Question au Gouvernement n° 3926 :
Déprogrammations de soins

15e Législature

Question de : M. Bernard Perrut
Rhône (9e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 7 avril 2021


DÉPROGRAMMATIONS DE SOINS

M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, au-delà de la crise sanitaire particulièrement grave que nous affrontons, et du besoin d'accueillir les personnes atteintes du coronavirus, je veux évoquer l'inquiétude et le désarroi de nos concitoyens concernés par l'annulation de leurs consultations, de leurs soins et actes chirurgicaux pourtant indispensables. Déjà en 2020, cette déprogrammation a touché l'ensemble du territoire. Elle atteint actuellement jusqu'à 80 %, dans certains hôpitaux, tant il devient impératif d'accroître le nombre de lits et de soignants, dont je salue l'engagement, au profit des malades du covid-19, plus spécialement ceux qui sont en réanimation.

Nous mesurons les conséquences d'une opération reportée, d'une greffe annulée, d'un diagnostic devenu impossible. Selon des projections, les retards de prise en charge des patients atteints du cancer pourraient entraîner plusieurs milliers de décès supplémentaires dans les années à venir. L'année dernière, 100 000 dépistages n'ont pas pu être effectués, et plus d'un millier de greffes n'ont pas eu lieu. Combien en compterons-nous cette année ? L'année 2021 s'annonce à nouveau dramatique en termes de pertes de chance pour nos malades. Aggravation des symptômes, déprime, anxiété : entre sentiment d'abandon et impact sur leur santé, ces malades sont les victimes collatérales de la crise sanitaire. Nous ne pouvons pas faire un pari sur la santé de certains pour soigner les autres.

M. Pierre Cordier. Très bien dit !

M. Bernard Perrut. Comment expliquer que notre système de santé en soit arrivé là et qu'il ne puisse pas mieux s'adapter à une telle crise ? Pourquoi tous les lits de réanimation promis ne sont-ils pas opérationnels ? Qu'allez-vous faire pour ces patients qui ne peuvent pas être soignés ? Comment limiter les conséquences sanitaires à court et long terme, notamment pour les maladies chroniques ? Nous ne pouvons pas, vous ne pouvez pas, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, accepter que des vies puissent être sacrifiées. (Applaudissements sur les bancs des groupe LR, FI et GDR. - M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Votre question me permet d'envoyer un message à la population, le même que l'année dernière : ce n'est pas parce que des soins sont déprogrammés et parce qu'il y a une pandémie que les Françaises et les Français doivent faire moins attention à leur santé en général. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

M. Ugo Bernalicis. Ce n'est pas vraiment la question !

M. Olivier Véran, ministre . Je parle en particulier de dépistages de cancers qui ne font l'objet d'aucune déprogrammation et qui sont pourtant en recul depuis plusieurs mois. Ce recul est inquiétant. Le nombre de mammographies, celui des dépistages du cancer colorectal ou des dépistages des infections sexuellement transmissibles sont des indicateurs que nous surveillons particulièrement ; leurs évolutions sont des conséquences indirectes de la crise sanitaire.

M. Éric Ciotti. C'est la faute des Français peut-être ?

M. Olivier Véran, ministre . Vous soulignez à juste titre que la déprogrammation des soins peut avoir des conséquences sur la santé des Français. C'est bien pour cela que je répondais encore la semaine dernière à la question de savoir pourquoi on n'était pas tout de suite passé à 10 000 lits de réanimation en expliquant que nous augmentions progressivement leur nombre – nous avons dépassé les 8 000 lits – à mesure que les besoins augmentaient, afin de déprogrammer le moins de soins possible. Il ne faut pas que la déprogrammation soit une variable d'ajustement et nous faisons attention à la santé de tous les Français, qu'ils soient atteints du covid-19 ou d'autres pathologies.

M. Ugo Bernalicis. On ne peut pas déprogrammer le ministre ?

M. Olivier Véran, ministre . Ces décisions sont médicales, soignantes, prises localement en fonction des besoins de lits de réanimation.

Le sujet n'est pas le lit physique, vous le savez…

M. Ugo Bernalicis. Ils peuvent dormir par terre !

M. Olivier Véran, ministre . Le sujet, ce sont les ressources humaines, les médecins, les infirmiers et infirmières spécialisés de réanimation. En un an, les hôpitaux en ont formé des centaines, des milliers aux actes du quotidien de réanimation, mais la spécialité de réanimation médicale nécessite douze ans d'études et de formation. Nous relançons évidemment la machine, vous le savez, mais, dans un délai aussi bref, cela ne peut pas être la solution.

M. Sébastien Jumel. Deux postes seulement !

M. Olivier Véran, ministre . Je le répète, nous parlons de choix du quotidien, extrêmement importants. C'est aussi la raison pour laquelle le Président de la République a annoncé des mesures fortes pour freiner la circulation du virus, protéger nos hôpitaux et tous les Français, qu'ils aient le covid ou non. (M. Philippe Berta applaudit.)

M. Pierre Cordier. On les attend depuis un an !

Données clés

Auteur : M. Bernard Perrut

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique :

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 avril 2021

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