Libertés publiques
Question de :
M. Charles de Courson
Marne (5e circonscription) - Libertés et Territoires
Question posée en séance, et publiée le 26 mai 2021
LIBERTÉS PUBLIQUES
M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson. Monsieur le Premier ministre, le groupe Libertés et territoires, auquel j'appartiens, a constamment combattu les dispositions liberticides des divers projets et propositions de loi relatifs à la sécurité. Lors des débats sur la proposition de loi mal intitulée « pour une sécurité globale préservant les libertés », notre groupe s'est opposé aux dispositions liberticides, en particulier aux anciens articles 22 et 24, respectivement relatifs à la captation d'images par drones et à la création d'un délit de provocation à l'identification des agents des forces de l'ordre en opération. Cette loi souffrait d'un déséquilibre manifeste entre la nécessité de maintenir la sécurité publique et celle de préserver les libertés fondamentales. Tout au long des débats, le Gouvernement et sa majorité sont restés sourds à nos arguments à ce sujet.
Jeudi 20 mai, le Conseil constitutionnel a purement et simplement annulé ces deux articles très contestés. Concernant les drones, la mesure portait atteinte au respect de la vie privée. Concernant l'ex-article 24, le législateur n'avait pas observé le principe de légalité des délits et des peines, selon lequel on ne peut être pénalement condamné qu'en vertu d'un texte de loi précis et clair. D'ailleurs, cet article faisait également peser une menace importante sur la liberté de la presse.
D'autres textes en cours d'examen constituent des menaces pour les libertés publiques, comme l'article 18 du projet de loi confortant le respect des principes de la République et de lutte contre le séparatisme, qui calque la disposition de l'ex-article 24, censuré, de la proposition de loi pour une sécurité globale, puisqu'il vise à sanctionner la divulgation d'informations permettant d'identifier une personne. La commission mixte paritaire a échoué ; cet article sera donc prochainement examiné de nouveau à l'Assemblée nationale.
Après la décision du Conseil constitutionnel, le Gouvernement renoncera-t-il définitivement à ces mesures liberticides ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LT.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur. Sur les quatre-vingt-dix articles de la proposition de loi déposée par vos collègues Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue, sept seulement ont fait l'objet d'une réserve d'interprétation ou d'une censure.
Un député du groupe SOC . C'est beaucoup.
M. Gérald Darmanin, ministre . Le reste, à savoir 90 % du texte, permet donc dès aujourd'hui de travailler à renforcer la sécurité de nos concitoyens, grâce à la protection des forces de l'ordre, notamment la protection fonctionnelle, et au travail que peuvent accomplir les policiers municipaux, en consultant certains fichiers ou en améliorant considérablement la sécurité privée dans notre pays, notamment en prévision des Jeux olympiques et de la coupe du monde de rugby, que la France organise.
Certaines dispositions ont fait l'objet à la fois d'une réserve et d'une censure, mais je n'ai pas la même lecture que vous de la décision du Conseil constitutionnel concernant l'article 24. Il est faux de dire qu'il a été entièrement censuré. La disposition que les députés de la majorité et le Gouvernement souhaitaient appliquer en premier lieu tendait en effet à pénaliser ceux qui inscrivaient dans un fichier publié sur internet l'identité des policiers et leur photographie, les mettant particulièrement en danger – on pense au sombre et triste, ignominieux même, site Copwatch.
Le Conseil constitutionnel a validé la disposition défendue par les parlementaires de la majorité. Le délit de provocation à l'identification créé par les rapporteurs du Sénat et validé par la commission mixte paritaire a, lui, été censuré par le Conseil constitutionnel ; nous en prenons acte. Nous ne souhaitons pas revenir sur ces dispositions, sauf en ce qui concerne les drones, que vous avez évoqués : nous constatons que tout le monde en France peut en faire voler, sauf les policiers et les gendarmes, ce qui, vous en conviendrez, est un peu délicat lorsqu'on lutte contre le trafic de stupéfiants, les troubles à l'ordre public ou les violences urbaines.
Après avoir consulté notamment la CNIL – Commission nationale de l’informatique et des libertés –, je proposerai prochainement à M. le Premier ministre de nouvelles dispositions à présenter au Parlement. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem. – M. Vincent Descoeur applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson. J'ai posé une question précise : allez-vous, oui ou non, renoncer à l'article 18 en cours de discussion ? Vous savez pertinemment que nous saisirons le Conseil constitutionnel ; or cet article est aussi large que l'article 24.
Auteur : M. Charles de Courson
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Droits fondamentaux
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mai 2021