réforme de l'enseignement professionnel
Question de :
Mme Michèle Victory
Ardèche (2e circonscription) - Nouvelle Gauche
Question posée en séance, et publiée le 13 juin 2018
RÉFORME DE L'ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL
M. le président. La parole est à Mme Michèle Victory, pour le groupe Nouvelle Gauche.
Mme Michèle Victory. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, c'est une vérité qui nous dérange : nos élèves de lycées professionnels n'ont souvent pas vraiment choisi leur formation. Ils ont eu un parcours accidenté et ont du mal à se projeter dans l'avenir. Ils ne croient plus dans leur capacité à réussir.
C'est pour cela que nous leur devons encore plus d'attention. Ils sont presque 700 000 en France. Et, à la différence de l'Allemagne, que l'on cite en exemple si souvent, nous avons la chance de pouvoir compter sur un système original, qui mixe l'enseignement initial scolaire et celui de l'apprentissage.
Si vous avez présenté votre projet de réforme des baccalauréats généraux et technologiques en début d'année, monsieur le ministre, ce n'est que la semaine dernière que vous avez présenté vos propositions pour réformer le lycée professionnel. Ce choix de séparer les réformes des différents bacs a très rapidement suscité des craintes, encore renforcées par la réforme de l'apprentissage, dans laquelle vous confiez la gestion des centres de formation d'apprentis aux branches professionnelles. C'est une concurrence entre lycées professionnels et CFA que vous organisez à terme.
La principale proposition de votre réforme est de mettre en place une spécialisation progressive en baccalauréat professionnel. Sous prétexte d'une carte de formations jugée trop importante, avec plus de 80 spécialités actuellement, vous créez des secondes professionnelles réorganisées autour de cinq à quinze familles de métiers.
Mme Valérie Rabault. C'est vrai !
Mme Michèle Victory. Cela réduit donc de trois à deux ans un bac pro déjà amputé par le passé d'une année. Ces élèves ont pourtant besoin de temps pour se qualifier, retrouver l'estime de soi et la confiance sans laquelle il ne peut y avoir de motivation et d'ambition.
C'est notamment grâce à un recrutement plus sélectif que les CFA peuvent afficher des taux d'insertion supérieurs à ceux des lycées professionnels. La voie scolaire, pour sa part, accueille tous les jeunes, principalement issus des milieux populaires, et les conduit dans leur immense majorité à un diplôme.
Nous pensons que vous fragilisez une architecture bien adaptée à la diversité de nos jeunes et que vous risquez de créer un contexte défavorable aux lycées professionnels. (Applaudissements sur les bancs des groupes NG, GDR et FI.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale. Madame la députée, je vous remercie pour votre question, sur un sujet extrêmement important. Je sais votre attachement à la problématique des lycées professionnels. Ne doutez pas un instant du mien : le fait d'avoir détaché la réforme de l'enseignement professionnel de celle de l'enseignement général et technologique est au contraire une marque d'attention très particulière.
J'ai d'ailleurs dit à de nombreuses reprises que la réforme de l'enseignement professionnel était ma deuxième priorité, après la réforme de l'enseignement primaire. Je porte donc une attention très forte à l'enseignement professionnel.
La réforme consiste en plusieurs éléments. Le premier d'entre eux, c'est de créer l'attractivité de l'enseignement professionnel, d'où la logique de campus et de réseaux qui a été affichée. Ainsi, nous ne dirons pas, comme vous l'avez fait, que ce sont les élèves en difficulté qui rejoignent l'enseignement professionnel, mais des élèves qui ont eu envie d'y aller.
Ce point est majeur. Aujourd'hui, il y a 700 000 élèves dans l'enseignement professionnel, et environ 300 000 apprentis. Nous voulons le bien et des uns et des autres. Nous n'allons pas mettre en concurrence l'enseignement professionnel et l'apprentissage.
La concurrence dont vous parlez, c'est la situation de laquelle nous arrivons. Ce que nous voulons maintenant c'est montrer la totale compatibilité des deux, donc arriver à ce que, de façon pragmatique, nous obtenions des élèves formés pour les métiers qui conviennent.
Vous avez fait référence à un des aspects de la réforme, la seconde professionnelle réorganisée par famille de métiers. Je me suis rendu hier, en Haute-Savoie, dans un lycée qui expérimente le dispositif et s'en trouve très heureux. J'ai rencontré des élèves de seconde, épanouis, parce qu'ils savent déjà qu'ils auront un métier et qu'ils iront en stage en entreprise.
Autrement dit, la réforme qui est faite, comme les autres, est une réforme pragmatique, qui tient compte des meilleures pratiques actuelles des lycées professionnels, au bénéfice des 700 000 élèves concernés. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM – M. Claude Goasguen applaudit également.)
Auteur : Mme Michèle Victory
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Formation professionnelle et apprentissage
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère répondant : Éducation nationale
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 juin 2018