Question au Gouvernement n° 3542 :
Article 24 de la proposition de loi relative à la sécurité globale

15e Législature

Question de : M. Patrick Mignola
Savoie (4e circonscription) - Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés

Question posée en séance, et publiée le 25 novembre 2020


ARTICLE 24 DE LA PROPOSITION DE LOI RELATIVE À LA SÉCURITÉ GLOBALE

M. le président. La parole est à M. Patrick Mignola.

M. Patrick Mignola. Monsieur le Premier ministre, alors que nous devons nous prononcer dans un instant sur la proposition de loi relative à la sécurité globale, qui vise à assurer un continuum de sécurité et à soutenir les forces de l'ordre, des actes inacceptables ont été commis, place de la République, à Paris. Face à une occupation illégale de l'espace public, pour politique, voire provocatrice, qu'elle ait été, il a été fait un usage ostensiblement disproportionné de la force.

Or, comme vous le savez, l'article 24 de la proposition de loi suscite des craintes, en particulier que la légitime protection des policiers s'accompagne d'une illégitime restriction de la liberté d'informer.

M. Jean-Paul Lecoq. Votez contre !

M. Patrick Mignola. Nous nous félicitons d'ailleurs qu'à la demande du président Christophe Castaner, vous ayez accepté de modifier cet article pour en fixer le cadre et les limites. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Pierre Cordier. Quelle démagogie !

M. Patrick Mignola. Mais alors, confrontons-le aux faits : si nous adoptons la proposition de loi, les journalistes pourront-ils filmer et diffuser des images comme celles d'hier soir ? Si nous adoptons la proposition de loi, pourrez-vous sanctionner, ainsi que c'est nécessaire, ceux qui, sur le terrain comme dans la chaîne de décision, n'ont pas été dignes de l'uniforme républicain (Protestations sur les bancs du groupe LR), risquant par là de nourrir l'opprobre détestable que certains s'acharnent à jeter sur leur profession ?

Monsieur le Premier ministre, la représentation nationale doit protéger ceux qui protègent nos libertés. Mais vous devez nous assurer qu'à cette bienveillance répondra l'exigence qu'aucune de ces libertés ne sera entamée, y compris celle de blâmer. Monsieur le Premier ministre, la représentation nationale attend la parole du chef du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et LaREM.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. Je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer, devant la représentation nationale, au sujet de la très importante proposition de loi relative à la sécurité globale, défendue par les députés Jean-Michel Fauvergue et Alice Thourot, dont je salue l'engagement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)

Je le dis d'emblée : aux yeux du Gouvernement, il s'agit d'un excellent texte,…

M. Jean-Paul Lecoq. Honteux !

M. Jean Castex, Premier ministre . …visant à améliorer la coordination des forces de sécurité, à améliorer l'efficacité des polices municipales – dont je rappelle le rôle essentiel, comme cela a été le cas lors de l'attentat de Nice – à mieux encadrer l'intervention des forces de sécurité privées et à créer, en accord avec Mme la maire de Paris, une police municipale à Paris – événement tout à fait significatif.

C'est un texte attendu par les maires, c'est un texte nécessaire pour tous nos concitoyens. Comme vous l'avez dit, il vise également à renforcer la protection que nous devons aux forces de sécurité : c'est l'objectif de l'article 24, qui fait l'objet de votre question.

M. Jean-Paul Lecoq. Honteux !

M. Jean Castex, Premier ministre . Je tiens à dire très clairement à la représentation nationale qu'il n'a jamais été, n'est pas, ne sera jamais dans les intentions du Gouvernement de porter jamais atteinte, de quelque manière que ce soit, à la liberté de la presse, à la liberté d'expression et aux fondements de la loi de 1881. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)

De tels procès d'intention sont totalement infondés : l'intention derrière l'article 24 n'est pas d'empêcher quiconque de filmer ou de diffuser des images…

Mme Mathilde Panot. C'est faux !

M. Jean Castex, Premier ministre . …permettant d'éclairer un fait ou un événement à caractère public – je l'expliquerai d'ailleurs aux syndicats de journalistes et aux représentants de la presse que je recevrai dès cette semaine –, mais bien de protéger nos forces de sécurité, auxquelles je rends hommage, non pas contre toute diffusion d'image, mais contre la diffusion d'images dans le but manifeste qu'il soit porté atteinte à l'intégrité de nos fonctionnaires de police et de gendarmerie. Vous savez bien que ces pratiques existent, qui ont pu entraîner des conséquences dramatiques : nous devrions donc tous être regroupés derrière cet objectif ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

Sur proposition du Gouvernement, nous avons déjà amendé le texte – et j'en remercie la représentation nationale. Je ne doute pas que les débats parlementaires, qui vont encore se poursuivre, permettront de l'améliorer davantage encore…

M. Fabien Di Filippo. Il en a besoin !

M. Jean Castex, Premier ministre . …et de clarifier ce qui mérite de l'être, pour que ne subsiste aucun doute sur notre ferme intention d'assurer l'indispensable protection de nos forces de sécurité dans l'entier respect de nos libertés démocratiques et de l'État de droit. Je vous annonce donc qu'au terme du processus législatif, je saisirai moi-même le Conseil constitutionnel sur l'article 24. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

Données clés

Auteur : M. Patrick Mignola

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Police

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 novembre 2020

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