Déserts médicaux
Question de :
Mme Cécile Untermaier
Saône-et-Loire (4e circonscription) - Socialistes et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 15 décembre 2021
DÉSERTS MÉDICAUX
M. le président. La parole est à Mme Cécile Untermaier.
Mme Cécile Untermaier. Depuis plus de trois ans, monsieur le Premier ministre, les groupes d’opposition vous interrogent sur la désertification médicale. La semaine dernière, vous avez encore écarté la question du président Chassaigne sur ce sujet. Nous avons pourtant franchi le cap de l'admissible et les personnes sans médecin référent se privent de soins, faute de trouver un professionnel.
M. Patrick Hetzel. Très juste !
Mme Cécile Untermaier. On ne peut plus inaugurer des maisons de santé pilotées par l'Agence régionale de santé (ARS) sans les médecins, comme nous l'avons fait hier à Cuisery et Frangy-en-Bresse, en faisant de surcroît peser de vrais risques financiers sur ces collectivités.
La cartographie de la répartition des médecins est éloquente puisque les effectifs varient du simple au triple selon les secteurs. Selon la Cour des comptes, les mesures incitatives sont coûteuses et inefficaces. Le numerus apertus ne règle pas le problème actuel de la désertification médicale, mais vous ne voulez pas de mesures coercitives et défendez des mesures incitatives sans effets. Or la politique nationale de santé publique exige des résultats. Nous devons tenter d'autres actions. Que nous proposez-vous ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Votre constat est très juste, madame la députée : nous manquons de médecins. Si nous en manquons, c'est parce que, durant quarante ans, il a été décidé d'arrêter d'en former. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Le numerus clausus a été une formidable machine à empêcher de jeunes étudiants français d'apprendre la médecine en France. Pendant un temps, pour compenser, on a fait appel à des médecins qu'on allait chercher en Roumanie en recourant à des chasseurs de têtes, puis cela n'a plus suffi.
M. Pierre Cordier. Vous auriez dû en parler à Marisol Touraine !
M. Olivier Véran, ministre . Vous posez une question tout à fait légitime. Croyez bien que le Gouvernement a pleinement conscience des difficultés de millions de nos concitoyens à trouver un médecin. Qu'allons-nous faire, demandez-vous, en attendant que la suppression du numerus clausus, décidée en 2018, produise ses effets, à savoir une augmentation du nombre de médecins installés ?
Tout d'abord, je signale que le recours à la télémédecine a été multiplié par cent en deux ans, le nombre d'acte de téléconsultation passant de 10 000 à 1 million. Cela ne remplace pas tout, mais cela aide.
Ensuite, le Président de la République a donné au Gouvernement la mission de doubler le nombre de maisons de santé pluriprofessionnelles en cinq ans. Ce sera fait.
M. Vincent Descoeur. Rien ne garantit une juste répartition !
M. Olivier Véran, ministre . Il nous a demandé de doubler le nombre de centres de santé. Nous avons très fortement augmenté leur nombre et nous pouvons atteindre l'objectif de doublement.
En outre, nous avons développé les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) qui permettent aux médecins et aux professionnels paramédicaux de mieux travailler. Nous avons déployé plus de 2 000 assistants médicaux au cours des dernières années sur l'ensemble du territoire national. Ça fonctionne. Pour les consultations de soins non programmés, des services d'accès sont en cours d'expérimentation dans une vingtaine de départements. Là aussi, ça fonctionne.
Dans le dernier budget de la sécurité sociale, vous avez eu l'occasion de voter pour que certains professionnels de santé soient en accès direct. Nous expérimentons la mesure pour les kinésithérapeutes et les orthophonistes. Ça fonctionne. Vous avez pu voter pour que les orthoptistes puissent prescrire des lunettes lorsqu'une personne a des difficultés à trouver un ophtalmologue. La mesure sera opérationnelle dans les prochaines semaines, et ça va fonctionner.
M. Patrick Hetzel. Si l'on vous écoute, tout va bien !
M. Olivier Véran, ministre . En attendant que le nombre de médecins augmente, nous trouvons toutes les dispositions possibles et imaginables pour faire reculer les déserts médicaux. Actuellement, nous formons 10 500 médecins par an – contre 8 000 au début de quinquennat et 7 000 au début du quinquennat précédent – et ce nombre devrait passer à 12 000, 13 000, 14 000 ou 15 000. Nous déployons des capacités de formation et nous développons les stages en ambulatoire dans les zones rurales. Nous allons y arriver. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. Régis Juanico. Ils sont tous ministres, les médecins !
M. le président. La parole est à Mme Cécile Untermaier.
Mme Cécile Untermaier. Pour ma part, je n'ai jamais prétendu que vous n'avez rien fait. Il est clair que vous avez fait des choses, mais les résultats ne sont pas à la hauteur des exigences d'une politique nationale de santé publique.
Si j'ai insisté sur la cartographie, c'est que le problème est moins le nombre de médecins que leur répartition :…
M. Thierry Benoit. Tout à fait !
Mme Cécile Untermaier. …il y a un médecin pour 10 000 habitants dans certains secteurs, alors que le ratio est de trois pour 10 000 dans d'autres.
Quant aux maisons et aux centres de santé, ils sont parfois vides. Le problème reste donc bien prégnant. Devons-nous dire à nos concitoyens de prendre patience ? La santé n'attend pas. Devons-nous dire aux collectivités locales d'assumer la carence de l'État ? Elles n'en ont pas les moyens. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR.)
Auteur : Mme Cécile Untermaier
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Médecine
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 décembre 2021