Avenir de la filière lin dans les Hauts-de-France et plan de relance
Question de :
Mme Jennifer De Temmerman
Nord (15e circonscription) - Libertés et Territoires
Mme Jennifer De Temmerman appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur l'avenir de la filière lin dans les Hauts-de-France et son intégration spécifique dans le plan de relance. La France est le premier producteur mondial de lin textile et plus d'un tiers de la production nationale provient des Hauts-de-France. Historiquement, la région était une terre d'usines textiles et de filature du lin. Aujourd'hui, 80 % du lin récolté est exporté pour filature à l'étranger (Inde, Chine, Pologne) avant de revenir pour être tissé en France. Ces délocalisations ont provoqué une véritable perte des savoir-faire. La conséquence économique négative est indiscutable surtout en ce temps de crise sanitaire. Au-delà de l'empreinte écologique que génèrent ces trajets, la délocalisation de cette étape-clé de transformation a entraîné des pertes d'emploi et une dépendance vis-à-vis de pays qui ont des coûts de main d'œuvre largement inférieurs et incompatibles avec le modèle de protection sociale francais. La filière du lin est pourtant une opportunité de croissance responsable et durable pour le secteur du textile en France car elle contribue à la transition écologique avec une production recyclable qui nécessite peu d'intrants. Dans la région, les acteurs économiques qui ont une parfaite connaissance de la filière se prononcent en faveur d'une relocalisation des filatures du lin, afin de maîtriser toute la chaîne de production, réduire la dépendance de la France vis-à-vis de l'étranger, retrouver un savoir-faire qui a longtemps contribué au rayonnement du pays et créer de l'emploi durable. Pour encourager cette volonté des acteurs, elle lui demande si un soutien à la relocalisation des filatures du lin en France pourrait être pris en compte dans le plan de relance.
Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2020
RELOCALISATION DES FILATURES DE LIN
Mme la présidente. La parole est à Mme Jennifer De Temmerman, pour exposer sa question, n° 1182, relative à la relocalisation des filatures de lin.
Mme Jennifer De Temmerman. Ma question porte en effet sur l'avenir de la filière de lin en France.
Notre pays est le premier producteur mondial de lin textile et plus d'un tiers de la production nationale provient des Hauts-de-France. Historiquement, notre région était d'ailleurs une terre d'usines textiles et de filatures, en particulier de lin. Aujourd'hui plus de 80 % du lin récolté est exporté pour être filé en Inde, en Chine ou encore en Pologne. Les dommages économiques sont indéniables, la délocalisation de cette étape-clé de la transformation ayant entraîné des destructions d'emplois et une dépendance vis-à-vis de pays dont les standards sociaux sont incompatibles avec notre modèle ; ces délocalisations ont également provoqué une certaine perte de savoir-faire.
Dans la mesure où l'empreinte écologique de leurs achats préoccupent un nombre croissant de nos concitoyens, la filière du lin offre au secteur du textile français une opportunité de croissance responsable et durable.
J'ai eu l'occasion de rencontrer, dans ma région, des responsables de ce secteur qui m'ont fait part des difficultés qu'ils rencontrent, notamment en matière de formation. Ils se prononcent majoritairement en faveur d'une réimplantation des filatures de lin dans notre pays, avec pour ambition de maîtriser une chaîne de production 100 % française, de promouvoir une filière d'excellence, responsable et écologique, de créer de l'emploi durable et de réduire la dépendance vis-à-vis de l'étranger – une dépendance que la crise sanitaire a révélée et qui concerne de nombreux domaines, comme la fourniture de masques. Heureusement que nos entreprises textiles ont su répondre à l'appel et réorienter massivement leur production afin de fournir ces éléments indispensables au respect des gestes barrières !
Ma question est la suivante : que propose le plan de relance pour nos entreprises textiles et en particulier pour encourager la réimplantation en France des filatures de lin ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.
M. Alain Griset, ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises. L'avenir de la filière revêt une importance certaine puisque la France est, comme vous l'avez souligné, le premier producteur mondial de lin textile. La qualité de notre production est reconnue à travers le monde ; cela qui doit nous inciter à maîtriser d'autres aspects de la chaîne de valeur comme la filature.
L'ambition de la ministre chargée du dossier est très claire : construire une filière complète pour la production de cette fibre naturelle aux propriétés remarquables et nous réapproprier l'intégralité de la chaîne de valeur.
C'est tout le sens du plan France relance qui consacre 35 milliards d'euros à l'industrie. De nombreux dispositifs de soutien à l'investissement et à la modernisation ont ainsi été lancés depuis septembre. Ils rencontrent un très large succès auprès des entreprises industrielles, puisque 6 500 dossiers ont été ouverts sur la plateforme de BPI France ; 520 projets ont déjà été labellisés, et près de 500 millions d'euros d'aides directes vont permettre de réaliser 2,3 milliards d'euros d'investissements industriels. L'intégralité de l'enveloppe de 550 millions d'euros prévue pour 2020 ayant déjà été engagée, le Gouvernement a donc décidé de l'augmenter de 250 millions d'euros.
Quant aux projets des acteurs de la filière du lin, ils sont aujourd'hui soutenus à travers plusieurs dispositifs, notamment ceux du plan France relance. Je pense en particulier à deux appels au projet.
Le premier est l'appel à projets du volet national « soutien à l'investissement, à la modernisation dans les secteurs stratégiques pour l'industrie », qui vise à soutenir des projets d'investissement, de relocalisation ou de renforcement d'unités de production industrielle dans les secteurs stratégiques afin de diminuer le degré de dépendance vis-à-vis de fournisseurs extra-européens. À cet égard, la production française de fibres naturelles telles que le lin est bien identifiée comme secteur-clé.
Le deuxième est l'appel à projets du volet territorial concernant tous les secteurs pilotés par le dispositif « Territoires d'industrie ».
Nous avons déjà validé le financement de deux projets dans la filière et nous poursuivons l'instruction d'autres dossiers. Notre mobilisation pour l'avenir de cette filière française est donc totale, madame la députée.
Mme la présidente. La parole est à Mme Jennifer De Temmerman.
Mme Jennifer De Temmerman. Encore faudrait-il, monsieur le ministre, que la filière survive à la crise. Hier matin, une entreprise de filatures m'a signalé qu'elle ne pourrait pas bénéficier du report de paiement des cotisations URSSAF, par exemple, en raison de son code APE. Elle ne comprenait pas pourquoi les commerces de textile pouvaient en bénéficier et pas elle, alors qu'il n'y a pas de vêtement sans fil. Il faut donc prendre en considération l'intégralité de la chaîne de production. Il faut aussi, au-delà des investissements pour l'avenir, leur permettre de résister aux chocs actuels.
Auteur : Mme Jennifer De Temmerman
Type de question : Question orale
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Économie, finances et relance
Ministère répondant : Économie, finances et relance
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er décembre 2020