Situation des sages-femmes
Question de :
Mme Michèle Victory
Ardèche (2e circonscription) - Socialistes et apparentés
Mme Michèle Victory attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la situation des sages-femmes. Alors que près de 65 % des accouchements se déroulent sous leur seule responsabilité et qu'elles assurent 90 % des surveillances de travail, les sages-femmes souffrent d'un manque de reconnaissance de leur profession, et le Ségur de la santé n'a pas abouti à une meilleure revalorisation de leur profession. Dans l'organisation du modèle de santé français, les sages-femmes souffrent de leur statut à l'hôpital, à savoir une profession médicale selon le code de la santé publique mais qui est administrativement assimilée aux professionnels non-médicaux au sein des hôpitaux, du fait du statut hybride obtenu après les mobilisations de la profession en 2013. Lors du Ségur, cela a eu pour conséquence l'obligation pour les sages-femmes de voir les négociations menées par les centrales syndicales et non par les représentants des sages-femmes. Aussi, elle souhaite connaître les intentions du Gouvernement concernant la situation des sages-femmes et des étudiants sages-femmes dans le pays.
Réponse en séance, et publiée le 27 janvier 2021
SAGES-FEMMES
Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Victory, pour exposer sa question, n° 1255, relative aux sages-femmes.
Mme Michèle Victory. La santé des femmes est un véritable enjeu, qui dépasse largement l'accompagnement des grossesses et des accouchements. En France, le champ de compétences des sages-femmes est très étendu : elles dispensent des soins aux mères et aux nouveau-nés, pratiquent les IVG, prescrivent et diagnostiquent. Dans un contexte de pénurie de gynécologues, elles apportent aux femmes un soutien nécessaire et une expertise incontestable. Pourtant, le Ségur de la santé a été une nouvelle occasion manquée de voir leurs compétences reconnues et valorisées.
Concernant leur statut, les sages-femmes sont considérées par le code de la santé publique comme appartenant à une profession médicale, mais sont administrativement assimilées aux professions non médicales au sein des hôpitaux. Il est donc nécessaire de leur accorder le statut de praticien hospitalier, qui non seulement garantirait leur indépendance et leur autonomie professionnelle, mais tendrait également à faire reconnaître les compétences spécifiques de ce métier incontournable. En outre, vous connaissez les avantages qui découleraient de l'attribution d'un tel statut, en matières d'organisation du temps de travail, de rémunération suivant échelon, et développement professionnel notamment.
Je veux également vous interroger sur le statut des étudiants et étudiantes sages-femmes, que j'ai rencontrés dans ma circonscription et qui vous ont fait part de leurs difficultés. Le niveau de gratification pendant leur stage est encore trop souvent inférieur au minimum légal de 3,90 euros par heure, ce qui est inadmissible. Au moment où les étudiants de notre pays sont de plus en plus touchés par la précarité, comment comprendre que leur rémunération mensuelle, pourtant revue à l'occasion du Ségur de la santé, soit encore si faible ? L'acquisition du matériel et des tenues de travail sont encore à la charge des étudiants dans une majorité d'établissements ; de plus, certaines régions leur demandent des frais supplémentaires, notamment pour l'inscription à la bibliothèque, alors qu'ils ne bénéficient pas de l'ensemble des aides des CROUS – centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires. Qu'en est-il de leur accès au contrat d'engagement de service public ? Il leur permettrait de s'installer dans des zones sous dotées et de participer à la lutte contre les déserts médicaux. L'équivalence de diplôme avec les aides-soignants et les auxiliaires de puériculture ou la création d'un statut de bi-appartenance les autoriserait à pratiquer une activité clinique en plus de leurs études.
Je m'arrête là faute de temps, mais la liste est longue, et je vous demande, madame la ministre déléguée, de leur donner des perspectives encourageantes, dans un contexte bien difficile.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie. Je vous remercie de votre question, qui nous offre l'occasion de rendre hommage à toutes les sages-femmes pour le rôle déterminant qu'elles ont joué pendant la crise sanitaire, en continuant d'assurer leur mission essentielle. Le Gouvernement reconnaît leur engagement. Les professionnels qui relèvent de la fonction publique hospitalière bénéficieront des revalorisations salariales prévues par le Ségur de la santé. Les revalorisations indiciaires conduiront à mener une réflexion sur l'évolution de la grille d'avancement des sages-femmes. Dans un souci de dialogue, le ministère des solidarités et de la santé ouvrira des discussions à ce sujet ; un groupe de travail se réunira à la fin du premier semestre 2021. Ces travaux ne pourront que contribuer à une meilleure reconnaissance du métier de sages-femmes en tant que profession médicale de l'hôpital.
Toutefois, outre les mesures de revalorisation, le ministère recourt à des actes forts, en faveur de l'exercice professionnel des sages-femmes. La réforme des décrets d'autorisation de l'activité d'obstétrique fera progresser encore la qualité de la prise en charge. Le parcours « 1000 jours », qui a fait l'objet de plusieurs annonces d'Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles, se traduira par un renforcement des effectifs des sages-femmes et de leur rôle, pour mieux repérer les difficultés des familles et orienter les parents selon leurs besoins. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, vous le savez, autorise le développement de maisons de naissance, jusque-là expérimentales, et vise à les pérenniser. Ces maisons permettent aux sages-femmes qui souhaitent exercer de manière autonome de trouver un cadre adapté au suivi de grossesse personnalisé et à des accouchements moins médicalisés. L'engagement maternité, annoncé en 2019, comportera des mesures pour les sages-femmes, comme la rénovation des centres périnataux de proximité, lesquels offriront les conditions d'un exercice conforté, dans des structures mieux équipées, aux missions élargies. La proposition de loi de Mme Stéphanie Rist, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, a également permis d'engager une évolution du métier de sage-femme dans de nombreux champs, tels que la prescription d'arrêts de travail ou le dépistage d'infections sexuellement transmissibles et leur traitement. Le Gouvernement est donc pleinement engagé pour mieux valoriser le rôle des sages-femmes et leur métier.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Victory.
Mme Michèle Victory. Ma question concernait également les élèves sages-femmes, qui connaissent des conditions d'enseignement vraiment précaires. De plus, il existe dans la réglementation un vide juridique quant à la possibilité pour elles d'exercer dans les services de gynécologie ou de pédiatrie, et l'arrêté de janvier 2016 ne leur propose toujours pas l'équivalence nécessaire. Ce point de ma question m'importe tout particulièrement.
Auteur : Mme Michèle Victory
Type de question : Question orale
Rubrique : Professions de santé
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 janvier 2021