Question au Gouvernement n° 4684 :
Menaces et violences contre les élus

15e Législature

Question de : Mme Lamia El Aaraje
Paris (15e circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 12 janvier 2022


MENACES ET VIOLENCES CONTRE LES ÉLUS

M. le président. La parole est à Mme Lamia El Aaraje.

Mme Lamia El Aaraje. « Je suis prêt à venir te trancher la tête pour montrer ma fermeté face à ta dictature ! » ; « Tu vas crever, ordure ! » ; « Notre pays n'a pas besoin de nègres pour représenter ses citoyens ! » ; « La seule solution pour reconstruire la France est donc de renvoyer les parasites islamiques (tes fesses de « socialope ») ».

Non, chers collègues, je ne suis pas en train de péter un plomb dans notre assemblée. Ceci est une triste réalité, la réalité d'une démocratie malade, la réalité d'un pays qui considère ses élus comme l'exutoire de tous ses maux, la réalité d'une République qui aurait oublié ceux qui la font vivre, les porte-voix de ses citoyens, les architectes et intendants de son quotidien – ses représentants. Plus grave encore : 25 septembre 2021, devant le domicile de Christian Estrosi ; 22 décembre 2021, au domicile de Sandrine Rousseau ; hier, au domicile de Stéphane Claireaux. Jusqu'où laisserons-nous la violence croître ? Jusqu'à quel point accepterons-nous de nous laisser intimider, de voir la parole publique muselée ?

Ma question a davantage vocation à être une alerte collective partagée sur tous les bancs républicains de notre assemblée et, je le sais, par le Gouvernement. Chers collègues, je ne suis souvent pas d'accord avec un certain nombre d'entre vous, je continuerai pourtant à me battre pour que vous ayez le droit d'exprimer vos positions, et moi les miennes (Applaudissements sur de très nombreux bancs) ; je continuerai à me battre pour que nos désaccords puissent donner lieu à des débats dans le cadre prévu par la Constitution, afin de les solder et éventuellement trouver des consensus.

Nous ne pouvons nous résoudre à ce que nos désaccords se traduisent en actes de violence, d'intimidation ou de harcèlement contre les élus ; nous ne pouvons nous résoudre collectivement à ce que l'anonymat des réseaux sociaux donne lieu à des campagnes de harcèlement organisé visant à dénoncer des élus prétendument inefficaces, prétendument absents à un moment donné, prétendument en décalage. Je suis inquiète. Aussi, je vous appelle, représentants des institutions, parlementaires, journalistes, citoyens, à un sursaut républicain pour préserver notre démocratie et pour protéger notre liberté d'expression. C'est ni plus ni moins cela qui est en jeu ; il faut sortir de la peur. (Mêmes mouvements.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.

M. Christian Hutin. Nous espérons une réponse à la hauteur !

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la citoyenneté. En ma qualité de ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et au nom du Gouvernement, je ne peux qu'être sensible à votre alerte sur l'augmentation substantielle des actions qui ciblent les élus. Je partagerai avec vous quelques chiffres du ministère de l'intérieur : en 2020, on dénombrait 1 276 actions, soit trois fois plus qu'au cours de l'année 2019 tout entière ; entre 2019 et 2020, les atteintes physiques ont progressé de 23 % ; en 2020, 60 parlementaires et 505 maires ou adjoints ont été victimes de violences physiques et 350 maires ou adjoints ont été outragés. Au cours des onze premiers mois de l'année 2021, les violences contre les élus ont augmenté de 47 % et les outrages de 30 % ; ce sont donc 162 parlementaires et 605 maires ou adjoints qui ont été victimes d'atteintes volontaires à l'intégrité physique.

Derrière ces chiffres, il y a les réalités que vous avez parfaitement décrites : les élus incarnent et représentent la démocratie. Quand on est attaché à la démocratie, quand on défend la démocratie et la citoyenneté, on défend l'intégrité des élus. Le débat, oui ; la controverse, oui ; la violence et la menace, jamais.

Au-delà des mesures que j'évoquais tout à l'heure, la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique prévoit le renforcement de la protection juridique, la formation renforcée des élus, la contribution des services des forces de l'ordre et l'information des maires par le préfet ou le procureur de la République. Ces dispositions complètent la circulaire du garde des sceaux du 6 novembre 2019 relative au traitement judiciaire des infractions commises à l'encontre des personnes investies d'un mandat électif et au renforcement des échanges d'informations entre les élus locaux et les procureurs de la République, et celle du 7 septembre 2020 relative au traitement judiciaire des infractions commises à l'encontre des personnes investies d'un mandat électif et au renforcement du suivi judiciaire des affaires pénales les concernant, qui prévoit une réponse pénale ferme et rapide et un suivi judiciaire renforcé.

Madame la députée, pour répondre à votre interpellation sur la question des réseaux sociaux, ce matin, nous étions plusieurs membres du Gouvernement présents à l'Élysée auprès du Président de la République pour recevoir les conclusions de la commission Bronner. Le rôle des réseaux sociaux est fondamental ; l'État finance les services de PHAROS mais les réseaux sociaux doivent être beaucoup plus rapides et beaucoup plus fermes en la matière.

M. Christian Hutin. En effet !

Données clés

Auteur : Mme Lamia El Aaraje

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Élus

Ministère interrogé : Citoyenneté

Ministère répondant : Citoyenneté

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 janvier 2022

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