Question orale n° 1245 :
Relations entre exploitants et propriétaires bailleurs de résidences de tourisme

15e Législature

Question de : Mme Edith Audibert
Var (3e circonscription) - Les Républicains

Mme Edith Audibert attire l'attention de M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie, sur la situation catastrophique des propriétaires bailleurs de résidences de tourisme et de résidences gérées. En effet, depuis le début des mesures de confinement liées à la crise sanitaire du covid-19, les exploitants-gestionnaires de ces deux catégories de résidences ont décidé unilatéralement de faire supporter financièrement cette situation difficile aux propriétaires bailleurs. Sans aucune négociation, profitant de la crise, les gestionnaires ont arrêté le paiement des loyers ou se sont auto-facturés des avoirs financiers sur le compte des bailleurs propriétaires. Cette situation est d'autant plus incompréhensible que ces mêmes gestionnaires ont profité largement des aides financières massives accordées par l'État tels les prêts garantis (PGE), le chômage partiel, les reports ou les abandons de charges sociales pour surmonter le cap difficile de la crise sanitaire. Se plaçant en position de force, ces gestionnaires ne produisent aucun document attestant de leurs situations financières dégradées ou de leurs difficultés de trésorerie susceptibles d'excuser les défauts de paiement des loyers aux propriétaires bailleurs. C'est pourquoi elle lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures urgentes qu'il entend prendre afin de clarifier les relations contractuelles entre exploitants et propriétaires bailleurs de résidences de tourisme et de résidences gérées et les modifications législatives et réglementaires susceptibles d'être prises afin de rééquilibrer les rapports entre les deux parties.

Réponse en séance, et publiée le 27 janvier 2021

RELATIONS ENTRE EXPLOITANTS ET PROPRIÉTAIRES BAILLEURS DE RÉSIDENCES DE TOURISME
Mme la présidente. La parole est à Mme Edith Audibert, pour exposer sa question, n°  1245, relative aux relations entre exploitants et propriétaires bailleurs de résidences de tourisme.

Mme Edith Audibert. Ma question s'adresse au secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie. La diversité de l'offre touristique française est un atout majeur qu'il faut préserver « quoi qu'il en coûte ». Les résidences de tourisme en font partie. Or, vous le savez, ce modèle est en danger. En effet, du fait de la crise sanitaire et des mesures de restrictions à répétition qui l'accompagnent, le secteur du tourisme est particulièrement fragilisé. Les résidences de tourisme sont également touchées car les grands groupes exploitants ont décidé, unilatéralement, de faire supporter financièrement la difficile situation actuelle aux propriétaires bailleurs. Sans aucune négociation, profitant de la crise, les gestionnaires ont en effet arrêté le paiement des loyers ou se sont auto-facturé des avoirs financiers sur le compte des bailleurs propriétaires.

Les propriétaires bailleurs sont devenus, de ce fait, une variable d'ajustement des exploitants au mépris des obligations contractuelles initiales. Cette situation est d'autant plus incompréhensible que ces mêmes gestionnaires ont profité largement des aides financières accordées par l'État pour surmonter le cap difficile de la crise sanitaire. Se plaçant en position de force, ces gestionnaires n'ont produit aucun document attestant de leur situation financière dégradée ou de leurs difficultés de trésorerie.

La confiance entre propriétaires bailleurs et exploitants est ainsi totalement rompue. Des réunions de conciliation ont eu lieu sans déboucher sur aucun accord. Il est urgent que vous interveniez. La Fédération nationale des associations de propriétaires en résidences de tourisme et résidences gérées évoque la nécessité de réformer le cadre législatif et réglementaire afin de rééquilibrer les rapports entre les parties.

Je souhaite connaître votre position à ce sujet. L'urgence commande en tout cas que, face à la crise, une solution équilibrée, qui rétablisse la charge financière entre les exploitants, les propriétaires et l'État, soit trouvée au plus vite afin d'éviter le surendettement des petits propriétaires bailleurs.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

M. Clément Beaune, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Je vous prie tout d'abord, madame Audibert, de bien vouloir m'excuser pour le petit problème d'organisation à cause duquel vous avez dû attendre quelques minutes, j'en suis navré. Je vais apporter, au nom de mon collègue Jean-Baptiste Lemoyne, plus particulièrement chargé de ce dossier, quelques éléments de réponse à votre préoccupation légitime.

À partir du mois de mars 2020 et du début de la crise sanitaire, vous le savez, les mesures de restriction et d'encadrement des déplacements, prises en raison de cette situation exceptionnelle, ont considérablement limité l'activité de l'ensemble des résidences de tourisme et des résidences gérées. Même si l'activité des résidences a été finalement satisfaisante pendant l'été 2020, ces mesures ont placé nombre d'entre elles dans une situation économique très délicate. C'est dans ce contexte que des gestionnaires de résidences ont en effet informé les bailleurs de leur intention de ne pas verser temporairement de loyer ou de reporter le paiement certains loyers dont ils sont redevables aux termes de leur bail commercial.

Le Gouvernement a pleinement conscience de l'inquiétude et des difficultés ainsi engendrées pour les propriétaires investisseurs, inquiétude d'autant plus compréhensible qu'une partie des propriétaires de résidences de tourisme ont même souscrit des emprunts et que des retards de paiement de loyers pourraient les placer dans une situation des plus difficiles, voire douloureuse, vis-à-vis des banques. Cette situation, nous en sommes convaincus, ne peut être résolue, à ce stade, que grâce à des discussions entre les gestionnaires et les propriétaires bailleurs. Elles ont déjà abouti à des compromis dans de nombreux cas.

Tout au long de l'année, le Gouvernement et les services de l'État ont cherché à faciliter ces discussions entre propriétaires bailleurs et exploitants pour parvenir à des compromis effectifs qui préservent la situation économique des résidences et les droits de chacun, ainsi que la situation des bailleurs. C'est dans ce cadre que les gestionnaires se sont en particulier engagés à s'acquitter de loyers non payés dès lors que l'activité aura repris, et cela le plus vite possible – nous y veillons. Ces avancées pourront servir de base à la discussion contractuelle entre bailleurs et locataires exploitants et nous examinerons l'éventualité d'une évolution législative au-delà de cette situation d'urgence.

Je rappelle que la Cour de cassation a récemment confirmé que les exploitants de résidences de tourisme ont l'obligation de communiquer aux propriétaires les comptes d'exploitation détaillés des résidences dans leur intégralité. Les propriétaires de lots au sein d'une résidence de tourisme et les sociétés gestionnaires peuvent également s'appuyer sur la charte encadrant les reports et annulations de loyer, établie au terme de cette médiation organisée entre bailleurs et locataires commerçants.

Afin de faciliter les accords amiables entre les parties, les propriétaires exploitants peuvent faire appel, vous le savez, à la commission départementale de conciliation des baux commerciaux. Je rappelle pour finir que, avec l'appui du Gouvernement, les représentants des exploitants ont également pris l'attache de la Fédération bancaire française, afin que leur situation individuelle d'endettement soit étudiée avec attention, pour éviter les situations difficiles que j'ai mentionnées.

Face à cette perturbation inédite des conditions d'exploitation des résidences de tourisme, le Gouvernement privilégie la recherche de compromis, sans exclure des évolutions législatives telles que vous les avez évoquées. Je vous propose de revenir sur ce point à moyen ou à long terme.

Mme la présidente. La parole est à Mme Edith Audibert.

Mme Edith Audibert. Je vous remercie pour votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Vous avez bien compris que cet investissement devient un fardeau financier, puisque le remboursement du crédit immobilier continue à courir. Peut-être faudra-t-il réformer le cadre législatif et réglementaire. Je vous sais gré de prendre en compte cette question, qui n'avait sans doute pas pu être anticipée.

Données clés

Auteur : Mme Edith Audibert

Type de question : Question orale

Rubrique : Baux

Ministère interrogé : Tourisme, Français de l'étranger et francophonie

Ministère répondant : Tourisme, Français de l'étranger et francophonie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 janvier 2021

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