Question orale n° 1082 :
Mesures pour les services pénitentiaires d'insertion et de probation

15e Législature

Question de : Mme Sophie Auconie
Indre-et-Loire (3e circonscription) - UDI et Indépendants

Mme Sophie Auconie attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP). Ces services jouent un rôle essentiel dans l'accompagnement des détenus dans leurs peines en milieu ouvert ou fermé. Afin de faire face aux risques de propagation de la covid-19 au sein des prisons, le Gouvernement a pris des décisions fortes afin de réduire la population carcérale, qui a atteint un taux de 97 %. De plus, la réforme de la justice entrée en vigueur le 24 mars 2020 comporte de nombreux aspects sur la réduction des courtes peines et l'aménagement d'alternatives à l'emprisonnement. Ces mesures intéressantes nécessiteront un accompagnement et un encadrement d'agents spécialisés en conséquence. Pourtant les agents des SPIP témoignent d'un sentiment d'abandon face à des contraintes très fortes. L'augmentation des personnes condamnées et la surpopulation carcérale pose des problèmes majeurs d'encadrement. À titre d'exemple, la maison d'arrêt de Tours avait un taux d'occupation de 200 % avant la crise sanitaire. Avec un service composé de 19,4 équivalents temps pleins chargés du suivi 1743 personnes, cela fait un agent pour 90 usagers. Par ailleurs, le SPIP d'Indre-et-Loire a été désigné pilote dans le cadre de la loi de programmation justice. D'autre part, la proposition de loi adoptée d'Aurélien Pradié sur les violences au sein de la famille vise entre autre à mettre en place des mesures d'éloignement par l'utilisation des bracelets électroniques. Cette mesure indispensable pour lutter contre les violences faites aux femmes, aura pour conséquence d'augmenter le nombre de personnes suivies par les SPIP. De plus, les agents des SPIP sont particulièrement inquiets de la mise en œuvre de la loi de transformation de la fonction publique, qui pèse sur leurs mutations et leurs carrières. Les missions des SPIP sont essentielles pour une meilleure orientation des parcours de peine des condamnés. Cet accompagnement du quotidien est un rouage majeur pour la protection des victimes. Mais il est également central pour garantir les meilleures conditions de réinsertion, permettant de lutter contre la surpopulation carcérale. Cet engagement mérite des moyens à la hauteur des ambitions affichées par le Gouvernement pour accompagner ces agents dans leurs actions. Elle souhaite connaître les engagements concrets qui seront pris pour accompagner les SPIP dans la conduite de leurs actions.

Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2020

SERVICES PÉNITENTIAIRES D'INSERTION ET DE PROBATION
M. le président. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour exposer sa question, n°  1082, relative aux services pénitentiaires d'insertion et de probation.

Mme Sophie Auconie. Madame la garde des sceaux, les services pénitentiaires d'insertion et de probation, les SPIP, jouent un rôle essentiel dans l'accompagnement des détenus accomplissant leur peine, en milieu ouvert comme en milieu fermé. Afin de faire face au risque de propagation du covid-19 au sein des prisons, vous avez pris des décisions significatives pour réduire la population carcérale, ramenant à 97 % le taux d’occupation des établissements pénitentiaires. De plus, la réforme de la justice entrée en vigueur le 24 mars 2020 comporte de nombreuses mesures tendant à réduire les courtes peines et à favoriser l'aménagement d'alternatives à l'emprisonnement. Ces mesures intéressantes nécessiteront un accompagnement et un encadrement par des agents spécialisés.

Pourtant, les agents des SPIP témoignent de leur sentiment d'abandon face aux très fortes contraintes qui leur sont imposées. L'augmentation du nombre de personnes condamnées et la surpopulation carcérale posent des problèmes majeurs d'encadrement. Vous le savez pour être venue visiter en Indre-et-Loire la maison d'arrêt de Tours, dont le taux d'occupation atteignait 200 % avant la crise sanitaire. Le service dispose de 19,4 équivalents temps plein chargés du suivi de 1 743 personnes, soit un agent pour 90 usagers. Je vous remercie d’avoir fait du SPIP d'Indre-et-Loire un service pilote dans le cadre de la loi de programmation et de réforme pour la justice.

La loi dite Pradié visant à agir contre les violences au sein de la famille a notamment pour objet d’instaurer des mesures d'éloignement grâce à l'utilisation des bracelets électroniques.

Cette mesure, indispensable pour lutter contre les violences faites aux femmes aura pour conséquence d'augmenter, elle aussi, le nombre de personnes suivies par les SPIP.

En outre, les agents des SPIP sont particulièrement inquiets des conditions de la mise en œuvre de la loi de transformation de la fonction publique car celle-ci va peser sur leurs mutations, sur leur formation et sur leur carrière.

Les missions des SPIP sont essentielles pour une meilleure orientation des parcours de peine des condamnés, accompagnement quotidien qui est aussi un rouage majeur pour la protection des victimes ; elles sont également centrales pour garantir les meilleures conditions de réinsertion et, ce faisant, pour lutter contre la surpopulation carcérale. Leur engagement mérite des moyens à la hauteur des ambitions affichées par le Gouvernement pour accompagner ces agents dans leurs actions.

Je souhaite donc connaître, madame la ministre, les engagements concrets qui seront pris, à la suite de cette crise qui a changé les paramètres, pour accompagner les SPIP.

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la députée, je suis en plein accord avec vous sur le fait que les services pénitentiaires d'insertion et de probation sont l'un des maillons essentiels à la fois de la réussite de la loi de réforme de la justice, mais aussi, plus fondamentalement, des politiques de prévention de la récidive et de régulation carcérale.

Sur la période 2018-2020, et dans le cadre de la loi de réforme de la justice, le Gouvernement a pris l'engagement de créer 1 500 emplois supplémentaires dans les services pénitentiaires d'insertion et de probation, dont 870 conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation – CPIP. Ces personnels seront répartis en fonction notamment des personnes sous main de justice suivies localement, mais aussi des enjeux de politique pénale et pénitentiaire. Ainsi, 259 conseillers ont déjà été recrutés et entreront en fonction en septembre 2020 pour certains d'entre eux et en septembre 2021 pour d'autres – puisqu'il y a deux ans de formation. Dans le SPIP d'Indre-et-Loire, un poste supplémentaire sera créé dès le mois de septembre 2020, s'ajoutant aux vingt-trois déjà existants.

En outre, sur le plan national, parmi les 1 500 emplois que je viens d'évoquer, 144 agents administratifs, 135 assistants de service social et 106 surveillants en charge de la surveillance électronique ainsi que des coordonnateurs culturels et des psychologues viendront étoffer les équipes pluridisciplinaires des SPIP. En conséquence, les moyens de fonctionnement dont sont dotés les SPIP devraient passer à 42,6 millions d'euros en 2022, soit une hausse prévisionnelle de 17 %.

Dans le cadre de la lutte contre les violences conjugales, la loi du 28 décembre 2019 que vous avez évoquée a en effet créé le bracelet anti-rapprochement, mais ce dispositif n'a pas vocation à générer une charge de travail supplémentaire pour les SPIP puisqu'il y aura des pôles de télésurveillance et de téléassistance spécifiquement en charge du suivi électronique du dispositif.

Enfin, la réorganisation des services centraux de la direction de l'administration pénitentiaire a permis de créer récemment une sous-direction de l'insertion et de la probation, chargée de soutenir et d'accompagner les SPIP.

C'est donc une politique globale qui est mise en œuvre et dans laquelle les CPIP et l'ensemble des SPIP, loin d'être abandonnés, constituent un rouage essentiel.

Mme Sophie Auconie. Monsieur le président !

M. le président. Le temps de parole est épuisé, madame Auconie.

Données clés

Auteur : Mme Sophie Auconie

Type de question : Question orale

Rubrique : Lieux de privation de liberté

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 juin 2020

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