Fin du financement des caméras-piétons pour les polices municipales
Question de :
M. Bruno Bilde
Pas-de-Calais (12e circonscription) - Non inscrit
M. Bruno Bilde interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur une circulaire du ministère de l'intérieur en date du 3 mai 2018 qui est venue préciser les orientations pour l'emploi des crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance, le FIPD, pour l'année 2018. Il y figure une mention qui a retenu son attention, et a surtout provoqué la très forte inquiétude d'agents de police municipale et de leurs représentants syndicaux, s'agissant de l'utilisation et du financement des caméras-piétons par les dits agents. Cette mention est la suivante : « L'usage des caméras individuelles permettant l'enregistrement audio-visuel des interventions des polices municipales était prévu à titre expérimental pour 2 années par l'article 114 de la loi n° 2016 - 731 du 3 juin 2016. Il ne sera plus possible à compter du 4 juin 2018, et il n'y a donc plus lieu de financer ce type d'équipements jusqu'à nouvel ordre ». La non-reconduction de l'usage de ces caméras est un nouvel affaiblissement porté aux agents de police municipale qui font un travail exemplaire et difficile aux quatre coins du pays. Utilisées avec précaution, elles permettent à la suite d'interventions d'appréhender bien plus facilement les auteurs d'actes délictuels et criminels. Enlever cet équipement aux polices municipales, c'est compliquer encore un peu plus le travail d'enquête post-intervention et c'est permettre à nouveau à la racaille d'invectiver, de menacer, d'agresser les fonctionnaires de police municipale avec comme seul élément à charge la parole de l'agent. Tout cela est symptomatique des contraintes constantes imposées aux agents de police nationale, comme territoriale, alors même que la présomption de légitime défense est devenue, d'année en année, une présomption de culpabilité avec un renversement de la charge de la preuve proprement scandaleux. De même, on peut noter que le FIPD se désengage de quasiment tous les investissements en matière de vidéoprotection. Au moment où l'État ne prend toujours pas les mesures adéquates d'un point de vue sécuritaire, judiciaire et pénal, il coupe littéralement les vivres aux collectivités pour financer leurs politiques de sécurité. Il lui demande donc si l'on doit comprendre que les villes qui ne sont plus en mesure de financer directement leur sécurité verront leurs citoyens et les policiers en charge de leur protection livrés aux délinquants et aux criminels.
Réponse en séance, et publiée le 13 juin 2018
FINANCEMENT DE LA VIDÉOPROTECTION
M. le président. La parole est à M. Bruno Bilde, pour exposer sa question, n° 395, relative au financement de la vidéoprotection.
M. Bruno Bilde. Madame la secrétaire d’État auprès de la ministre des armées, une circulaire du ministère l'intérieur en date du 3 mai 2018 précise : « L'usage des caméras individuelles permettant l'enregistrement audiovisuel des interventions des polices municipales était prévu à titre expérimental pour deux années. Il ne sera plus possible à compter du 4 juin 2018, et il n'y a donc plus lieu de financer ce type d'équipements jusqu'à nouvel ordre. »
M. le ministre Collomb a récemment déclaré que nous entrions dans le temps de l'évaluation, après la période d'expérimentation. Or la non-reconduction de l'usage de ces caméras serait un nouvel affaiblissement porté aux agents de police municipale, qui font un travail exemplaire et difficile aux quatre coins du pays. Utilisées avec précaution, elles permettent, à la suite d'interventions, d'appréhender bien plus facilement les auteurs d'actes délictuels et criminels.
Enlever cet équipement aux polices municipales, c'est compliquer encore un peu plus le travail d'enquête post-intervention et c'est permettre de nouveau à des individus d'invectiver, de menacer et d'agresser les fonctionnaires de police municipale avec comme seul élément à charge la parole de l'agent. Cette situation est symptomatique des contraintes constantes imposées aux agents de police, alors même que la présomption de légitime défense est devenue, d'année en année, une présomption de culpabilité. En outre, notons que le FIPD – fonds interministériel de prévention de la délinquance – se désengage de quasiment tous les investissements en matière de vidéoprotection.
Au moment où l'État ne prend toujours pas les mesures adéquates d'un point de vue sécuritaire, judiciaire et pénal, il coupe littéralement les vivres aux collectivités locales pour financer leurs politiques de sécurité. Doit-on comprendre que les villes qui ne sont plus en mesure de financer directement leur sécurité verront leurs citoyens livrés à la délinquance ? Ne serait-il pas pertinent de reconduire l'autorisation de l'expérimentation le temps des débats parlementaires, alors que les polices municipales seront particulièrement mobilisées cet été ?
Pourquoi abaisser le financement de la vidéoprotection alors que les risques d'attentats n'ont jamais été aussi réels ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.
Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d'État auprès de la ministre des armées. Monsieur le député, l'expérimentation des caméras-piétons par les polices municipales prévoyait qu'un rapport devait être adressé trois mois avant la fin de l'expérimentation par les communes s'étant engagées dans cette voie, afin de prendre des dispositions permettant éventuellement de pérenniser cet usage. Les rapports des élus sont remontés tardivement, ce qui a retardé d’autant les mesures permettant d'envisager la pérennisation de la mise en œuvre de cet outil dans la continuité des échéances fixées initialement par la loi.
L'analyse de ces éléments vient d'être finalisée. Une proposition de loi déposée au Sénat le 5 juin 2018 pose le principe de l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique et prévoit une généralisation de ce dispositif en faveur des policiers municipaux. Les choses avancent donc.
Au sujet des aides relatives aux projets de vidéoprotection, il faut souligner que l'État concourt chaque année depuis 2007 à l'aide financière des collectivités pour l'installation de leurs projets de vidéoprotection, grâce au fonds interministériel de prévention de la délinquance, dont les orientations prévoient depuis cette date de dédier des crédits à cette politique.
Ces crédits sont cependant répartis chaque année en fonction de priorités identifiées. Or, depuis 2015, la priorité porte sur les actions de lutte contre la radicalisation, dans un contexte budgétaire parallèlement contraint. Ce contexte conduit à effectuer une sélection drastique des demandes de subventions présentées afin de prioriser les projets visant à équiper les territoires les plus fragiles. En 2018, ce dispositif sera reconduit et les décisions en ce domaine seront déconcentrées en direction des préfets de région, en concertation avec les préfets de département. Une adaptation territoriale en fonction des besoins de chacun est en effet plus logique.
Je souligne que, depuis la mobilisation du FIPD pour aider des projets de vidéoprotection, quelque 213 millions ont été versés à ce jour au titre de subventions, permettant l'installation de 49 353 caméras sur l'ensemble du territoire. Cet effort a donc permis un équipement en voie publique sans précédent.
M. le président. La parole est à M. Bruno Bilde.
M. Bruno Bilde. Je vous remercie de cette réponse, madame la secrétaire d'État. Je regrette que, s'agissant des caméras-piétons, aucun dispositif transitoire n'ait été prévu. Je regrette également que des villes importantes attendent depuis trois ans une subvention pour déployer la vidéoprotection. Elles n'ont jusqu'à présent reçu aucune réponse à leur demande.
Auteur : M. Bruno Bilde
Type de question : Question orale
Rubrique : Sécurité des biens et des personnes
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 juin 2018