, qu'ils étaient responsables ; c'est vrai. Vous parlez de manière générale de différenciation et vous ne la mettez pas en œuvre, alors que l'on sait que les taux de contamination et de mortalité sont différents selon les territoires.
Ma question est simple : allez-vous changer une méthode pour susciter l'adhésion de tous les Français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LT.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le député, je ne vous rappellerai pas que, semaine après semaine depuis le mois d'août, à mesure que nous alertions sur les signes de reprise épidémique, des mesures différenciées, territorialisées, étaient prises en fonction de la situation épidémique propre à chaque territoire. Nous tentions alors par tous les moyens de faire comprendre aux acteurs locaux, parfois avec succès, parfois avec moins de succès, pourquoi nous prenions des mesures pour freiner la circulation du virus, et ce dans la concertation avec les préfets, les maires, les présidents de département… Je pourrais, mais ce serait trop long, dresser la liste des nombreux élus auxquels nous avons parlé, les uns et les autres, semaine après semaine.
Le Premier ministre a très bien répondu tout à l'heure sur les commerces. Nous voulons limiter les contacts physiques.
M. Éric Coquerel. Et le métro, le RER ?
M. Olivier Véran, ministre . Nous laissons aux Français la possibilité de sortir pour emmener les enfants à l'école, s'éduquer, travailler, mais en privilégiant le télétravail, se déplacer pour les courses indispensables, et nous leur demandons de rester chez eux le reste du temps. Je ne sais pas comment expliquer à un Français, monsieur le député, ou en tout cas je ne suis pas sûr de pouvoir expliquer à un ami pourquoi il aurait encore le droit d'aller acheter un jeans mais pas celui de prendre un apéritif chez un ami. La réponse est là, dans la limitation des contacts sociaux. C'est exactement ce qui est mis en place dans la plupart des pays qui nous entourent.
Selon une étude sortie ce week-end, 45 % des Français considèrent que nous n'en faisons pas assez en termes de mesures pour freiner le virus, alors que 15 % considèrent que nous en faisons trop.
M. Loïc Prud'homme. Vous faites surtout n'importe quoi !
M. Olivier Véran, ministre . Au cours de cette séance, je trouve, même si chacun est libre, que l'on a beaucoup parlé des 15 % qui considèrent que nous en faisons trop, oubliant peut-être un peu de représenter les 45 % de Français qui ont peur du virus, sont prêts à faire des efforts et attendent de la représentation nationale qu'elle les comprenne. (Applaudissements sur de plusieurs bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.)
M. le président. La parole est à M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Vous pouvez me croire, monsieur le ministre : pendant tout le week-end, dans ma circonscription, je n'ai cessé d'être interpellé au sujet des décisions du Gouvernement. L'inquiétude s'est répandue comme une traînée de poudre.
M. Pierre Cordier. En effet, nous n'inventons rien !
M. Paul Molac. Je vous le dis : vos mesures ne sont pas comprises par les Français.
Vous ne vous appuyez pas suffisamment sur la représentation nationale et les élus locaux, pourtant prêts à vous aider. Voilà ce que je vous reproche !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Coquerel. Encore un peu de suffisance !
M. Olivier Véran, ministre. Permettez-moi de vous renvoyer la balle, monsieur le député : nous avons besoin de la représentation nationale ! Dans vos territoires, vous êtes au contact de la population, des commerçants et des élus : nous avons besoin, disais-je, des ambassadeurs que vous êtes pour expliquer que les décisions difficiles que nous prenons, à l'instar de tous nos voisins européens, visent à protéger la population et se justifient par la situation sanitaire. Nous ne nous entendrons jamais si vous partez du principe que nous faisons n'importe quoi. Si, au contraire, vous comprenez que nos décisions sont de bon sens et visent à protéger nos concitoyens, alors non seulement nous arriverons à nous entendre, mais peut-être les Français vous entendront eux aussi ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Auteur : M. Paul Molac
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 novembre 2020