lutte contre la fraude fiscale
Question de :
M. Romain Grau
Pyrénées-Orientales (1re circonscription) - La République en Marche
Question posée en séance, et publiée le 1er février 2018
LUTTE CONTRE LA FRAUDE FISCALE
M. le président. La parole est à M. Romain Grau, pour le groupe La République en marche.
M. Romain Grau. Monsieur le Premier ministre, la fraude fiscale est devenue proprement insupportable aux yeux de nos concitoyens. Elle constitue à la fois un manque à gagner pour l'État et une atteinte au pacte républicain. Chaque année, les contribuables sérieux sont contraints de payer des impôts pour financer les pertes de recettes fiscales consécutives à la fraude. Dans ce contexte, l'efficacité économique, tout comme la morale républicaine, commandent, exhortent d'adapter l'arsenal dont dispose l'État, afin de faire respecter le civisme fiscal.
Le 12 décembre dernier, lors de la séance de questions au Gouvernement, vous aviez indiqué à la représentation nationale que le Gouvernement travaillait à un plan de lutte contre la fraude, notamment fiscale, qui devait être présenté au début de cette année.
Dans le contexte des révélations des Paradise papers, qui ont confirmé l'ampleur de la fraude fiscale et le rôle trouble de certains acteurs, alors que le Gouvernement est engagé dans un effort considérable de redressement des finances publiques, et que nous avons adopté l'an passé 11 milliards d'euros de baisses d'impôts, il est nécessaire et légitime que nous nous montrions intraitables en matière de civisme fiscal.
L'Assemblée nationale avait fait un premier pas en proposant, à l'initiative du groupe La République en marche, dans la loi de finances pour 2018, la déchéance des droits civiques pour les fraudeurs les plus graves.
Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous indiquer les conclusions de la réunion interministérielle qui s'est tenue hier à Matignon, sous votre présidence ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le député, à la question près, je crois pouvoir reprendre l'intégralité des propos que vous avez tenus à l'instant,…
M. Fabien Di Filippo. C'était la fiche de la réponse !
M. Edouard Philippe, Premier ministre . …aussi bien dans la caractérisation de ce problème insupportable que représente la fraude fiscale, que dans la nécessité que nous avons, dans une période bien particulière, au moment où nous avons fait certains choix, de renforcer la lutte contre la fraude fiscale. Car, monsieur le député, il faut agir en cohérence, et c'est bien le sens de l'action de cette majorité et du Gouvernement.
Oui, au cours du quinquennat, nous allons baisser les impôts, ceux des particuliers comme ceux des entreprises. Hier, à une immense majorité, l'Assemblée nationale a voté un texte qui permet justement à l'administration, notamment fiscale, de traiter de façon probablement plus bienveillante encore avec le contribuable de bonne foi.
M. Mustapha Laabid. Exactement !
Mme Danièle Obono. C'est une blague ?
M. Edouard Philippe, Premier ministre. C'est justement parce que vous avez décidé tout cela, monsieur le député, que nous devons lutter plus efficacement contre la fraude fiscale, qui, si elle a toujours été insupportable, le devient encore plus. C'est la raison pour laquelle nous avons travaillé, comme je m'y étais engagé en décembre, et que nous avons tenu hier une réunion avec les ministres concernés, qui donnera lieu à des annonces, le moment venu, s'agissant de la lutte contre la fraude fiscale.
En la matière, il faut être certain que les mesures que nous vous proposerons passeront les filtres constitutionnels : elles seront donc pesées au trébuchet. Je veux dire qu'en sus de l'initiative prise par les députés pour aggraver les sanctions à l'égard des coupables de fraudes, dans le cadre de la loi de finances pour 2018, nous souhaitons que dans le cas des fraudes les plus graves, les peines et les sanctions prononcées soient publiées. Il faut, dans le cas d'un fraudeur ayant commis des infractions graves – il y aura une discussion parlementaire pour en fixer les seuils –, que le peuple français sache qui cherche à s'exonérer des obligations fiscales légitimes, qui incombent à chacun.
M. Éric Coquerel. Faites sauter le verrou de Bercy !
M. Edouard Philippe, Premier ministre. Au-delà, il faut que nous sanctionnions, notamment sur le plan pénal, celles des officines qui font profession de contourner la loi. Là encore, nous savons, par le biais d'un certain nombre de scandales que vous avez cités, monsieur le député, que nous pouvons faire mieux. Nous pouvons frapper plus fort, nous pouvons dissuader ceux qui veulent s'engager dans ce chemin.
M. Fabien Di Filippo. Quelle autorité !
M. Edouard Philippe, Premier ministre . Nous savons aussi, monsieur le député, que l'administration doit pouvoir travailler dans des conditions d'efficacité plus grande, et utiliser les données et les instruments les plus performants d'exploitation des données. Il y aurait quelque chose de curieux, alors que nous sommes dans l'ère du data mining, comme l'on dit en mauvais français, que l'administration fiscale ne soit pas capable d'utiliser ces gigantesques données pour rechercher puis poursuivre ceux qui fraudent. Nous organiserons donc l'équipement, à la fois matériel, technique et juridique, de l'administration fiscale, qui lui permettra d'identifier et de rechercher la responsabilité de ceux qui fraudent.
M. Éric Coquerel. Il faut embaucher !
Mme Danièle Obono. Ce que vous ne faites pas !
M. Edouard Philippe, Premier ministre . Enfin, face à une fraude internationale de plus en plus sophistiquée, il faut renforcer les moyens de la police judiciaire, au niveau central comme au niveau décentralisé, j'insiste sur ce point. Il faut bien sûr aussi que des initiatives internationales soient prises. Elles le seront, mais permettez au Premier ministre que je suis de laisser ces annonces à celui qui devra les faire. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
Auteur : M. Romain Grau
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er février 2018