Question au Gouvernement n° 4559 :
Droit voisin

15e Législature

Question de : M. Laurent Garcia
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés

Question posée en séance, et publiée le 24 novembre 2021


DROIT VOISIN

M. le président. La parole est à M. Laurent Garcia.

M. Laurent Garcia. Madame la ministre de la culture, la France a été la première à transposer l’article 15 de la directive sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique avec l’adoption à l'unanimité, en 2019, de la proposition de loi de Patrick Mignola, créant un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse. Cet été, deux ans après la promulgation de ce texte, le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés a créé une mission d'information sur l'application du droit voisin au bénéfice des agences, des éditeurs et des professionnels du secteur de la presse, ou plutôt sur son inapplication.

Madame la ministre, les plateformes numériques ne peuvent plus se cacher derrière le prétexte qui consiste à dire aux éditeurs : « Estimez-vous heureux que nos services d'actualité vous offrent gracieusement une tribune, du trafic et des revenus. » Pourquoi les GAFAM – Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft – cachent-ils obstinément les montants issus de l'exploitation des contenus de presse ? Pourquoi les cachent-ils même lors de négociations protégées par le secret, même face à une amende de 500 millions d'euros prononcée par l'Autorité de la concurrence ? Quand il s’agit d'apprécier les revenus directs et indirects tirés de l'exploitation des contenus, les négociations butent sur la rétention d'information systématique et avérée de plusieurs GAFAM. Les éditeurs, agences et professionnels de la presse sont impuissants face à une conduite qui s'apparente à un abus de position dominante.

À défaut d'un accord trouvé dans un délai de six mois, la loi que nous avons votée prévoit la possibilité pour les parties à la négociation de saisir une commission placée sous l'autorité d'un représentant de l'État. À défaut de solution de compromis trouvée entre les parties, la commission est chargée de rendre sa décision dans un délai de quatre mois.

En attendant les conclusions de la mission que j’ai l'honneur de rapporter aux côtés de la présidente Virginie Duby-Muller, comment le Gouvernement agit-il pour soutenir nos entreprises et leur organisme de gestion collective récemment créé, et pour accroître la transparence des données ? La présidence française de l'Union européenne devra aussi être l'occasion de consolider le droit voisin. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)

M. David Corceiro. Excellent !

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture. La reconnaissance du droit voisin est une grande avancée démocratique. Elle permet aux journaux, aux magazines et aux agences de presse de recevoir une juste rémunération quand leurs contenus sont réutilisés par les plateformes. Vous avez eu raison de rappeler le rôle essentiel de la France dans cette conquête démocratique puisque notre pays en a été le fer de lance dans les textes européens. Vous avez rappelé la loi du 24 juillet 2019 qui a concrétisé ces progrès dans la législation nationale. Merci pour le travail que vous avez effectué, vous et le président Mignola !

Nous avons le texte, il faut maintenant le rendre effectif. Encore une fois, il y a loin de la coupe aux lèvres entre la loi et son application. On ne peut que regretter que des négociations aient été menées de manière parfois déloyale – disons le mot – entre les plateformes et les éventuels ayants droit. La décision de l'Autorité de la concurrence du 12 juillet dernier, très claire, a stigmatisé cet état de fait. C'est la raison pour laquelle j'ai invité les différentes parties prenantes à reprendre les négociations. Comme nous l'avons constaté récemment, certaines ont été concluantes. Néanmoins, les négociations n'aboutissent pas dans deux secteurs particulièrement importants : l'alliance de la presse d'information générale et le syndicat des éditeurs de la presse magazine. J'interviens donc en appui de ces organisations pour que les négociations puissent être menées le plus rapidement possible, puisque les délais sont en train de s'épuiser.

Bien entendu, si on en était réduit à des procédures contentieuses – ce qui serait regrettable –, j'accompagnerais les ayants droit. Enfin, nous serons comme d'habitude aux côtés des organes de presse – qui sont absolument indispensables – pour que leurs droits soient finalement reconnus. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.)

M. Jean-Louis Bourlanges. Bravo, madame la ministre !

Données clés

Auteur : M. Laurent Garcia

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Propriété intellectuelle

Ministère interrogé : Culture

Ministère répondant : Culture

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 novembre 2021

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