Prise en charge des enfants dys
Question de :
Mme Bérengère Poletti
Ardennes (1re circonscription) - Les Républicains
Mme Bérengère Poletti attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports sur la prise en charge des enfants souffrant de troubles dys. Les troubles spécifiques du langage, communément appelés « troubles dys », sont des troubles cognitifs qui affectent le langage et le calcul et se traduisent par la dyslexie, la dysorthographie, la dysphasie, la dyspraxie ou encore la dyscalculie. On évalue la prévalence de cette maladie à 10 % de la population, c'est dire l'importance du sujet qu'elle évoque. Les manifestations de ces troubles apparaissent en général chez l'enfant et plus particulièrement au cours des premiers apprentissages scolaires. Les parents voire les enseignants, qui ne sont malheureusement pas toujours suffisamment formés, identifient un problème à l'école. Ils vont avoir besoin d'un diagnostic mais celui-ci n'est possible qu'à partir du CE2 et après dix-huit mois d'orthophonie. Le parcours du combattant commence alors pour eux. Ils doivent accéder à une plateforme des troubles de l'apprentissage. Dans les Ardennes, c'est deux ans d'attente ! Sauf s'ils peuvent se rendre en Belgique (les voisins) où il n'y a que quelques mois d'attente seulement, ou bien ils font réaliser le bilan dans le privé. Cela va alors leur coûter 200 euros, donc inaccessible aux familles aux revenus modestes. Après avoir recueilli les avis de six professionnels différents, ils doivent faire valider le diagnostic par un médecin puis par un médecin scolaire pour accéder aux accompagnements. Le dossier aboutit alors à la MDPH et au plan d'accompagnement personnalisé. Mme la députée a été sollicitée par les parents d'un enfant ardennais confronté à ces difficultés qui lui ont expliqué le long parcours qu'ils ont suivi avec leur enfant : cela a pris presque quatre ans ! Ce sont pourtant des personnes habituées aux multiples formalités et qui ont une bonne maîtrise des démarches administratives. Ils se sont montrés tenaces pour certaines étapes. Ces graves dysfonctionnements placent les familles dans des situations complexes et éprouvantes. Et cela nuit aux besoins et aux apprentissages de ces enfants. Même si le Gouvernement n'est pas resté sans rien faire on est encore loin, voire très loin d'une réponse appropriée. C'est pourquoi Mme la députée souhaite savoir comment le Gouvernement entend permettre à ces enfants d'accéder à une prise en charge beaucoup plus rapide. Elle lui demande quelle politique il va mettre en place pour réduire ces délais incroyablement longs et pénalisants pour les enfants dys.
Réponse en séance, et publiée le 24 novembre 2021
TROUBLES DYS
M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour exposer sa question, n° 1544, relative à la prise en charge des troubles dys.
Mme Bérengère Poletti. Les troubles spécifiques du langage, communément appelés troubles dys, sont des troubles cognitifs qui affectent le langage et le calcul, et se traduisent par une dyslexie, une dysorthographie, une dysphasie, une dyspraxie ou encore une dyscalculie. On évalue la prévalence de cette maladie à 10 % de la population ; c'est dire l'importance du sujet que j'évoque.
Les manifestations de ces troubles apparaissent en général chez l'enfant au cours des premiers apprentissages scolaires. Les parents, voire les enseignants, qui ne sont malheureusement pas toujours suffisamment formés, identifient un problème à l'école. Ils vont avoir besoin d'un diagnostic, mais celui-ci n'est possible qu'à partir du cours élémentaire deuxième année (CE2) et après dix-huit mois d'orthophonie.
Le parcours du combattant commence alors pour eux. Ils doivent accéder à une plateforme des troubles de l’apprentissage. Dans les Ardennes, c'est deux ans d’attente, alors que s'ils peuvent se rendre en Belgique, chez nos voisins, il n'y a que quelques mois d'attente. Ils peuvent aussi faire réaliser le bilan dans le privé : cela va alors leur coûter 200 euros, un montant inaccessible aux familles aux revenus modestes.
Après avoir recueilli les avis de six professionnels différents, ils doivent faire valider le diagnostic par un médecin, puis par un médecin scolaire, pour accéder aux accompagnements. Le dossier aboutit alors à la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) et un plan d'accompagnement personnalisé est élaboré.
J'ai été sollicitée par des parents d’enfants ardennais confrontés à ces difficultés, qui m'ont expliqué le long parcours qu'ils ont suivi avec leur enfant : cela peut prendre quatre ans, même pour des personnes habituées aux multiples formalités administratives, qui ont une bonne maîtrise de ces démarches, et qui se sont montrées tenaces pour franchir certaines étapes. Ces graves dysfonctionnements placent les familles dans des situations complexes et éprouvantes, et tout cela nuit gravement aux besoins et aux apprentissages de ces enfants.
Même si le Gouvernement n'est pas resté sans rien faire, nous sommes encore loin, voire très loin, d'une réponse appropriée. Comment entendez-vous permettre à ces enfants d'accéder à une prise en charge beaucoup plus rapide ? Quelle politique allez-vous mettre en place pour réduire ces délais incroyablement longs et pénalisants pour les enfants « dys » ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire. Merci pour votre question. Permettre à l’école de la République d’être pleinement inclusive est une ambition forte du Gouvernement ; c'est une ambition que nous partageons tous ici.
Les élèves atteints de troubles spécifiques du langage et des apprentissages (TSLA) peuvent bénéficier de deux types de dispositifs spécifiques : le plan d’accompagnement personnalisé (PAP) est destiné aux élèves présentant des difficultés scolaires durables en raison d’un trouble des apprentissages mais ne relevant pas d’une reconnaissance de handicap ; le projet personnalisé de scolarisation (PPS) nécessite, lui, que la famille s’adresse à la MDPH pour faire reconnaître le handicap.
Les directions des services départementaux de l’éducation nationale (DSDEN) sont toutes pourvues d’inspecteurs de l’éducation nationale chargés de l’adaptation scolaire et de la scolarisation des élèves handicapés, dédiés à l'accompagnement. Ils s’occupent du suivi des élèves à besoins éducatifs particuliers ou en situation de handicap, tels que les élèves « dys », et de la coordination des différents acteurs.
Nous avons beaucoup agi, et je vous remercie de l'avoir souligné. Depuis la rentrée scolaire 2019, la plateforme Cap école inclusive propose aux enseignants des ressources pédagogiques simples, immédiatement mobilisables en classe. Elle permet également la mise en relation de l’enseignant avec des pairs experts.
Pour finir, l'une des mesures issues de la concertation Ensemble pour une école inclusive, engagée à la fin de l'année 2018, prévoyait la création d’un outil informatique spécifique. Depuis le 4 octobre 2021, l’application Livret de parcours inclusif (LPI), destinée aux élèves à besoins éducatifs particuliers, est déployée dans quatre académies pilotes. En 2022, elle le sera sur tout le territoire et tous les élèves à besoins éducatifs particuliers disposeront d’un livret de parcours inclusif, accessible aux familles. Le LPI est une plateforme de suivi du parcours des élèves à besoins éducatifs particuliers, notamment les élèves présentant des troubles dys. Il intègre, en fonction des besoins de l'élève, l’ensemble des plans formalisés de scolarisation, dont le plan d'accompagnement personnalisé et le document de mise en œuvre du projet personnalisé de scolarisation. Les adaptations et aménagements pédagogiques mis en place y sont renseignés. Le LPI a également pour objectif de garantir aux familles la mise en place de ces adaptations et aménagement. Cet outil évolutif permet ainsi un partage d’informations en continu par tous les acteurs tout au long du parcours scolaire de l’élève à haut potentiel dès les premiers aménagements mis en place par les enseignants.
M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.
Mme Bérengère Poletti. Le Gouvernement n'est pas resté sans rien faire, je l'avais dit, et vous avez décrit vos actions. Mais le problème que je soulignais, c'est qu'il y a encore des parents à qui il faut près de quatre ans pour voir aboutir leur démarche. Il est difficile d'établir le diagnostic car les enseignants ne sont pas toujours suffisamment formés, les parents pas toujours alertés. Ensuite, il peut être très difficile de trouver des professionnels, notamment dans certains territoires ; dans les Ardennes, la situation est très complexe. Heureusement que les Belges ont pris cette cause à bras-le-corps plus vite, sans doute, que nous : il ne faut là-bas que quelques mois pour que les enfants soient pris en charge.
J'insiste sur cette différence avec nos voisins. Ces troubles affectent 10 % des enfants, et une bonne prise en charge change tout pour l'élève.
Auteur : Mme Bérengère Poletti
Type de question : Question orale
Rubrique : Personnes handicapées
Ministère interrogé : Éducation nationale, jeunesse et sports
Ministère répondant : Éducation nationale, jeunesse et sports
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 novembre 2021