Question orale n° 1640 :
Violences entre bandes de jeunes

15e Législature

Question de : Mme Aude Luquet
Seine-et-Marne (1re circonscription) - Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés

Mme Aude Luquet alerte M. le ministre de l'intérieur sur les violences entre bandes de jeunes. Le 8 janvier 2022, Nahil, un adolescent de 16 ans attiré dans un guet-apens pour un motif fallacieux était touché mortellement par un coup de couteau devant la gare de Melun. Une simple vente de téléphone portable s'est transformée en règlement de comptes dans une histoire de rivalité entre bandes. Cette violence qui touche les plus jeunes horrifie tous les citoyens. Malheureusement, ce qui est arrivé à Melun n'est pas un phénomène isolé. Face à cette délinquance dès le plus jeune âge, il faut des actes forts, de l'école à la justice en passant par l'action des forces de l'ordre sur le terrain. Ainsi, elle lui demande quels moyens de prévention, de pédagogie, d'actions et de sanctions il entend mettre en œuvre pour répondre à cette violence devenue récurrente pour un certain nombre des jeunes.

Réponse en séance, et publiée le 2 février 2022

VIOLENCES ENTRE BANDES DE JEUNES
M. le président. La parole est à Mme Aude Luquet, pour exposer sa question, n°  1640, relative aux violences entre bandes de jeunes.

Mme Aude Luquet. Dans la nuit du 8 janvier, Nahil, un adolescent de 16 ans, était touché mortellement par seize coups de couteau devant la gare de Melun. Attiré par un motif en apparence anodin – la vente d'un téléphone portable –, il a en fait été victime d'un règlement de compte. Depuis, sept mineurs et deux majeurs ont été interpellés et mis en examen.

Cette violence inouïe nous horrifie toutes et tous. Ce qui est arrivé à Melun n'est malheureusement pas un acte isolé : il y a quelques semaines, une ville voisine, Cesson, était également touchée par le décès d'un jeune.

Je tiens ici à saluer le combat et le message d'apaisement d'Aïcha, la mère de Nahil, qui a créé le collectif Uni'cité afin de trouver des solutions à cette violence entre adolescents. Elle n'est pas seule. Le collectif 77 Sans frontières est à ses côtés pour apporter une réponse globale à ce phénomène. Ces associations sont mobilisées au quotidien sur le terrain, aux côtés des jeunes, pour détecter et apaiser les tensions par le dialogue, les rencontres et les médiations.

Ces agissements violents ne datent pas d'aujourd'hui et ils ne sont pas limités aux grandes agglomérations. Depuis des années, l'État s'engage auprès des jeunes dans nos quartiers. De nombreux dispositifs se succèdent sans parvenir, malheureusement, à enrayer ce déchaînement de violence.

Il faut désormais des actes forts. Si cela passe par des condamnations fermes, il nous faut également donner plus de moyens aux forces de l'ordre sur le terrain, ainsi qu'aux associations qui effectuent un travail précieux en amont. Elles réclament de véritables actions transverses mobilisant tous les acteurs – maires, préfet, parents – et demandent surtout le fort soutien de l'État. Quels moyens de prévention et de pédagogie, quelles actions et quelles sanctions, mais aussi quels moyens d'évaluation des politiques publiques le Gouvernement entend-il mettre en œuvre pour éviter que cette violence ne se banalise ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la citoyenneté. Permettez-moi d'avoir une pensée pour la famille de Nahil. Vous avez tout à fait raison de rappeler que le phénomène de la violence entre bandes n'est hélas pas nouveau. Notre politique de sécurité apporte les premières réponses à ce défi. Des renforts ont ainsi été déployés dans les quartiers de reconquête républicaine ; la présence des policiers et gendarmes sur la voie publique a été augmentée de 10 % au cours des onze premiers mois de 2021. La lutte contre le trafic de drogue permet aussi d'occuper le terrain.

Il va de soi que des réponses plus spécifiques sont nécessaires. Je pense à la mise en place d'une véritable justice de proximité, à l'entrée en vigueur du code de la justice pénale des mineurs, aux moyens mobilisés par le Fonds interministériel de prévention de la délinquance, notamment dans le domaine de la vidéoprotection.

Cependant, le travail policier ne peut pas être la seule réponse. Les acteurs de l'éducation et de la justice sont essentiels et c'est une réponse globale qu'il faut rechercher. C'est pourquoi nous agissons aussi en faveur de l'insertion professionnelle, de la médiation sociale et de la prévention spécialisée. Au terme d'un travail important qui a impliqué douze ministères et associé de nombreux élus – je m'en félicite –, le Premier ministre a lancé en juin 2021 un plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences liées aux bandes et groupes informels, qui se décline dans chaque département autour de trois axes concrets : renforcer la prévention, améliorer le suivi de ce phénomène et développer les moyens d'enquête et les réponses pénales pour judiciariser le renseignement en renforçant le partage d'informations entre tous les partenaires locaux de la sécurité – les bailleurs sociaux, par exemple, mais aussi les associations et les élus locaux sont des partenaires essentiels. Les élus possèdent une connaissance fine de leur territoire et les prérogatives nécessaires pour agir, notamment en matière de prévention, de police municipale, de vidéoprotection. La mise en place, par la gendarmerie, des référents élus et du dispositif de consultation et d'amélioration du service a aussi permis d'intensifier les échanges avec les élus.

S'il existe un continuum de sécurité, il existe aussi un continuum de violence entre jeunes. C'est pourquoi, dans le cadre de la prévention de la délinquance, nous avons également créé un comité des parents contre le harcèlement afin de les impliquer davantage et de permettre aux acteurs éducatifs et aux forces de l'ordre de se retrouver dès que surviennent les premiers signes de violence entre jeunes. L'État est déterminé à ne rien céder et à continuer d'intervenir partout pour faire respecter la loi de la République et pour mieux protéger nos enfants.

M. le président. La parole est à Mme Aude Luquet.

Mme Aude Luquet. J'entends les projets et actes forts de l'État en matière de prévention et de sécurité. Néanmoins, les dispositifs se sont empilés, surtout dans les quartiers prioritaires. De nombreux investissements et financements ont été consentis depuis des années mais, malheureusement, la violence presque quotidienne n'a pas disparu.

Il est donc nécessaire d'évaluer les politiques publiques : quels sont les résultats des actions et financements passés au regard de ce qui arrive aujourd'hui ? Quant aux associations, elles prennent acte des financements mais attendent aussi une écoute, un échange avec les services de l'État et avec les maires. Les financements ne peuvent pas tout ; il faut aussi nouer un dialogue pour aider les associations à améliorer le quotidien des jeunes.

Données clés

Auteur : Mme Aude Luquet

Type de question : Question orale

Rubrique : Sécurité des biens et des personnes

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 janvier 2022

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