Formation des enseignants
Question de :
Mme Elsa Faucillon
Hauts-de-Seine (1re circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
Mme Elsa Faucillon attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur la formation des enseignants (réforme des Espé).
Réponse en séance, et publiée le 13 juin 2018
RÉFORME DU RECRUTEMENT DES ENSEIGNANTS
M. le président. La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour exposer sa question, n° 366, relative à la réforme du recrutement des enseignants.
Mme Elsa Faucillon. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, qui a récemment annoncé, à l'occasion de la sortie de son livre, que les futurs enseignants seraient bientôt recrutés par des épreuves d'admissibilité en fin de troisième année de licence – L3.
Peut-être sait-il que l'ensemble des représentants des écoles supérieures du professorat et de l'éducation – ESPE – sont vent debout contre cette mesure qui pourrait conduire à remettre en question le statut des professeurs stagiaires. En effet, si l'admissibilité est déconnectée de l'admission, les étudiants, n'étant pas titulaires du concours, ne bénéficieront pas du statut de fonctionnaire stagiaire. Les néo-stagiaires passeront donc de l'actuelle rémunération de 1 400 euros par mois à une rémunération de 400 euros en première année de master et de 900 euros en deuxième année. Il est important de préciser que 54 % des candidats sont aujourd'hui en reconversion professionnelle.
Le ministre défend cette mesure comme une manière de fluidifier la fonction publique en diversifiant les profils des enseignants. Mais on voit bien qu’elle ajoutera de la précarité et amputera la formation d'un bon nombre de candidats.
Nous considérons que ce concours en fin de L3 ne serait envisageable que s'il était suivi, pour les deux degrés, de deux années de formation effective, sous statut d'élève professeur ouvrant droit à un vrai salaire. Si tel n'était pas le cas, ce serait l'introduction dans l'éducation nationale de la logique d'abaissement du coût du travail. Et cela ne ferait qu'achever le processus de défonctionnarisation de l'éducation nationale, malheureusement déjà engagé.
Le ministre aime prôner la confiance à l'école : le corps enseignant aimerait donc savoir, et a le droit de savoir, quel sera le calendrier de cette réforme et quelle méthode de concertation sera adoptée.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.
Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d'État auprès de la ministre des armées. Madame la députée, je vous prie d'excuser M. Blanquer, qui assiste au conseil des ministres et qui m'a demandé de vous répondre.
Les deux ministères en charge de ce dossier, le ministère de l'éducation nationale et le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, s'accordent sur l'objectif d'amélioration de la formation des enseignants, dans le but d'élever des compétences scolaires des élèves.
Cinq ans après leur mise en œuvre, il est naturel d'évaluer les conséquences des transformations opérées à la suite de la loi du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République, qui instaurait l'organisation de la formation initiale des enseignants dans le cadre d'un diplôme national de master dédié aux métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation, et en confiait la mise en œuvre aux ESPE, composantes des universités.
Construire l'école de la confiance implique de recruter des professeurs capables d'incarner et de transmettre les valeurs républicaines comme les savoirs qui sont la condition de la réussite de nos élèves.
La mastérisation fixe un niveau d'exigence cohérent qui peut être atteint selon des modalités différentes. L'adaptation de la formation initiale des enseignants implique de combiner les contraintes de l'État employeur et celles qui sont liées au mécanisme de formation relevant du cadre universitaire qui conduit au diplôme national de master.
Les directions générales chargées de l'enseignement scolaire, des ressources humaines et de l'enseignement supérieur ont donc engagé des travaux conjoints, en lien avec la Conférence des présidents d'université – CPU – et le réseau des ESPE, afin de répondre à ces attentes.
Parallèlement, une mission vient d'être confiée à Mme Ronzeau, qui appartient à l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, et à M. Saint-Girons, ancien recteur et ancien président de la CPU. Elle se penchera sur d'éventuelles modifications à apporter à la formation initiale et au développement professionnel continu à l'entrée dans le métier d'enseignant.
Dans ce contexte, compte tenu du niveau d'exigence en termes de qualité de formation et d'accompagnement attendu des ESPE, cette mission s'interrogera aussi sur la façon dont les écoles professionnelles que doivent être les ESPE répondent au besoin de l'employeur, en vue d'une amélioration continue de la formation des enseignants.
Les différents acteurs doivent chercher à atteindre l'objectif partagé par tous, notamment en allégeant les structures pour mettre l'ensemble des énergies au service de l'acquisition des compétences des futurs enseignants.
L'ensemble des réflexions en cours se traduiront, si nécessaire, par une évolution des textes réglementaires pour une mise en œuvre rénovée de la formation et des ESPE à partir de la rentrée 2019.
M. le président. La parole est à Mme Elsa Faucillon.
Mme Elsa Faucillon. Merci, madame la secrétaire d'État, de cette réponse assez précise, qui apporte un début d'éléments au moins sur le calendrier. Si une mission est confiée à des experts, ce qui peut être une bonne chose, je reste en attente sur la méthode de concertation : le corps enseignant ne semble pas aujourd'hui pris en considération. Tous ceux qui enseignent aujourd'hui dans les ESPE souhaitent, comme le Gouvernement, un meilleur niveau de compétences, et militent d'ailleurs eux aussi pour un pré-recrutement – mais cela ne peut pas se faire en abaissant le coût du travail et en cassant, comme tant d'autres mesures du Gouvernement, la fonction publique.
Auteur : Mme Elsa Faucillon
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère répondant : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 juin 2018