Question orale n° 1170 :
Quel avenir pour le service universel ?

15e Législature

Question de : Mme Célia de Lavergne
Drôme (3e circonscription) - La République en Marche

Mme Célia de Lavergne alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur le service universel des communications électroniques qui est essentiel, en particulier dans les territoires ruraux. Il permet l'accès à un service de téléphonie fixe de qualité pour les usagers. L'opérateur Orange a été chargé du service universel pour une durée de 3 ans le 27 novembre 2017. À l'approche de la fin de cette convention, une dégradation du service préoccupante est constatée dans certains territoires. Depuis le 27 novembre 2020 et la fin de la convention, que se passe-t-il ? Quelle trajectoire est prévue par le Gouvernement vers le nouveau service universel, et avec quel cahier des charges et quelles exigences ? Avec le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière (DDADUE), des améliorations sont actées : le service universel ne concernera plus seulement l'accès la téléphonie fixe mais également l'accès à l'internet haut débit pour une liste minimale de services (consulter sa messagerie électronique ou la presse en ligne, effectuer une recherche d'emploi, etc.). Néanmoins, on constate que l'absence de cadre suffisamment contraignant pour l'opérateur conventionné génère une dégradation du service inacceptable. Dans les territoires ruraux, notamment dans la Drôme, les parlementaires sont démunis et laissés face à un opérateur qui ne fait plus les investissements nécessaires. Aussi, elle lui demande quels outils de contrôle et de sanction sont prévus pour s'assurer que l'opérateur conventionné remplisse ses obligations.

Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2020

TÉLÉPHONIE EN ZONES RURALES
Mme la présidente. La parole est à Mme Célia de Lavergne, pour exposer sa question, n°  1170, relative à la téléphonie en zones rurales.

Mme Célia de Lavergne. La loi prévoit que l'accès à la téléphonie fixe doit être garanti à chaque citoyen français – voilà pour la théorie. Or dans les campagnes drômoises, la colère gronde ; elle déborde même, car ce droit essentiel reste trop souvent bafoué. Chez les habitants, comme chez les maires qui en sont les porte-parole impuissants, la colère est vive ; elle traduit un sentiment d'abandon et de mépris, un silence – le silence assourdissant d'Orange, opérateur mandaté par l'État pour fournir à chacun le service universel de ligne fixe ; le silence assourdissant d'un opérateur qui ne se donne pas les moyens.

Dans l'arrière-pays drômois, à l'heure de la 5G et de la fibre, des personnes âgées restent plusieurs jours sans ligne fixe – par conséquent, sans télé-assistance – seules, chez elles ; des maires attendent trois mois le transfert de la ligne, quand des particuliers attendent huit mois l'ouverture de la leur. Les Drômois de l'arrière-pays se sentent des citoyens de seconde zone. Cette colère, c'est celle de la ruralité, des quelque 3 000 élus de ma circonscription qui luttent des heures entières avec les équipes d'Orange pour obtenir un semblant de réponse, parfois une intervention. Orange a été mis en demeure à plusieurs reprises en 2018 pour non-respect de ses obligations et encourt une amende pouvant dépasser 1 milliard d'euros. Après un bref et léger sursaut, rien n'a changé.

La situation doit changer : vous avez le pouvoir de le faire. La convention de service universel signée entre l'État et Orange s'est achevée le 3 décembre ; depuis, c'est le vide juridique. En novembre, l'Assemblée a voté la loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière, dite loi DDADUE ; elle crée un nouveau cadre pour le service universel, en le redéfinissant non seulement comme l'accès à la téléphonie fixe, mais également comme l'accès à l'internet en haut débit pour une liste minimale de services. Cette disposition constituerait une vraie avancée si elle se traduisait concrètement dans tous les territoires. Monsieur le ministre délégué, que comptez-vous faire pour garantir aux territoires ruraux un réel accès au service universel ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.

M. Alain Griset, ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises. Le Gouvernement est très attaché à ce que tous nos concitoyens bénéficient d'un service téléphonique de qualité. Je prends bonne note de la situation que vous relatez dans votre département, et qui est naturellement regrettable – je me mets à la place des habitants qui la subissent. Comme vous l'avez souligné, la désignation d'Orange en tant qu'opérateur chargé du service universel de téléphonie fixe s'est achevée le 3 décembre. Un service universel incluant l'accès au haut débit sera instauré dans les prochains mois, dans le cadre de la transposition du code des communications électroniques européen – il s'agit d'un apport important de la loi DDADUE récemment promulguée.

La période actuelle de transition ne doit pas s'accompagner d'un relâchement des efforts ; il faut maintenir, et, surtout, instaurer un niveau de service de qualité, en particulier pour le réseau de cuivre dont dépendent nos concitoyens qui ne bénéficient pas encore d'un accès à la fibre optique. En ce sens, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse – ARCEP – fixera prochainement des obligations de qualité de service, dans une décision dite d'analyse de marché qui est sur le point d'être adoptée. Orange devra respecter des niveaux de qualité de service vis-à-vis des opérateurs clients pour la construction de nouvelles lignes et la réparation des pannes, et devra naturellement être au niveau attendu par les usagers et les élus locaux. L'autorité régulatrice imposera également à Orange de publier des indicateurs de qualité de service, concernant notamment les délais et les taux de conformité des prestations, ou encore le taux d'incidents mensuels apporté au parc de liaisons. Cette exigence de qualité sur le marché de gros, entre opérateurs, aura des conséquences – positives, je l'espère – sur le marché de détail.

Au-delà de la surveillance du réseau que continuera d'exercer l'ARCEP, je souhaite qu'Orange prenne rapidement des engagements complémentaires devant le Gouvernement, les habitants et les élus, par exemple en utilisant les dispositions de l'article L33-13-1 du code des postes et des communications électroniques – créé par la loi DDADUE – afin de garantir que les clients des offres actuelles de service universel ne voient pas leur situation se détériorer, et même de tout faire – j'insiste – pour qu'elle s'améliore.

Pour l'avenir, le code des communications électroniques européen prévoit d'élargir le champ du service universel à l'internet en haut débit ; l'ARCEP rendra prochainement un avis au Gouvernement à ce sujet. La fourniture de ce service en haut débit ne reposera pas uniquement sur Orange, mais mobilisera tous les opérateurs qui contribuent au plan France très haut débit – plan pour lequel le Gouvernement mobilise une enveloppe de 550 millions d'euros, devant permettre d'accompagner l'ensemble des territoires vers une généralisation de la couverture en fibre optique.

Mme la présidente. La parole est à Mme Célia de Lavergne.

Mme Célia de Lavergne. Ce n'est pas tant que nous soyons attachés à la ligne fixe ; nous sommes surtout condamnés à utiliser les lignes de cuivre pendant encore quelques années. Nous aimerions donc que toute l'attention nécessaire leur soit consacrée. Par ailleurs, il est indispensable que les indicateurs fournis par les opérateurs soient établis à l'échelle départementale, et qu'ils différencient les territoires ruraux et urbains : ce sera la clé d'un meilleur pilotage du service au niveau local.

Données clés

Auteur : Mme Célia de Lavergne

Type de question : Question orale

Rubrique : Internet

Ministère interrogé : Économie, finances et relance

Ministère répondant : Économie, finances et relance

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er décembre 2020

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