Question au Gouvernement n° 4762 :
Situation au Mali

15e Législature

Question de : M. Jean-Christophe Lagarde
Seine-Saint-Denis (5e circonscription) - UDI et Indépendants

Question posée en séance, et publiée le 2 février 2022


SITUATION AU MALI

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le Premier ministre, la situation au Mali nous inquiète chaque jour un peu plus. Je veux commencer par témoigner du soutien et de l'admiration du groupe UDI et indépendants pour nos militaires qui se battent là-bas depuis tant d'années, et par avoir une pensée pour ceux qui ont été blessés ou sont décédés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I et sur plusieurs bancs du groupe LR.)

Je veux dire aussi notre soutien à notre ambassadeur, qui relaie la parole du Gouvernement et de l'État et qui est aujourd'hui expulsé par ceux qui usurpent le pouvoir après deux coups d'État.

C'est sur le jeu trouble de la junte que je veux vous interroger. Votre ministre des affaires étrangères l'a dit, la situation au Mali n'est plus tenable : notre ambassadeur en est chassé ; le pouvoir ne souhaite plus coopérer avec l'armée française, ne souhaite plus sa présence ; la population est montée, par une propagande indigne, contre la France et contre l'armée française, décrite comme une armée d'occupation alors qu'elle a empêché l'occupation du Mali, il y a de cela quelques années déjà.

Monsieur le Premier ministre, ces constats doivent nous conduire à tirer des leçons. Si nous ne pouvons plus opérer au Mali dans quelques semaines, comme la ministre danoise l'a dit, des décisions devront être prises dans les quinze jours. Il faut nous réorganiser : nous sommes aujourd'hui au Mali face à un échec stratégique, mais c'est dans tout le Sahel que nous devons combattre le djihadisme.

Notre groupe voudrait savoir quelles sont les perspectives stratégiques de redéploiement de la présence française au Sahel. Par ailleurs, les travaux de l'Assemblée nationale seront suspendus dans trois semaines : en cas de réorganisation de la présence française au Mali, vous engagez-vous, monsieur le Premier ministre, à convoquer le Parlement pour débattre de la situation et en tirer les conséquences ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. La situation au Mali est en effet extrêmement préoccupante – M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères s'est déjà exprimé à plusieurs reprises dans cet hémicycle sur ce sujet.

Vous l'avez dit, monsieur le président Lagarde : si nous sommes au Mali et dans la région subsahélienne depuis plusieurs années, c'est pour combattre le terrorisme. Le Mali n'est pas seul concerné ; n'oublions ni le Burkina, ni le Niger, où des combats importants ont eu lieu.

En ma qualité de chef du Gouvernement, je m'associe évidemment à l'hommage que vous avez, les uns et les autres, rendu à nos troupes et aux soldats que nous avons perdus au cours de ces opérations indispensables pour défendre notre démocratie.

C'est, depuis le départ, en accord avec les autorités du Mali que nous sommes présents. Un coup d'État a porté au pouvoir une junte qui n'a depuis cessé de multiplier les provocations, isolant son pays. Dois-je rappeler à la représentation nationale que le pouvoir issu de ce coup d'État avait promis de s'engager dans un processus électoral, et qu'il a lui-même annoncé qu'il ne tiendrait pas cette promesse ? Dois-je rappeler ici que ce régime a fait appel, dans des conditions que plusieurs d'entre vous ont rappelées, à un groupe de mercenaires bien connus – ou plutôt mal connus –, action qui porte en germe une perte de souveraineté du Mali ?

Plus récemment, la junte a fait part de sa volonté de mettre fin à la mission de notre ambassadeur. Mais, M. le ministre des affaires étrangères l'a rappelé, ce n'est pas là un problème franco-malien : la junte s'est enfermée dans sa logique d'isolement et de confrontation en agissant de la même manière vis-à-vis de la CEDEAO, la communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, dont elle a également expulsé le représentant à Bamako, et de ses autres partenaires internationaux, dont ceux de l'Union européenne – je pense en particulier à la demande de retrait du contingent danois de la force Takuba, justifiée par des motifs particulièrement infondés.

Que faire face à cette situation, me demandez-vous ? Eh bien, nous agissons en partenariat avec nos alliés africains comme européens.

Voilà quelle est la position de la France : elle a été rappelée à de multiples reprises.

M. Hervé Berville. Eh oui !

M. Jean Castex, Premier ministre . Lors du sommet extraordinaire du 9 janvier dernier, la CEDEAO a – comme nous – clairement fait savoir que ce qui se passait au Mali était inacceptable. Comme vous le savez, elle a pris des mesures fortes et exceptionnelles. (M. Aurélien Pradié s'exclame.) Avec nos partenaires européens, nous avons exprimé notre solidarité. Un accord politique est intervenu le 24 janvier dernier lors du Conseil affaires étrangères de l'Union européenne, avec l'élaboration d'une première série de sanctions qui seront prises à l'encontre du Mali.

C'est donc dans ce cadre multilatéral, africain et européen, que nous répondons à la situation au Mali, mais aussi à ce qui se produit actuellement dans toute la région. Nous nous réorganisons de façon à conserver l'objectif et la finalité de notre présence dans cette partie de l'Afrique, à savoir la lutte contre le terrorisme. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.)

M. Meyer Habib. Contre l'islamisme !

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le Premier ministre, si la stratégie française au Mali change dans les semaines qui viennent, nous vous demandons de convoquer le Parlement pour en débattre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I, ainsi que sur quelques bancs des groupes LR et Dem.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Christophe Lagarde

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 février 2022

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