Bilinguisme et apprentissage franco-allemand
Question de :
M. Frédéric Reiss
Bas-Rhin (8e circonscription) - Les Républicains
M. Frédéric Reiss interroge M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports au sujet du bilinguisme et des partenariats franco-allemands en matière d'enseignement. La mise en œuvre des objectifs du traité Aix-la-Chapelle en matière de politiques linguistiques se heurte à des règlementations nationales malvenues. Ainsi, un arrêté du 3 avril 2020 rend la certification en langue anglaise obligatoire pour les étudiants de l'enseignement supérieur. Ce texte va à l'encontre des efforts faits en Alsace pour améliorer la connaissance de l'allemand afin de tenir compte des opportunités liées au bassin d'emploi du Rhin Supérieur. Les modules complémentaires d'allemand assurés dans les centres de formation des apprentis sont menacés. De même, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel transfère la compétence apprentissage aux branches professionnelles. Cela impacte lourdement le dispositif de l'apprentissage transfrontalier existant avec l'Allemagne. Le parlementaire souhaite connaître la stratégie du ministre pour pérenniser ces deux offres de formation essentielles pour l'employabilité des jeunes et pour l'approfondissement des relations franco-allemandes.
Réponse en séance, et publiée le 7 avril 2021
BILINGUISME ET PARTENARIATS FRANCO-ALLEMANDS
M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour exposer sa question, n° 1384, relative à l'objectif de bilinguisme et aux partenariats franco-allemands en matière d'enseignement et de formation professionnelle.
M. Frédéric Reiss. La réalisation des objectifs du traité d'Aix-la-Chapelle se heurte souvent à des réglementations nationales malvenues. En voici deux exemples.
L'arrêté du 3 avril 2020 qui rend la certification en langue anglaise obligatoire pour les étudiants dans l'enseignement supérieur va à l'encontre des efforts fournis en Alsace pour favoriser la maîtrise de l'allemand, laquelle constitue un véritable atout pour trouver du travail dans le bassin d'emploi du Rhin supérieur.
Financés jusqu'à présent par le conseil régional, les modules complémentaires d'allemand assurés dans les CFA – centres de formation d'apprentis – s'en trouvent menacés, au détriment de l'employabilité de nos jeunes en Allemagne et dans les entreprises allemandes implantées en France.
Second exemple, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel transfère le pilotage de l'apprentissage des régions vers les branches professionnelles. Il remet ainsi en cause l'apprentissage transfrontalier que nous avons réussi à développer avec les collectivités territoriales et les partenaires consulaires français et allemands. 220 contrats sont en cours et seuls une dizaine de nouveaux contrats ont été signés pour le CFA académique durant l'année en cours. C'est une régression spectaculaire. Les filières proposées par les CFA consulaires se sont aussi effondrées. Pour débloquer la situation, il faut s'intéresser aux questions de financement et de responsabilité juridique. À l'heure de la montée en puissance de la CEA, la Collectivité européenne d'Alsace, les compétences des collectivités doivent être clarifiées afin d'assurer à nouveau la promotion de ce dispositif.
Madame la secrétaire d'État, en pérennisant ces deux offres de formation essentielles pour l'employabilité des jeunes, vous répondriez à une vraie demande des familles et des entreprises et vous permettriez aux jeunes de s'ouvrir sur l'Europe.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire. Le ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports soutient bien sûr les collectivités territoriales dans la réalisation des objectifs inscrits à l'article 15 du traité d'Aix-la-Chapelle. Jean-Michel Blanquer a donc annoncé le 25 janvier, lors de la huitième rencontre entre ministres de l'éducation des Länder et recteurs d'académie, la création d'un second lycée franco-allemand à Strasbourg à partir de la rentrée de 2021. Ce projet sera conduit en étroit partenariat avec les collectivités territoriales – la région Grand Est, la Communauté européenne d'Alsace, l'Eurométropole de Strasbourg et la mairie de Strasbourg.
Le ministère suit également avec une attention toute particulière le projet de développement d'un centre de ressources à partir de l'INSPÉ – institut national supérieur du professorat et de l'éducation – de Colmar. Même si sa création a été retardée par la crise sanitaire, il n'est pas ajourné. Le COPIL – comité de pilotage – est en cours de constitution. Une plateforme de mutualisation des nombreuses ressources prévues pour favoriser le développement du bilinguisme en Alsace dans le cadre de la politique plurilingue menée dans l'ensemble de la région académique du Grand Est est également en cours d'élaboration.
Le ministère soutient également des partenariats entre les INSPÉ de Strasbourg, de Reims, de l'académie de Nancy-Metz et leurs homologues allemands en faveur de l'internationalisation de la formation de nos futurs enseignants.
La réunion du 25 janvier a été l'occasion de rappeler l'augmentation de plus de 80 % des crédits d'Erasmus +. Le ministre a également insisté sur son soutien au développement des partenariats, que vous avez évoqué, entre campus des métiers et des qualifications français et écoles professionnelles allemandes, afin « d'aller vers des partages de technologie, vers des projets ambitieux qui s'articulent avec les moyens de l'Union européenne, pour donner envie aux jeunes. » Il a ainsi été convenu de créer plus de vingt partenariats, en particulier autour des enjeux climatiques et des nouveaux métiers du numérique, l'objectif étant de développer une offre ambitieuse, susceptible d'attirer les jeunes et d'accroître leur employabilité.
Enfin, à cette occasion, comme convenu, le ministre a donné mandat aux commissions franco-allemandes des experts compétentes pour élaborer les stratégies permettant d'augmenter le nombre d'apprenants de la langue du partenaire et le niveau atteint par les élèves, ainsi que pour créer des outils d'excellence franco-allemands pour l'enseignement et la formation professionnelle, conformément à l'article 10 du traité d'Aix-la-Chapelle.
M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.
M. Frédéric Reiss. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour ces éléments de réponse. Nous nous réjouissons évidemment de l'ouverture d'un deuxième lycée franco-allemand, qui va dans le sens souhaité par les familles.
Toutefois, n'oubliez pas la question des modules complémentaires d'allemand et de leur financement. L'obligation de certification en langue anglaise porte préjudice à la pratique de l'allemand, absolument nécessaire, notamment dans les CFA et CFAI – centre de formation d'apprentis de l'industrie – locaux, importants pour l'industrie.
Auteur : M. Frédéric Reiss
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : Éducation nationale, jeunesse et sports
Ministère répondant : Éducation nationale, jeunesse et sports
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 mars 2021