Question au Gouvernement n° 4510 :
Crise à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie

15e Législature

Question de : M. Jean-Christophe Lagarde
Seine-Saint-Denis (5e circonscription) - UDI et Indépendants

Question posée en séance, et publiée le 17 novembre 2021


CRISE À LA FRONTIÈRE ENTRE LA POLOGNE ET LA BIÉLORUSSIE

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le Premier ministre, aux portes de l'Europe, à la frontière polonaise se jouent en ce moment même à la fois un drame et un scandale.

Un drame, quand on voit ces familles, hommes, femmes, enfants, démunies de tout, laissées à elles-mêmes dans des forêts glaciales, et dont certaines sont en danger de mort. Cette crise sanitaire et humanitaire absolument insupportable exige que l'Union européenne demande à la Pologne que le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) et les associations humanitaires puissent porter secours à celles et ceux qui sont prisonniers d'une situation politique qu'ils n'ont pas demandée.

Un scandale, quand le dictateur biélorusse Loukachenko utilise ces populations qu'il va chercher au Proche et au Moyen-Orient – par avions de ligne s'il vous plaît – pour faire chanter l'Union européenne qui avait réagi à l'enlèvement d'un de ses opposants après un détournement d'avion.

Voilà ce qu'il est en train de se passer, et l'Union européenne doit à la fois être en mesure de convaincre la Pologne de laisser passer les secours - je n'ai pas dit de laisser entrer les réfugiés - et d'agir sur le donneur d'ordre du dictateur Loukachenko. Ce régime est tellement proche de la Russie de M. Poutine que M. Poutine peut faire cesser ce scandale. Nous attendons de la France, de l'Union européenne, de notre partenaire allemand - je crois que des discussions ont commencé - qu'ils fassent comprendre à M. Poutine que cela ne peut pas durer ainsi. Un prédécesseur, si j'ose dire, avait déjà donné l'exemple : je pense au président turc M. Erdogan. L'Europe ne peut pas être un ensemble d'États qu'on fait chanter sur la misère humaine. Nous devons à la fois être capables de convaincre et de sauver les gens qui sont en danger et d'interdire - ou en tout cas de leur tordre le bras - aux dictateurs de livrer une telle agression contre l'ensemble de l'Union européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I et sur quelques bancs du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. Merci de cette question qui porte sur un sujet extrêmement important, car ce qui se passe aujourd'hui à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie est une tragédie humaine grave pour l'Europe et les valeurs que nous représentons, grave pour la pression qui pèse sur les frontières extérieures de l'Union, grave enfin parce que, vous l'avez dit, le régime de Loukachenko instrumentalise de manière inhumaine et, je le dis, éhontée les flux migratoires pour tenter de déstabiliser et de désunir l'Union européenne. C'est intolérable et inacceptable !

Comme les ministres l'ont fait hier au Conseil des affaires étrangères à Bruxelles, et comme le ministre français de l'Europe et des affaires étrangères l'a redit à son homologue polonais, il nous faut réaffirmer avec force notre pleine et entière solidarité à l'égard de la Pologne, comme de la Lituanie et de la Lettonie plus tôt. Cela a été l'objet de la déclaration adoptée à Vingt-sept par l'Union européenne, dès vendredi. Il nous faut pleinement appuyer les demandes des autorités polonaises de protection de la frontière extérieure de l'Union et d'accueil des personnes qui ont besoin de protection, comme vous l'avez demandé et comme nous l'avons fait envers la Lituanie en septembre dernier. Il faut aussi maintenir une pression très forte sur les autorités biélorusses. Les ministres des affaires étrangères se sont mis d'accord hier sur l'adoption rapide, et je le dis à la représentation nationale, d'un cinquième paquet de sanctions contre ce régime. Ils se sont aussi accordés pour élargir les critères de désignation permettant de sanctionner tous ceux, en Biélorussie ou ailleurs, qui se sont impliqués dans cet odieux trafic d'êtres humains. Cela doit ouvrir la voie à un sixième paquet de sanctions.

Nous devons également maintenir une action diplomatique déterminée avec nos alliés et en appui de la Commission européenne et du Haut Représentant à destination des pays d'origine et de transit pour tarir ces flux. J'observe d'ailleurs que ces efforts commencent à porter leurs fruits.

Vous l'avez dit, cette crise ne fait que confirmer la nécessité de renforcer fortement, de refonder même notre politique commune en matière d'asile et d'immigration. Nous devons donc avancer sans plus attendre sur le pacte sur la migration et l'asile proposé par la Commission en septembre 2020. La France a déjà fait plusieurs propositions pour faire évoluer et renforcer ce pacte. La présidence française de l'Union, à compter du 1er janvier prochain, nous donnera l'occasion de faire progresser le sujet, et nous en discuterons dans cet hémicycle à l'occasion du débat sur la présidence française de l'Union européenne. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Christophe Lagarde

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Immigration

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 novembre 2021

partager