Question orale n° 453 :
Présence du loup en Isère

15e Législature

Question de : Mme Élodie Jacquier-Laforge
Isère (9e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés

Mme Élodie Jacquier-Laforge interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les préoccupations de nombreux éleveurs de l'Isère quant à la présence du loup et ses conséquences sur leurs troupeaux. Ils restent particulièrement inquiets face aux pertes qu'ils doivent déplorer. Le loup est une espèce protégée et son retour sur le territoire français est une chance. On ne peut cependant ignorer les problèmes rencontrés par les éleveurs qui doivent déjà faire face à de nombreuses autres difficultés, liées à la crise sans précédent que rencontre l'agriculture dans son ensemble. Le plan loup 2018-2023 apporte des solutions, mais ses moyens sont limités. Des expérimentations pourraient également être effectuées et encouragées. C'est pourquoi elle lui demande ce que le Gouvernement compte concrètement et financièrement mettre en œuvre afin de concilier le respect de l'environnement et de sa biodiversité et le respect de l'activité des éleveurs et des terroirs.

Réponse en séance, et publiée le 12 décembre 2018

PRÉSENCE DU LOUP EN ISÈRE
Mme la présidente. La parole est à Mme Élodie Jacquier-Laforge, pour exposer sa question, n°  453, relative à la présence du loup en Isère.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. J'interpelle à nouveau le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire quant aux préoccupations de nombreux éleveurs de mon département de l'Isère, en raison de la présence du loup. Ils sont particulièrement inquiets compte tenu des pertes croissantes qu'ils doivent déplorer.

Le loup est une espèce protégée et son retour sur notre territoire est une chance. Il joue un rôle important dans la régulation des populations animales sauvages et participe au bon équilibre des écosystèmes. On ne peut cependant ignorer les problèmes rencontrés par les éleveurs, qui doivent déjà faire face à de nombreuses autres difficultés, liées à la crise sans précédent que rencontre le monde agricole dans son ensemble. Je me suis rendue à plusieurs reprises dans des exploitations : le désarroi est réel – je ne vous l'apprends pas, madame la secrétaire d'État.

L'activité pastorale est l'un des principaux piliers de l'économie montagnarde. Il s'agit non seulement d'une source de produits de proximité et de qualité, mais aussi d'un mode de gestion des milieux naturels. C'est une agriculture de qualité, artisanale, organisée selon des circuits courts, qui façonne les paysages au bénéfice d'autres activités économiques, comme le tourisme et les activités sportives, tel le ski. Elle joue également un rôle essentiel en matière de prévention des risques naturels – incendies, avalanches et glissements de terrain.

Le plan national d'actions 2018-2023 sur le loup et les activités d'élevage – dit « plan loup » – apporte des solutions, mais ses moyens sont limités. Compte tenu des spécificités de chaque territoire, plus d'expérimentations et d'actions devraient être menées et encouragées. Par exemple, le parc naturel régional du Vercors a lancé une concertation en mars 2018 impliquant les éleveurs et les acteurs concernés en vue de soutenir l'innovation en matière de mesures de protection ou d'effarouchement. Cette concertation repose sur trois axes : transmission et partage de l'information, des connaissances et des usages ; acquisition de connaissances ; protection des troupeaux et bon état de conservation du loup.

J'avais déjà appelé l'attention du prédécesseur de M. de Rugy sur l'initiative d'éleveurs qui expérimentent, depuis trois ans, l'introduction de vaches Hérens dans le massif du Vercors. Cette race de vache a la capacité de se défendre contre les loups, et pourrait être une solution : les cinq élevages de vaches Hérens du Vercors n'ont jamais subi d'attaque. Des solutions existent donc.

Quels moyens concrets, y compris financiers, le Gouvernement compte-t-il employer afin de concilier le respect de notre environnement et de sa biodiversité avec l'activité de nos éleveurs dans nos terroirs ?

La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État . Le nouveau plan national d'actions sur le loup et les activités d'élevage, qui a été publié il y a près d'un an, le 19 février 2018, prévoit plusieurs axes pour mieux réduire la prédation des loups sur les troupeaux domestiques.

Le programme de soutien du pastoralisme vise à améliorer la protection des troupeaux. Il prévoit le financement à 80 % des mesures de protection et la création d'un observatoire de ces mesures, afin d'évaluer leur efficacité et de tester des expérimentations visant à les renforcer. Il prévoit, en outre, la création d'équipe de bergers mobiles pour aider les éleveurs en période d'attaque, la restauration des équipements pastoraux et l'approfondissement de la formation des bergers.

Le travail sur l'harmonisation de l'indemnisation des dommages dus aux grands prédateurs nous permettra de nous doter d'un cadre réglementaire conforme aux règles européennes, permettant de prendre en compte les pertes directes et les pertes indirectes.

Face à la persistance de la prédation dans certaines zones, malgré le déploiement des mesures de protection, la politique d'intervention sur les loups a été modifiée pour donner la priorité à la défense des troupeaux. Les éleveurs ont ainsi obtenu un droit de défense permanent de leurs troupeaux : les tirs de défense à proximité des troupeaux peuvent être effectués toute l'année. Par ailleurs, des tirs de prélèvements peuvent être réalisés de septembre à décembre dans les zones où le nombre de prédations constatées depuis le début de l'année est élevé.

Les crédits nécessaires ont été ouverts dès cet été pour permettre les premières expérimentations de bergers mobiles dans les parcs nationaux. Le ministère chargé de l'agriculture a créé un groupe de travail sur la qualité de la filière des chiens de protection ; le réseau se met en place progressivement.

Afin d'épauler les éleveurs dans la réalisation des tirs de défense renforcée, la brigade nationale « loup » de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage a été pérennisée. Elle a pour mission de contribuer à la formation des louvetiers, qui interviennent de plus en plus sur le terrain. Un budget de 142 000 euros a été débloqué pour les louvetiers afin de couvrir leurs indemnités kilométriques et de leur fournir un matériel adapté.

Le plan loup prévoit, par ailleurs, une gestion plus proche du terrain et tend à renforcer le rôle du préfet coordonnateur, préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes.

Enfin, trois études, portant respectivement sur l'éthologie du loup, sur le pastoralisme face à la prédation et sur les pertes indirectes causées par les attaques de loup, seront lancées en 2019 ; elles seront soumises à la validation d'un conseil scientifique, en cours de constitution, qui veillera à leur qualité. Les projets d'expérimentations pour 2019 seront recensés et soumis à ce conseil.

La dynamique ainsi lancée par le Gouvernement permettra, non seulement de soutenir les éleveurs confrontés à la prédation, mais également d'optimiser l'action des différents acteurs présents sur le terrain.

M. le président. La parole est à Mme Élodie Jacquier-Laforge.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour ces éléments d'information. Vous avez bien compris le sens de ma question. Tous les territoires ne sont pas identiques : c'est pourquoi les acteurs qui se mobilisent, qui proposent des solutions adaptées et innovantes doivent être soutenus. Je note que vous recenserez, au cours de l'année 2019, ces initiatives ; j'espère que celle dont j'ai parlé, dans le massif du Vercors, aura toute votre attention.

Données clés

Auteur : Mme Élodie Jacquier-Laforge

Type de question : Question orale

Rubrique : Animaux

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire

Ministère répondant : Transition écologique et solidaire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 décembre 2018

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