Question au Gouvernement n° 4053 :
Langues régionales

15e Législature

Question de : M. Yannick Kerlogot
Côtes-d'Armor (4e circonscription) - La République en Marche

Question posée en séance, et publiée le 26 mai 2021


LANGUES RÉGIONALES

M. le président. La parole est à M. Yannick Kerlogot.

M. Yannick Kerlogot. Monsieur le Premier ministre, dans sa décision du 21 mai 2021, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme le forfait scolaire à verser par les communes concernées au bénéfice des élèves inscrits dans une école privée sous contrat d’une collectivité voisine et qui enseigne les langues régionales. C’est une avancée historique, rendue possible par la mobilisation transpartisane des députés de cet hémicycle. Elle apporte une solution financière attendue par les intéressés depuis des décennies. Mesurons-le, tous ensemble.

Le Conseil constitutionnel s’est par ailleurs saisi d’office d’une autre disposition de la loi en lien avec l’enseignement, à savoir l’enseignement dit « immersif » en langue régionale. Il relève que cette forme d’enseignement est une méthode qui consiste notamment à utiliser la langue régionale comme langue principale d’enseignement et comme langue de communication au sein de l’établissement et qu’à ce titre, la nouvelle loi méconnaît l’article 2 de la Constitution. Certains esprits – partisans – s’emploient aujourd’hui à proclamer la mort annoncée des écoles concernées quand la réalité de terrain vient confirmer que le terme d’immersion est à nuancer.

Permettez-moi d’observer qu’au sein de ces établissements la langue française reste évidemment la langue de communication utilisée dans tous les actes administratifs, les conseils d’administration et les conseils d’école. Il va de soi également qu’à l’issue de la scolarité la langue française est tout aussi bien maîtrisée que la langue régionale.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous confirmer que la vie des établissements concernés n’est nullement touchée par la décision du Conseil constitutionnel, tant dans leur existence juridique que dans leur pratique pédagogique, puisque cette décision ne porte pas modification de l’article L. 312-10 du code de l’éducation actuellement en vigueur ? Pouvez-vous enfin nous indiquer quelles démarches vous entendez entreprendre pour stabiliser définitivement l’enseignement des langues régionales et le statut des établissements concernés sans que puisse leur être opposé l’article 2 de la Constitution ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. Les langues régionales sont une chance pour la République française. Je le dis devant votre assemblée. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et LT.)

M. Pierre Cordier. Pas de langue de bois, monsieur le Premier ministre !

M. Jean Castex, Premier ministre. Elles font d’ailleurs partie, depuis la révision constitutionnelle de juillet 2008 – excellente révision constitutionnelle – du patrimoine de la Nation. L’élu que je suis, ou que j’étais, d’un territoire où une langue à part entière est particulièrement vivace – et pas seulement dans l’enseignement – peut témoigner du fait qu’il n’existe pas d’opposition entre ces langues régionales et le français, langue de la République.

Vous évoquez la décision récemment rendue par le Conseil constitutionnel sur le texte adopté le 8 avril dernier. Je constate avec vous, mesdames et messieurs les députés que, sur ce chapitre, cette décision comporte trois avancées majeures : d’abord, la reconnaissance par le Conseil constitutionnel de l’appartenance des langues régionales au patrimoine immatériel de la France ; deuxièmement, la consécration par cette même instance de la place de l’enseignement des langues régionales à tous les niveaux d’enseignement, de la possibilité pour les collectivités territoriales d’accorder des subventions d’investissement ainsi que du régime des forfaits, longtemps l’objet de contestations.

M. Marc Le Fur. Les forfaits existaient !

M. Jean Castex, Premier ministre. Enfin, le Conseil constitutionnel reconnaît la constitutionnalité de l’autorisation prévue par la loi de l’affichage de traductions en langue régionale sur les inscriptions et les signalétiques publiques.

Il reste, et vous avez parfaitement raison de le souligner, la question de l’enseignement immersif. Il nous appartient politiquement de tirer toutes les conséquences de la décision de censure du Conseil constitutionnel qui ne porte pas, vous l'avez dit, modification de l’article L. 312-10 du code de l’éducation.

S’agissant d’un texte d’origine parlementaire, je vous annonce que je vais confier à deux députés une mission… (Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.)

Mme Marianne Dubois. Encore une mission !

M. Jean Castex, Premier ministre. …pour que soient tirées toutes les conséquences de cette décision du Conseil constitutionnel. À la suite de cela, avec le ministre de l’éducation nationale et sur la base des préconisations ainsi formulées, je recevrai l’ensemble des représentants des établissements d’enseignement en langue régionale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

Mon souci, et le souci du Gouvernement est, comme toujours, d’apaiser le débat…

Un député du groupe LR . Pompier pyromane !

M. Jean Castex, Premier ministre. …et de trouver, dans le cadre de l’État de droit et des lois de la République, une solution permettant de respecter non seulement notre Constitution, mais aussi les engagements que le Président de la République a rappelés à Quimper le 21 juin 2018 : les langues régionales ont un vrai rôle à jouer dans la République. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.)

Données clés

Auteur : M. Yannick Kerlogot

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mai 2021

partager