Problématiques des défaillances d'assureurs intervenant sur le marché français
Question de :
M. Sébastien Cazenove
Pyrénées-Orientales (4e circonscription) - La République en Marche
M. Sébastien Cazenove interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur les difficultés rencontrées par les particuliers ayant fait appel à une entreprise du bâtiment ayant souscrit une assurance de responsabilité civile professionnelle décennale auprès de compagnies défaillantes siégeant dans l'espace économique européen et intervenant en France au titre de la libre prestation de services (LPS). Depuis le décret n° 2018-612 du 16 juillet 2018 relatif à la prise en charge des dommages en cas de retrait d'agrément d'une entreprise d'assurance, le périmètre d'intervention du dispositif du fonds de garantie des assurances obligatoires (FGAO) a été élargi aux cas de faillite d'assureurs en dommages-ouvrage opérant en France en LPS par le mécanisme du passeport européen. Toutefois, lorsque des particuliers n'ont pas fait appel à un maître d'ouvrage pour la construction d'une maison individuelle, mais à un artisan du gros œuvre, ce dernier peut n'avoir contracté qu'une assurance en responsabilité civile en LPS sans souscription obligatoire à un fonds de garantie qui aurait permis aux sinistrés, en cas de défaillance de l'assurance, d'être dédommagés, ce champ n'étant pas couvert par l'ordonnance du 27 novembre 2017. Par ailleurs, pour les particuliers qui avaient contracté des garanties dommages-ouvrage avant le 1er juillet 2018, le décret ne couvrant l'activité de ces assureurs en LPS qu'à partir de cette date, il n'est pas prévu de prise en charge des sinistres en garantie bâtiment intervenus antérieurement. Ces sociétés d'assurance en faillite ou en liquidation laissent les chantiers sans couverture, mettant les entreprises et les particuliers dans d'extrêmes problématiques financières et judiciaires. Il semblerait que, en application des règles européennes de supervision, le contrôle du respect de la solidité financière de ces organismes d'assurance ne relève pas de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), chargée de la surveillance de l'activité des banques et des assurances en France, mais de l'autorité de contrôle du pays d'origine dans lequel l'organisme d'assurance est agréé, avec des règles moins strictes qu'en France. Aussi, il souhaiterait savoir ce qu'envisage le Gouvernement pour répondre aux assurés français et aux préjudices qu'ils subissent en raison des défaillances d'assureurs intervenant sur le marché français au titre de la libre prestation de services et améliorer la protection des particuliers.
Réponse en séance, et publiée le 3 mars 2021
DÉFAILLANCES D'ASSUREURS
M. le président. La parole est à M. Sébastien Cazenove, pour exposer sa question, n° 1309, relative aux défaillances d'assureurs.
M. Sébastien Cazenove. Monsieur le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises, je souhaite appeler votre attention sur les difficultés rencontrées par les particuliers qui ont fait appel à une entreprise du bâtiment ayant souscrit une assurance décennale auprès de compagnies étrangères défaillantes. Depuis le décret du 16 juillet 2018 relatif à la prise en charge des dommages en cas de retrait d'agrément d'une entreprise d'assurance, le périmètre d'intervention du Fonds de garantie des assurances obligatoires a été élargi aux cas de faillite d'assureurs en dommages-ouvrage opérant en France par le mécanisme du passeport européen.
Toutefois, deux cas posent encore problème. Le premier est celui des particuliers qui, pour la construction de leur maison, n'ont pas fait appel à un maître d'ouvrage, mais à une entreprise de gros œuvre n'ayant contracté qu'une assurance en responsabilité civile, sans souscription obligatoire à un fonds de garantie qui aurait permis l'indemnisation d'un éventuel dommage. Le second, celui des particuliers qui ont contracté une assurance avant le 1er juillet 2018. En effet, le décret ne couvrant l'activité de ces assureurs en libre prestation de service qu'à partir de cette date, il n'est pas prévu de prise en charge des sinistres intervenus antérieurement.
Les sociétés d'assurance défaillantes laissent les chantiers sans couverture, provoquant pour les entreprises et les particuliers des problèmes judiciaires et financiers. Dans ce genre d'affaires, les gens de bonne foi croisent souvent la malhonnêteté et la malchance. Je souhaiterais donc savoir ce qu'envisage le Gouvernement pour répondre à nos concitoyens et pour réparer les préjudices qu'ils subissent en raison des défaillances de ces assureurs étrangers.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.
M. Alain Griset, ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises. Le régime de la libre prestation de services, ou LPS, permet à des entreprises du secteur financier, notamment des organismes d'assurance agréés dans un État membre de l'espace économique européen, d'offrir leurs services sur le territoire d'un autre État membre sans y être établis. Dans ce cadre, en application des règles européennes de supervision en vigueur, le contrôle du respect de la solidité financière de ces organismes d'assurance ne relève pas de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – l'ACPR –, mais de l'autorité de contrôle du pays d'origine, c'est-à-dire du pays dans lequel l'organisme d'assurance est agréé.
Néanmoins, l'ACPR a mis en place une procédure de déclaration de sinistre diffusée aux assurés et aux intermédiaires d'assurance au moyen de son site internet et comprenant notamment une section dédiée aux contrats souscrits auprès des assureurs européens défaillants ayant commercialisé des contrats en France sous le régime de la LPS, notamment des contrats d'assurance construction. En outre, le service d'information de l'ACPR permet également d'aiguiller les assurés rencontrant des difficultés dans leurs démarches d'indemnisation.
Le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, ou FGAO, a pour mission d'indemniser les particuliers ayant subi un sinistre qui aurait dû être indemnisé en responsabilité civile automobile et en dommages-ouvrage par un assureur auquel son agrément a été retiré. Toutefois, le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages n'est susceptible d'intervenir, depuis le 1er juillet 2018, que pour les contrats d'assurance obligatoires en dommages-ouvrage souscrits ou renouvelés à compter de cette date en cas de retrait d'agrément d'un assureur implanté en France.
Pour ce qui concerne, par ailleurs, les assurés en dommages-ouvrage se trouvant sans couverture du fait d'une défaillance pour un contrat souscrit avant le 1er juillet 2018, nous travaillons à la prise en charge de leur indemnisation par le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages.
Je vous informe de notre intention de proposer, dans le cadre du prochain projet de loi de finances, une discussion permettant de résoudre cette difficulté. Le Gouvernement est particulièrement attentif aux difficultés rencontrées par les particuliers touchés par ces événements, que nous regrettons vivement. À cet égard, il est essentiel que les consommateurs puissent être protégés où qu'ils choisissent de s'assurer au sein de l'Union européenne. Après les avancées obtenues en la matière au cours de l'année 2019, la France fait une priorité de l'amélioration de la surveillance des activités transfrontalières dans le cadre de la revue à venir du cadre prudentiel européen Solvabilité II.
Auteur : M. Sébastien Cazenove
Type de question : Question orale
Rubrique : Assurances
Ministère interrogé : Économie, finances et relance
Ministère répondant : Économie, finances et relance
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 février 2021