Question au Gouvernement n° 4024 :
Justice et sécurité

15e Législature

Question de : M. Julien Dive
Aisne (2e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 19 mai 2021


JUSTICE ET SÉCURITÉ

M. le président. La parole est à M. Julien Dive.

M. Julien Dive. Pro patria vigilant – « Ils veillent pour la patrie », cette devise de la police est aujourd'hui incomplète : les forces de l'ordre ne se contentent pas de veiller mais se sacrifient au service de la population. Stéphanie Monfermé, 49 ans, poignardée à Rambouillet, Éric Masson, 36 ans, abattu en plein centre-ville d'Avignon, Arno Mavel, Rémi Dupuis, Cyril Morelle tués dans le Puy-de-Dôme en décembre 2020 et tant d'autres noms de victimes, de parents, de filles et de fils tués dans l'exercice de leurs fonctions.

Comment défendre l'ordre républicain quand la réponse pénale n'est pas assez forte ? Le ras-le-bol et les inquiétudes face à l'absence d'autorité de l'État se multiplient, que ce soit nos concitoyens qui craignent pour leur sécurité et ne font plus confiance à la justice, ou les policiers qui ont suspendu leur participation au Beauvau de la sécurité, ou encore les militaires et les policiers qui publient des tribunes pour mettre en lumière un malaise inédit dans la société,…

M. Marc Le Fur. Eh oui !

M. Julien Dive. …sans oublier ces fonctionnaires qui se suicident, comme ces jours-ci à Strasbourg et Amiens.

M. Fabien Di Filippo. C'est exact, monsieur le Premier ministre !

M. Julien Dive. Monsieur le Premier ministre, sous la pression des syndicats de police, vous avez annoncé la semaine dernière un durcissement des peines encourues par les agresseurs des membres des forces de l'ordre. Il était temps ! Il a fallu une flambée des violences et des assassinats pour que vous réagissiez. Pourquoi dépendre de l'actualité à l'heure où l'État doit être capable d'anticiper et d'appréhender dans sa réalité le quotidien des policiers ? Or nous faisons face à une justice qui laisse toute une génération de délinquants émerger et sévir.

Pour rétablir la confiance dans l'autorité, il faut rétablir la sécurité mais aussi la justice.

Aujourd'hui, l'Assemblée va examiner un projet de loi « pour la confiance dans l'institution judiciaire ».

M. Fabien Di Filippo. Mais pas « pour la confiance dans le Gouvernement », en tout cas !

M. Julien Dive. Mais comment dépasser l'intention quand votre garde des sceaux semble plus préoccupé par sa campagne pour les élections régionales dans les Hauts-de-France que par une réforme pénale plus que nécessaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

Monsieur le garde des sceaux, comment pouvez-vous rétablir la justice tout en étant un ministre à temps partiel ? Occupez-vous de rétablir l'autorité dans ce pays, plutôt que de faire des Hauts-de-France votre nouveau prétoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice. (Huées sur les bancs du groupe LR.)

M. Damien Abad. Qu'il soit ministre à plein temps !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Les syndicats de policiers, et c'est bien légitime,…

M. Maxime Minot. Nous ne sommes pas au bar !

Plusieurs députés du groupe LR . Touriste !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux . …réclament le respect.

M. Damien Abad. Le respect, c'est d'être ministre à plein temps !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux . L'institution judiciaire aussi mérite d'être respectée. J'aurai l'honneur de le développer dans un moment : la police et la justice sont dans la même barque républicaine. Vous nous rappelez à chaque séance vos vieilles marottes comme les peines planchers qui résoudraient tout. Eh bien, non. Parce que c'est un fiasco et certains représentants des syndicats de policiers eux-mêmes le disent.

M. Thibault Bazin. C'est le laxisme à la Taubira !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux . Le quantum des peines prononcées pendant la période allant de 2008 à 2013 est nettement inférieur à celui des peines prononcées après l'abrogation des peines planchers. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

Et si vous avez, messieurs, la solution magique, alors sortez-nous des chiffres qui montreraient que pendant cette période, avec ces peines planchers – qui d'ailleurs n'en sont pas, vous le savez, puisqu'elles ont été délaissées par l'institution judiciaire et à juste raison –, sortez des chiffres qui montreraient, disais-je, que pendant cette période, qui vous est si chère puisque c'est celle où vous avez été au pouvoir, la délinquance aurait baissé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – M. Erwan Balanant applaudit également.)

S'il me reste suffisamment de temps, j'ai quelques chiffres à vous fournir : 132 000 peines d'emprisonnement ferme ont été prononcées en 2019, contre 120 000 en 2015. C'est cela, le laxisme, sans doute ! 113 000 années de prison ont été prononcées en 2016, contre 89 000 en 2005. C'est cela, le laxisme, n'est-ce pas ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

M. Fabien Di Filippo. Et qu'en est-il de l'exécution des peines ?

Un député du groupe LR . Ça ne veut rien dire !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux . Entre 2002 et 2020, la population carcérale a augmenté de près de 25 000 personnes, ce qui n'est pas sans poser les problèmes de surpopulation que vous connaissez ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.)

Données clés

Auteur : M. Julien Dive

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 mai 2021

partager