Aides à la filière ovine
Question de :
M. Jean-Michel Clément
Vienne (3e circonscription) - Libertés et Territoires
M. Jean-Michel Clément alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la filière ovine, filière fragile qui subit depuis plus de 30 ans une très forte concurrence internationale. Le nombre d'éleveurs ne cesse de diminuer dangereusement depuis les années 1980 et compromet l'avenir de toute une filière. Pourtant, l'élevage ovin est structurant pour les territoires fragiles et est reconnu pour générer des services environnementaux précieux. Il contribue aussi à la préservation de la biodiversité et constitue un outil majeur pour l'entretien des paysages ou la réduction des risques d'avalanche ou d'incendie dans certaines régions. Il faut noter aussi que 85 % du cheptel est situé dans des zones défavorisées et que le pays est déficitaire en viande de boucherie. À travers la prochaine PAC, cette activité d'élevage traditionnel et génératrice d'emplois ne doit pas être abandonnée, mais au contraire doit être soutenue en maintenant une aide couplée. Depuis 10 ans, l'aide ovine mise en place en 2010 avec le double objectif de développer la production et de structurer la filière a permis de ralentir la dégradation de ce secteur d'activité. Le maintien des aides couplées, dans le cadre de la négociation de la future PAC au niveau européen et du plan stratégique national qui sera discuté au niveau français dès le premier semestre de 2021, constituerait un soutien fort à la filière ovine. Une enveloppe pour l'aide ovine forte et sacralisée doit être actée dans le cadre des discussions à venir. Il lui demande donc quelle est la position du Gouvernement pour le maintien d'une filière d'élevage ovin dans le pays et quelle est sa stratégie de négociation.
Réponse en séance, et publiée le 13 janvier 2021
AIDES À LA FILIÈRE OVINE
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour exposer sa question, n° 1217, relative aux aides à la filière ovine.
M. Jean-Michel Clément. J'ai pris bonne note de l'absence du ministre de l'agriculture et de l'alimentation, que j'excuse bien évidemment à mon tour. Je suis sûr que vous relaierez mon interrogation comme il se doit. Ma question concerne la nouvelle politique agricole commune pour la période post-2020, actuellement en cours de négociation au Conseil européen et au Parlement européen.
Afin de la décliner au sein des États membres, les nouveaux règlements prévoient que chaque État établisse un plan stratégique national, qui comporte notamment un diagnostic de la situation, pour évaluer les besoins que la politique agricole commune – PAC – doit satisfaire.
Le plan stratégique national doit répondre à trois objectifs généraux, dont celui de renforcer les actions favorables à l'environnement et le tissu socio-économique des zones rurales. Chaque État doit ensuite établir sa propre stratégie, structurée autour de neuf objectifs spécifiques et d'un objectif transversal.
Notre pays se caractérise par une grande diversité de productions – ce qui en fait la richesse – et doit prendre prioritairement en considération celles qui sont en souffrance, au premier rang desquelles la filière ovine. Cette filière, fragile, subit depuis plus de trente ans une très forte concurrence internationale. La production ovine répond pleinement aux objectifs que je viens de rappeler et est structurante pour les territoires fragiles. Elle est aussi reconnue pour rendre des services environnementaux précieux : elle contribue à la préservation de la biodiversité et constitue un outil majeur pour l'entretien des paysages et la réduction des risques d'avalanche ou d'incendie dans certaines régions.
Il faut également noter que 85 % du cheptel est situé dans des zones défavorisées et que le pays est déficitaire en viande de boucherie, la production ne couvrant que 43 % de la consommation française. Par ailleurs, le nombre d'éleveurs ne cesse de diminuer dangereusement depuis les années 1980 : d'ici dix ans, 50 % des éleveurs devront transmettre leur exploitation ; le non-renouvellement des générations compromet l'avenir de toute une filière.
L'aide ovine mise en place en 2010, dans le double objectif de développer la production et de structurer la filière, a permis de ralentir la dégradation de ce secteur d'activité. Cette activité d'élevage traditionnel, génératrice d'emplois, ne doit pas être abandonnée par la prochaine PAC, mais au contraire soutenue, notamment en maintenant une aide couplée.
Le maintien des aides couplées constituera un soutien décisif à la filière ovine. Une enveloppe importante et sacralisée doit être actée dans le cadre des discussions à venir. Quels engagements le Gouvernement est-il en mesure de prendre pour rassurer les éleveurs ovins ? Pour beaucoup d'entre eux, l'avenir dépend en effet largement de ces aides, dont provient en moyenne 70 % du résultat courant des exploitations.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail.
M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail. Vous interrogez mon collègue Julien Denormandie sur le devenir des aides couplées aux ovins actuellement mises en œuvre en France en application de la PAC. Dans le cadre de la réforme de celle-ci, il est prévu que chaque État membre rédige un plan stratégique national définissant sa stratégie.
En France, les travaux destinés à établir un diagnostic national et à identifier les besoins auxquels les choix nationaux devront répondre ont débuté en 2019. Ils sont réalisés en concertation avec les parties prenantes. Par ailleurs, un débat public visant à recueillir l'avis des citoyens a été lancé en février 2020 ; il s'est achevé en novembre 2020.
Ces premières étapes s'achevant, les travaux ayant pour objet de définir le contenu des mesures – vous les appelez de vos vœux – débutent désormais, en étroite collaboration avec les conseils régionaux, en charge de certaines mesures, notamment du fonds européen agricole pour le développement rural. Ces travaux se poursuivront dans les mois qui viennent, en associant les parties prenantes, en particulier le Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole.
L'objectif est de transmettre une version du plan stratégique national à la Commission européenne à la fin du premier semestre 2021. Dans le cadre de ce diagnostic, les enjeux de la filière ovine et les services environnementaux rendus par l'élevage ont bien été identifiés. Les choix concernant l'aide couplée à destination de cette filière, ainsi que d'autres mesures permettant de répondre aux enjeux évoqués, devront être effectués lors de l'élaboration du plan stratégique national courant 2021. J'ai à cet égard pris note de vos souhaits et de votre contribution.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Clément.
M. Jean-Michel Clément. Ces élevages touchent des territoires fragiles, des zones intermédiaires – qualifiées comme telles – sur lesquelles peu d'autres productions sont actuellement compatibles avec les contraintes de l'agriculture. En revanche, les services environnementaux rendus ont mis du temps à être reconnus comme un apport pour le monde agricole ; ils doivent désormais l'être. Nous ne pouvons pas engager une nouvelle PAC post-2020 sans intégrer ces services collectifs qui profitent à la société toute entière.
Les élevages ovins ont perdu l'indemnité compensatoire de handicap naturel ; il importe qu'ils touchent une contrepartie. Il faut donner un signe fort aux élevages ovins, dont la production est actuellement trop faible par rapport à la demande. Il faut aussi donner un signe fort aux nouvelles générations : ces élevages ayant une faible intensité capitalistique, l'on pourrait ainsi contribuer au renouvellement des générations dans les milieux ruraux fragiles.
Auteur : M. Jean-Michel Clément
Type de question : Question orale
Rubrique : Élevage
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 janvier 2021