Prise en charge psychiatrique des conséquences des confinements et du couvre-feu
Question de :
M. Olivier Falorni
Charente-Maritime (1re circonscription) - Libertés et Territoires
M. Olivier Falorni attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur les conséquences de la crise sanitaire en termes d'impact sur la santé mentale. Alors que le premier épisode de confinement a d'ores et déjà charrié son lot de pathologies corrélées à ce brusque changement de rythme de vie, le second confinement et le couvre-feu emportent des conséquences sur la santé mentale des Françaises et Français, touchant plus fortement les étudiants, les jeunes, les personnes en invalidité et celles qui vivent dans les conditions les plus modestes. C'est pourquoi il lui demande quelles mesures il compte mettre en place afin de pallier l'important besoin de prise en charge psychiatrique dans les semaines et mois à venir. Face à l'urgence de la situation, il invite le Gouvernement à prendre conscience de l'importance de ce sujet et à en faire une priorité nationale.
Réponse en séance, et publiée le 3 mars 2021
CONSÉQUENCES PSYCHIATRIQUES DES CONFINEMENTS
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Falorni, pour exposer sa question, n° 1320, relative aux conséquences psychiatriques des confinements.
M. Olivier Falorni. L'épidémie de covid-19, les confinements et les mesures de restriction de libertés qu'elle a entraînés ont créé des dommages psychosociaux considérables chez beaucoup de Françaises et de Français.
Les jeunes sont particulièrement touchés. Rester isolé dans une petite chambre, à suivre devant un écran des cours à distance tout en connaissant des difficultés financières pour remplir son frigo : tel est le sombre quotidien, sans réel horizon, de nombreux étudiants. On comprend que cela donne à certains des idées noires. Un récent sondage montre ainsi qu'ils sont les plus fragilisés par la crise sanitaire et 40 % des 18-24 ans souffrent de troubles d'anxiété.
Certes, vous avez apporté une première réponse à ce problème en créant le chèque d'accompagnement psychologique, qui finance trois consultations chez un psychologue libéral. C'est une avancée, mais elle ne correspond pas à l'ampleur des besoins car le phénomène de détresse psychologique touche hélas tous les âges et toutes les catégories. Tout le monde est concerné.
Depuis le printemps 2020, la prévalence des troubles mentaux a doublé en France ; pire, un Français sur cinq a songé à se suicider. Le 16 février dernier, la Cour des comptes, dans son rapport sur les parcours des patients dans la filière psychiatrique, s'est prononcée en faveur de la généralisation du remboursement des consultations de psychologie par la sécurité sociale, déjà expérimenté dans quatre départements depuis deux ans. Aujourd'hui, les circonstances exceptionnelles que nous connaissons font qu'il est urgent d'agir rapidement.
Ma question est donc très simple : comme le préconise la Cour des comptes, allez-vous, madame la ministre déléguée, généraliser le remboursement des consultations de psychologie par la sécurité sociale pour prévenir, traiter et guérir la profonde détresse morale qui frappe un nombre important de nos concitoyens ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie. Vous le savez, le Gouvernement est pleinement conscient de la dimension psychologique de la crise sanitaire, aussi importante d'ailleurs que sa dimension somatique. Les effets de cette crise génèrent un mal-être chez une majorité de Français – vous l'avez dit –, les jeunes mais aussi les personnes âgées – je ne mets pas les différentes générations en opposition, car elles souffrent toutes – et les soignants, qui sont spécifiquement éprouvés.
Ces populations, particulièrement exposées, sont d'autant plus vulnérables à une souffrance psychique et celle-ci doit faire l'objet d'un accompagnement. Depuis le début de la crise sanitaire, le ministère des solidarités et de la santé a accompagné les acteurs de la santé mentale et de la psychiatrie qui ont remarquablement su se mobiliser et même se réorganiser sur le territoire. Une cellule de crise « covid-santé mentale » et la publication d'une série de recommandations ont permis de soutenir ce secteur pour qu'il continue à prendre en charge les publics concernés tout en répondant aux nombreuses nouvelles sollicitations.
Le Ségur de la santé prévoit également de renforcer et d'élargir l'offre de soutien psychiatrique et psychologique à l'égard de la population. À ce titre, 41 cellules d'urgence médico-psychologique sont renforcées par deux infirmiers psychologues en équivalents temps plein ; par ailleurs, 160 psychologues en cours de recrutement vont s'ajouter de façon pérenne aux effectifs des centres médico-psychologiques, notamment au sein des structures infanto-juvéniles. Deux cents postes de psychologues sont également prévus pour appuyer dans les prochains mois les médecins généralistes des maisons de santé pluriprofessionnelles et des centres de santé, ce qui préfigure un renforcement structurel.
Pour les étudiants, 80 postes de psychologues, 60 postes d'assistantes sociales et un chèque d'accompagnement psychologique ont été créés. Enfin, nous souhaitons amplifier et accélérer les actions de la feuille de route pour la santé mentale et la psychiatrie, afin de faire de la santé mentale le premier poste de nos dépenses de soins. C'est une priorité majeure de nos politiques de santé, qui doit permettre une meilleure sensibilisation aux enjeux de la santé mentale et renforcer une culture de la prévention. Il s'agit aussi d'améliorer le repérage précoce de la souffrance psychique et sa prise en charge graduée, pour éviter l'ensemble des drames que vous avez évoqués.
Soyez donc assuré, monsieur le député, de notre pleine et entière mobilisation face à ce sujet majeur.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Falorni.
M. Olivier Falorni. Je prends acte de votre réponse, madame la ministre déléguée, mais je maintiens qu'il est essentiel, comme l'a proposé la Cour des comptes, que l'on puisse généraliser une expérimentation qui a déjà cours dans quatre départements et qui permet le remboursement des consultations de psychologie pour nos concitoyens. Il s'agirait d'une mesure à la fois sanitaire, sociale et même économique puisqu'elle permettrait de désengorger les centres médico-psychologiques qui sont déjà saturés. Vous le savez, la psychiatrie est le parent pauvre du système de santé français ; je souhaiterais qu'elle devienne une grande cause nationale, comme l'est devenue la cancérologie.
Auteur : M. Olivier Falorni
Type de question : Question orale
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 février 2021