Rôle sanitaire des établissements thermaux dans cette période de pandémie
Question de :
M. Fabien Roussel
Nord (20e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Fabien Roussel interroge M. le ministre des solidarités et de la santé sur le rôle sanitaire des établissements thermaux dans cette période de pandémie.
Réponse en séance, et publiée le 3 mars 2021
RÔLE SANITAIRE DES ÉTABLISSEMENTS THERMAUX PENDANT LA PANDÉMIE
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Roussel, pour exposer sa question, n° 1301, relative au rôle sanitaire des établissements thermaux pendant la pandémie.
M. Fabien Roussel. Madame la ministre déléguée chargée de l'autonomie, la France a la chance de compter 109 établissements thermaux et 850 médecins spécialisés qui offrent à près de 600 000 patients par an un traitement complémentaire aux médicaments. C'est parfois la seule solution thérapeutique efficace et durable contre certaines maladies. La médecine thermale permet de réduire voire de supprimer les douleurs tout en faisant significativement baisser la consommation de médicaments. Elle soigne les maladies touchant les voies respiratoires, les rhumatismes et les affections neurologiques.
Pourtant, tous nos établissements de soins sont fermés, du Nord, à Saint-Amand-les-Eaux, au Sud, à Amélie-les-Bains dans les Pyrénées-Orientales. En Italie, ils ne l'ont jamais été et l'accueil des patients est strictement réservé aux cures médicales ainsi qu'à la prise en charge des patients post-covid-19. En France, lors de leur réouverture au printemps dernier, aucun cluster n'a été signalé dans ces établissements, grâce à des conditions de surveillance particulièrement strictes.
En revanche, leur fermeture a provoqué une surconsommation de médicaments chez de nombreux patients, pour certains atteints de maladies chroniques. L'année dernière, suite aux fermetures administratives, ce sont plus de 350 000 malades qui ont été privés de soins. Faute de cure, un chauffeur routier de mon département du Nord, atteint d'arthrose, racontait qu'il était obligé de multiplier les prises d'antidouleurs et d'anti-inflammatoires.
Madame la ministre déléguée, les établissements thermaux sont les seuls établissements de soins à être fermés, en dépit de protocoles sanitaires très stricts. En outre, les médecins des thermes nous indiquent qu'ils sont capables d'accompagner dans leur convalescence les personnes touchées par le covid-19. Ils l'ont déjà démontré l'année dernière en soignant des patients post-covid-19, en particulier pour réparer leurs facultés respiratoires abîmées et pour reconstruire leur état général physique et psychologique. L'Académie de médecine recommande d'ailleurs – je cite une note du 15 juin 2020 – « la prise en charge de certaines séquelles de la covid-19 » par la médecine thermale.
Cette richesse naturelle et ces compétences, dont nous avons la chance de disposer, constituent ainsi des atouts importants pour tous nos concitoyens, y compris ceux qui souffrent de séquelles du covid-19. Pour toutes ces raisons, les équipes médicales comme les patients qui ont besoin de soins ne comprennent pas ce qui justifie encore la fermeture des établissements thermaux. Madame la ministre déléguée, les patients, les professionnels, les médecins et les élus – je salue à ce propos notre collègue Jean-Bernard Sempastous, qui suit ce dossier – attendent que la médecine thermale puisse à nouveau assumer son rôle premier, celui de soigner. Qu'est-ce qui s'oppose encore à l'ouverture de ces établissements et qu'attendez-vous pour permettre leur réouverture ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie. Merci, monsieur le député, de défendre le thermalisme français avec tant d'ardeur. Je vous remercie aussi de votre question qui me permet de rappeler que la crise sanitaire s'est déclenchée il y a maintenant un an et que nul n'aurait pu imaginer, ni vous ni moi, que nos vies allaient être ainsi bouleversées par un virus d'une puissance dévastatrice et inédite.
Désormais, nous réussissons à le prendre en charge et à nous en prémunir de manière plus efficace ; grâce au vaccin, nous commençons enfin à nous en protéger. Mais un an, pour une activité de recherche, c'est une période qui demeure brève et nous ne connaissons pas encore toutes les conséquences de l'infection. Néanmoins, nous constatons que certains de nos concitoyens – leur nombre est estimé à environ 10 % des personnes infectées – déjà frappés par le virus en subissent encore certains symptômes six mois plus tard, comme vous l'avez dit : fatigue extrême, troubles musculaires, digestifs, respiratoires ou neurologiques.
Au-delà des questions purement scientifiques, il est nécessaire de reconnaître et d'accompagner les personnes atteintes de ces symptômes persistants, de les écouter, de permettre qu'elles soient adressées aux bons professionnels et de les guider à tous les niveaux, sanitaire bien sûr mais aussi social et professionnel, car la durée des troubles qu'elles subissent s'avère bien souvent invalidante.
Cette situation nous oblige à apporter des solutions appropriées en lien avec tous les acteurs concernés, afin d'éviter l'errance médicale et de prodiguer les soins les plus adéquats. Mi-février, la Haute Autorité de santé a publié des réponses rapides à destination des professionnels, afin d'assurer le suivi de ces patients. Elle a également été saisie de lignes directrices davantage centrées sur la prise en charge et le recours aux établissements thermaux que vous évoquez ; celles-ci pourraient d'ailleurs être retenues si les analyses scientifiques en cours et l'évolution de la situation sanitaire en confirmaient l'utilité.
Jusqu'ici, la fermeture des centres thermaux s'imposait car ils constituent des espaces de brassage de populations, en outre souvent particulièrement fragiles face au virus, pour une activité incompatible avec le port du masque, dans un contexte humide susceptible d'accentuer les difficultés respiratoires. Nous adaptons donc notre réponse, au fil de l'eau, aux évolutions les plus récentes des connaissances médicales et scientifiques.
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Roussel.
M. Fabien Roussel. Je me permets de reprendre la parole, madame la ministre déléguée, parce que vous imaginez bien que votre réponse n'apporte pas les éléments attendus par l'ensemble des professionnels et des patients concernés. Vous savez que des mesures très strictes ont été prises dans ces établissements pendant la période de pandémie, afin qu'ils puissent accueillir des personnes malades, comme d'ailleurs dans l'ensemble des établissements de soins, en particulier les hôpitaux qui continuent évidemment à soigner. Les établissements thermaux peuvent aussi soigner et doivent pouvoir le faire pendant cette période ; l'ensemble de la profession se plaint de ne pas obtenir de réponses concrètes à ses questions et de ne pas pouvoir jouer son rôle. Nous le regrettons profondément.
Auteur : M. Fabien Roussel
Type de question : Question orale
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 février 2021