Dispense de licence pour les producteurs brasseurs indépendants
Question de :
M. Hervé Saulignac
Ardèche (1re circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Hervé Saulignac appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la dispense de licence pour les producteurs brasseurs indépendants. Les brasseurs indépendants foisonnent en France depuis quelques années. Ils sont le signe de la vitalité et de la diversité des territoires. Ils représentent des milliers d'emplois, majoritairement dans des départements ruraux qu'ils contribuent à faire vivre, comme en Ardèche. Or la règlementation autorisant les brasseurs à vendre sur place leurs productions est assez floue. Certaines préfectures de département exigent des producteurs brasseurs une licence III quand d'autres les en dispensent, créant ainsi une concurrence déloyale. En octobre 2019, le ministère de l'intérieur a indiqué oralement au Syndicat national des brasseurs indépendants que les brasseurs producteurs devraient être dispensés de licences pour vendre les bières qu'ils fabriquent sur place, au même titre que les vignerons. Depuis, la profession attend la confirmation par écrit de cette interprétation du ministère. Cette confirmation est d'autant plus pressante que la crise sanitaire et économique touche particulièrement les producteurs brasseurs qui travaillent essentiellement avec la restauration, le tourisme et l'évènementiel. Aussi, il le remercie d'indiquer quand le ministère confirmera par écrit son interprétation et si, dans l'attente, les producteurs brasseurs peuvent s'installer tout en étant dispensé de licence III comme cela se pratique dans nombre de départements.
Réponse en séance, et publiée le 17 février 2021
LICENCE DES PRODUCTEURS BRASSEURS INDÉPENDANTS
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Saulignac, pour exposer sa question, n° 1288, relative à la licence des producteurs brasseurs indépendants.
M. Hervé Saulignac. La France est le troisième pays européen en nombre de brasseries, avec en moyenne une ouverture chaque jour. Les brasseries artisanales sont un signe de la vitalité de nos territoires ; elles représentent des milliers d'emplois, souvent dans des départements ruraux qu’elles contribuent à faire vivre, comme dans mon département de l'Ardèche. Or la réglementation autorisant les brasseurs à vendre sur place leurs productions est assez floue. Certaines préfectures exigent une licence III, quand d’autres les en dispensent, créant ainsi une concurrence déloyale, en particulier lorsque les départements sont voisins.
En octobre 2019, le ministère de l’intérieur a indiqué au Syndicat national des brasseurs indépendants que les brasseurs producteurs devraient être dispensés de licence pour vendre les bières qu'ils fabriquent sur place, au même titre que les vignerons. Depuis, la profession attend la confirmation par écrit. Leur demande est d’autant plus pressante que la crise sanitaire et économique touche particulièrement les producteurs brasseurs, lesquels travaillent beaucoup avec la restauration, le tourisme et l’événementiel.
Je vous remercie donc de m’indiquer à quelle date le ministère entend compléter le guide des boissons pour confirmer son interprétation et si, dans l’attente, les producteurs brasseurs peuvent être dispensés de licence III, comme cela se pratique dans nombre de départements.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement. Effectivement, le principe posé par le code de la santé publique est que toute personne délivrant une boisson alcoolisée à un consommateur final est tenue d'être titulaire de la licence correspondant au groupe des boissons délivrées. Ainsi, pour vendre du vin ou de la bière, boissons de troisième catégorie, l'exploitant doit détenir – comme vous le savez puisque vous maîtrisez parfaitement le sujet – une licence de troisième catégorie en cas de consommation sur place, une petite licence restaurant ou une licence à emporter. Pour l'obtenir, il appartient à l'exploitant d'effectuer une déclaration auprès du maire de la commune où il exerce son activité. Comme vous l'avez rappelé, les viticulteurs qui vendent des produits issus de leur récolte, sont donc dans une situation particulière au regard de ce régime déclaratif.
En effet, depuis le 29 décembre 2010, l'obligation de déclaration fiscale a été supprimée pour les restaurants, au même titre que les débits de boissons à consommer sur place et les établissements de boissons à emporter. Depuis ces modifications, l'article 502 du code général des impôts – CGI – dispose que « toute personne se livrant à la vente au détail de boissons ne provenant pas de sa récolte exerce son activité en qualité de débitant de boissons et est soumise à la déclaration des contributions indirectes ».
La même loi a abrogé l'article 501 du CGI, qui prévoyait une déclaration fiscale sous forme libre pour les propriétaires récoltants. Ces derniers sont ainsi, conformément à l'article 502 du CGI, placés hors du champ des débits de boissons et ne sont donc pas soumis aux obligations déclaratives prévues par le CSP – contrat de sécurisation professionnelle –, et ce quel que soit le lieu de vente de leurs produits – installation permanente, foires ou marchés. Dès lors, ils n'ont pas à justifier de la possession d'une licence pour vendre au détail des boissons alcoolisées.
Si les propriétaires récoltants ne sont pas soumis à l'obligation déclarative, il importe toutefois de préciser que cette règle ne vaut que pour la vente des produits de leur propre récolte. Par exemple, un viticulteur qui vend du vin issu de sa récolte, mais également du vin provenant de la récolte de son voisin, doit détenir une licence pour ces seconds produits. Par souci de cohérence, et sous réserve de l'interprétation souveraine des juges, cette analyse peut être étendue aux brasseurs, pour autant qu'ils soient propriétaires récoltants, c'est-à-dire que la bière qu'ils produisent proviennent uniquement de leur récolte de houblon et de céréales – ces dernières étant transformées par leurs soins pour obtenir le malt.
Dans le cas contraire, le brasseur doit détenir une licence correspondant à son activité de vente au consommateur final : petite licence à emporter ou licence III. Cette interprétation figurera dans la prochaine version actualisée du guide du débit de boisson, réalisé en collaboration entre le ministère de l'intérieur et le ministère des solidarités et de la santé. Il ne tardera pas ; dès que la date sera connue, elle vous sera communiquée.
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Saulignac.
M. Hervé Saulignac. C'est peut-être la première fois que, lors d'une séance de questions orales sans débat, j'obtiens une réponse précise. Je m'en réjouis bien entendu.
Il ne manque qu'un élément de réponse, comme vous l'avez dit : la date de publication du guide où ces points seront précisés. Au nom des brasseurs indépendants, qui sont dans l'attente et dans l'urgence, je souhaite qu'ils le soient aussi vite que possible.
Auteur : M. Hervé Saulignac
Type de question : Question orale
Rubrique : Alcools et boissons alcoolisées
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 février 2021