Question au Gouvernement n° 4734 :
Conditions de travail dans les EHPAD

15e Législature

Question de : Mme Caroline Fiat
Meurthe-et-Moselle (6e circonscription) - La France insoumise

Question posée en séance, et publiée le 26 janvier 2022


CONDITIONS DE TRAVAIL DANS LES EHPAD

M. le président. La parole est à Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Une enquête du journaliste Victor Castanet révèle que, dans un EHPAD Orpea, on peut tout de même payer 7 000 euros par mois pour mourir d’une escarre non soignée en seulement deux mois et demi. Voici un extrait du témoignage de Saïda, auxiliaire de vie : « Nous étions rationnés : c 'était trois couches par jour maximum. Et pas une de plus. Peu importe que le résident soit malade, qu'il ait une gastro ou qu'il y ait une épidémie. » Les soignants en EHPAD subissent plus d’accidents du travail que dans les travailleurs du bâtiment et sont victimes de troubles musculo-squelettiques et de burn-out en masse. Mais rien n’aura suffi à faire réagir le Gouvernement, ni les mobilisations historiques du personnel des EHPAD dès 2018 ni les témoignages de lanceurs d’alerte comme l’aide-soignante Hella Kherief : « Nos résidents sont rationnés en nourriture, maltraités, se laissent mourir. » C’était l’objet de ma première interpellation, au nom de mon groupe La France insoumise, le 19 juillet 2017 à cette tribune ! Mais là encore, rien n’aura suffi pour vous faire réagir, ni le rapport d'information sur les EHPAD de mars 2018 que j'ai coécrit avec Monique Iborra, ni le reportage d’Envoyé spécial la même année qui mettait en lumière le licenciement des lanceurs d’alerte témoignant des mauvais traitements infligés aux résidents.

Le business des EHPAD, l’or gris, a le vent en poupe ! Les chiffres de l’INSEE en attestent : les établissements publics disparaissent au profit du privé car, avec un prix médian de 2 460 euros par mois, une maison de retraite est plus rentable qu’un centre commercial ! « Il faut que ça crache », dit-on à Orpéa en parlant des résidents et de leurs familles pour accumuler les dividendes. Là encore, le Gouvernement n'a rien fait, sinon nous rire au nez lorsque nous proposions de mettre fin à ce vol organisé ! Vivement que nous puissions, à notre tour, faire cracher ces grands groupes ! En laissant faire en toute conscience, pire, en laissant dépérir le secteur public, avez-vous conscience d’être complice de cette escroquerie épouvantable ? Avez-vous conscience d’être complice de cette maltraitance envers nos aînés ? (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR. – Mme Christine Pires Beaune applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. J'ai répondu tout à l'heure à l'interpellation sur le sujet particulier évoqué dans ce livre en disant que je ferai preuve – nous y veillerons, croyez-moi, Brigitte Bourguignon et moi-même – de la plus grande sévérité si même une petite partie des faits allégués étaient avérés. Nous utiliserons tous les moyens à notre disposition pour en vérifier leur véracité.

Mme Caroline Fiat. Vous avez eu cinq ans !

M. Olivier Véran, ministre. Pardonnez-moi, mais vous tombez dans la facilité lorsque vous imputez au Gouvernement des faits reprochés à un établissement privé pour personnes âgées. Mais nous y sommes habitués. On aurait presque envie de saluer l'empressement dont vous faites preuve en la matière. Mais je crois que les Français ne sont pas dupes.

En revanche, madame la députée, je peux vous apporter plusieurs éléments constitutifs d'un bilan parce qu'il est important de faire le point. Depuis 2017, date de votre intervention initiale, nous avons alloué 2,1 milliards supplémentaires, jusqu'en 2024, à tous les EHPAD jugés prioritaires pour les moderniser dans le cadre du fameux Ségur de l'investissement… que vous n'avez pas voté. Nous avons renforcé la présence des médecins coordonnateurs, pour qu'ils restent au moins deux jours par semaine dans tous les EHPAD. Avez-vous voté cette disposition ? Je ne crois pas.

Mme Caroline Fiat. Vous ne le savez pas !

M. Olivier Véran, ministre. Il y a désormais une permanence d'infirmiers d'astreinte dans les EHPAD. J'ai travaillé comme vous comme aide-soignant dans un de ces établissements…

Mme Caroline Fiat et M. Éric Coquerel . Ah !

M. Olivier Véran, ministre. …et je sais ce qu'est la dureté de cet exercice. Je suis donc bien placé pour saluer l'engagement professionnel de ces aides-soignants et pour reconnaître leur isolement quand il n'y a même pas un infirmier joignable en cas de problème de santé. Mais tout cela est désormais derrière nous puisque des infirmiers de référence interviennent la nuit, et cela compte. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Je sais que cela vous embête quand on apporte des solutions, vous ne voulez pas les voir et préférez dire que tout va mal ! Je vous rappelle les chiffres, même si cela vous gêne : 10 000 soignants supplémentaires seront embauchés d'ici cinq ans en plus des 10 000 recrutés depuis 2017, soit 20 000 soignants en plus dans les EHPAD. C'était une des préconisations de votre rapport : saluez le fait que nous l'ayons suivie. Un dernier chiffre : 40 000 recrutements supplémentaires ont eu lieu à la demande du Premier ministre pendant la crise sanitaire, ce qui représente tout de même 10 % de personnels de plus, en un an, dans les EHPAD de notre pays. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

Données clés

Auteur : Mme Caroline Fiat

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Professions et activités sociales

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 janvier 2022

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