Question orale n° 1229 :
Création d'une cellule spéciale pré dépot de bilan covid-19

15e Législature

Question de : Mme Pascale Fontenel-Personne
Sarthe (3e circonscription) - Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés

Mme Pascale Fontenel-Personne appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la potentielle vague de dépôts de bilan massifs en conséquence de la prolongation de la crise sanitaire. Mme la députée tient tout d'abord à souligner l'engagement tenu du Président de la République et du Gouvernement quant au soutien massif de l'économie du pays. Il n'y a, en effet, pas eu d'enregistrement de hausse des dépôts de bilan sur le territoire en 2020. Mme la députée constate toutefois qu'il ne s'agit sans doute là que d'un report d'échéance. L'élastique que l'État tend depuis le début de la crise est sur le point de rompre. L'État a mis en œuvre de nombreux dispositifs pour maintenir en vie économiquement des milliers d'entreprises. Ils ont démontré leur utilité tout au long de la crise, notamment pour les très petites et moyennes entreprises dépendantes de l'économie touristique. Toutefois, à l'aune d'une situation sanitaire toujours plus instable, ces dispositifs ne suffiront malheureusement pas à sauver 100 % des entreprises françaises. Ainsi, elle souhaite, en raison de cette situation exceptionnelle subie par le monde économique et afin d'éviter une hausse drastique des dépôts de bilan, interroger M. le ministre quant à la possibilité de créer un dispositif exceptionnel à mettre en place au sein des banques de France et calqué sur le modèle du surendettement des particuliers. Il pourrait ainsi servir de sas aux entrepreneurs et dé-judiciariserait dans un premier temps la démarche. Pour nombre de professionnels, franchir les portes d'un tribunal de commerce est synonyme de la fin de leur entreprise et facteur d'une détresse morale et psychologique profonde, entraînant des conséquences familiales extrêmes. Elle argue ainsi qu'un dispositif de cellule d'urgence pré-dépôt de bilan covid-19 permettrait de faire évoluer les aides en fonction des situations particulières des professionnels et assurerait ainsi leur pérennité. Il permettrait aussi de trier et critériser les dossiers recevables, entre les dépôts dits d'opportunité et les dépôts contraints par la situation sanitaire. Elle ajoute par ailleurs que l'État est très engagé avec les garanties PGE, et qu'ainsi ce dispositif d'urgence sous forme de sas pré-dépôt de bilan pourrait permettre une expertise personnalisée et protéger l'ensemble des aides mises en œuvre, pour les soutenir sans ruiner toute la politique économique que M. le ministre pilote avec beaucoup d'agilité, de finesse et d'empathie. À ce titre, elle souhaite l'interroger quant au dispositif envisagé, visant à éviter les dépôts de bilan massifs des entreprises qui étaient encore viables avant le confinement, et sur les mesures qui seront prises pour éviter les dépôts de bilan dits d’opportunité.

Réponse en séance, et publiée le 27 janvier 2021

PRÉVENTION DES DÉPÔTS DE BILAN LIÉS AU COVID-19
Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Fontenel-Personne, pour exposer sa question, n°  1229, relative à la prévention des dépôts de bilan liés au covid-19.

Mme Pascale Fontenel-Personne. En 2020, comme le Président de la République l'avait promis, le ministère de l'économie, des finances et de la relance a piloté avec justesse et finesse le soutien à notre économie. Nous n'avons pas enregistré de hausse des dépôts de bilan, mais il ne s'agit peut-être que d'un report d'échéance. Étant donné le caractère durable de la crise, l'élastique se tend et pourrait bien rompre.

Les nombreux dispositifs mis en œuvre pour maintenir la vie économique de milliers d'entreprises ont démontré leur forte utilité, en comparaison de certains pays voisins : ils sont efficaces pour nos TPE et PME, notamment celles qui dépendent de l'économie touristique. Toutefois, compte tenu d'une situation sanitaire toujours plus instable, ces dispositifs ne suffiront malheureusement pas à sauver l'ensemble des entreprises françaises. Cela risque de causer une très forte hausse des dépôts de bilan en 2021, au moment de la reprise puis de la relance. J'ai d'ailleurs été personnellement alertée à ce sujet par de nombreuses entreprises en Sarthe.

Je souhaite donc vous interroger sur la possibilité de créer un dispositif inédit au sein des banques de France qui, calqué sur le modèle du surendettement des particuliers, permettrait de lutter contre la détresse économique et psychique des entrepreneurs.

Il s'agirait là d'une porte d'entrée, d'un sas déjudiciarisé, contrairement au modèle APESA – aide psychologique pour les entrepreneurs en souffrance aiguë –, mis à disposition dans les tribunaux de commerce et que je connais bien. Cette cellule d'urgence permettrait de trier les dossiers recevables en fonction de critères établis, en faisant une différence entre les dépôts de bilan dits d'opportunité et ceux consécutifs à la situation sanitaire. Il faut distinguer d'une part les entreprises structurées en société anonyme – SA –, en SARL – société à responsabilité limitée – SARL – ou en société par actions simplifiée – SAS –, et d'autre part celles qui sont en nom propre.

Monsieur le ministre délégué, quels sont les moyens mis en œuvre par l'État pour éviter les dépôts de bilan massifs des entreprises qui étaient encore viables avant le confinement ? Et quelles mesures seront prises pour éviter les dépôts de bilan dits d’opportunité ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.

M. Alain Griset, ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises. C'est vrai, madame la députée – nous avons eu l'occasion d'évoquer ce sujet à plusieurs reprises –, les défaillances d'entreprises ont, pour l'instant, été contenues. Mieux, elles ont diminué de plus de 30 % en 2020. Par ailleurs, les créations d'entreprises ont augmenté de manière significative – de 21 %. Néanmoins, vous avez raison, des inquiétudes persistent chez de nombreux entrepreneurs qui, au regard de la situation économique et du manque de perspectives causé par la situation sanitaire, s'inquiètent de leur avenir et craignent de déposer le bilan.

Le 5 octobre dernier, nous avons, le garde des sceaux, la ministre chargée de l'industrie et moi-même, installé une mission sur la justice économique, laquelle a été confiée à M. Georges Richelme, président de la Conférence générale des juges consulaires de France. Cette mission, qui vise à établir un état des lieux de l'ensemble des pratiques actuellement mises en œuvre dans le cadre judiciaire et hors de ce cadre, devra, avant la fin du mois, formuler des recommandations concrètes, afin de mieux détecter et prévenir les difficultés des entreprises dès qu'elles commencent à apparaître, et de mieux accueillir et accompagner les entrepreneurs individuels, exploitants agricoles et dirigeants d'entreprises en difficulté.

Madame la députée, vous savez combien je suis attaché au repérage le plus précoce possible des difficultés, afin d'éviter la mise en œuvre de cette procédure, qui est souvent très contraignante et psychologiquement très pénalisante pour les chefs d'entreprise. Je ne doute pas que les conclusions de ces travaux nous permettront de renforcer les dispositifs d'ores et déjà existants pour détecter précocement les difficultés qui touchent les entreprises.

Mon objectif est identique au vôtre, madame la députée : je souhaite leur offrir un accompagnement adapté, notamment par une coordination accrue des différents acteurs amenés à intervenir, afin de prévenir les défaillances, de préserver les activités et de sauvegarder l'emploi.

Je souhaite également que l'on trouve, grâce à la formation et à l'accompagnement personnalisé, des solutions pour permettre le rebond des chefs d'entreprise qui doivent arrêter leur activité. Notre objectif, dans la situation économique très difficile que nous vivons, est d'éviter des drames humains.

Données clés

Auteur : Mme Pascale Fontenel-Personne

Type de question : Question orale

Rubrique : Emploi et activité

Ministère interrogé : Économie, finances et relance

Ministère répondant : Économie, finances et relance

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 janvier 2021

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