Question orale n° 484 :
Réelle contractualisation pour le développement des jeunes communautés urbaines

15e Législature

Question de : M. Michel Vialay
Yvelines (8e circonscription) - Les Républicains

M. Michel Vialay attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur la loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, qui instaure une contractualisation entre l'État et les 322 collectivités territoriales locales et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dont le budget primitif est supérieur à 60 millions d'euros. Après avoir, dans un premier temps, rogné la dotation globale de fonctionnement, ces contrats imposés par l'État limitent la progression des seules dépenses de fonctionnement à un maximum de 1,2 %, inflation comprise, chaque année pendant trois ans, et ce taux peut, par ailleurs, être abaissé lors de modulations très technocratiques. Aucune disposition réaliste n'a été prise jusqu'alors par le Gouvernement pour inclure les jeunes EPCI dans le dispositif, qui sont traitées de la même manière que des communautés urbaines ayant un régime de croisière bien établi. Toute action autofinancée ou quasi autofinancée devient donc impossible, dès lors que l'on ne s'interroge que sur les dépenses. Cette disposition peut donc conduire les collectivités et EPCI à refuser, entre autres, les portages de financements européens, ainsi que ceux de la politique de la ville. Le refus d'analyser certains types de dépenses afin de les exclure, comme les intérêts de la dette ou la participation à des syndicats mixtes, dont l'objet même est de réaliser des équipements, est l'un des autres impacts de cette disposition. Pour exemple, première communauté urbaine de France avec 408 000 habitants au sein de 73 communes de tailles très hétérogènes, la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise, en pleine phase de création, voit donc même son taux d'évolution réduit à 1,05 % par an. Pourtant, son rôle d'aménageur du territoire est fondamental pour développer l'emploi et assurer un cadre de vie de qualité pour toutes les générations qui habitent ses communes membres, et ne devrait pas se voir ainsi stoppé dans son élan, privé de sa liberté d'action. Aussi, il est clair que la contractualisation n'a de contractuel que le nom puisque rien n'est négociable et interdit l'exercice normal des compétences qui sont dévolues aux collectivités et EPCI concernés. Cette situation amène à s'interroger sur la possibilité de financer et d'accompagner des projets identifiés comme emblématiques et stratégiques. Prendre en compte la spécificité des jeunes communautés urbaines dans une contractualisation réellement négociée est donc une nécessité. Par ailleurs, GPSEO porte des compétences plus larges que la somme des compétences des 6 communautés d'agglomérations dont elle est la fusion. Il lui est donc indispensable d'achever sa structuration pour que son organisation soit efficiente. Limiter sa capacité de recrutement lui interdira l'exercice de certaines compétences qui ne peuvent plus légalement être portées par les communes. Il souhaite donc savoir ce qu'elle prévoit afin de résoudre ce problème pernicieux.

Réponse en séance, et publiée le 19 décembre 2018

CONTRACTUALISATION RÉELLE POUR LE DÉVELOPPEMENT DES JEUNES COMMUNAUTÉS URBAINES
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Vialay, pour exposer sa question, n°  484, relative à une contractualisation réelle pour le développement des jeunes communautés urbaines.

M. Michel Vialay. Ma question entre complètement dans votre champ de compétence, monsieur le ministre chargé des collectivités territoriales.

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 a instauré une contractualisation entre l'État et les 322 collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – dont le budget primitif est supérieur à 60 millions d'euros. Après avoir rogné la dotation globale de fonctionnement, l'État limite, par ces contrats imposés, la progression des seules dépenses de fonctionnement à un maximum de 1,2 %, inflation comprise, chaque année pendant trois ans. Qui plus est, ce taux peut être abaissé lors de modulations très technocratiques.

Jusqu'à présent, le Gouvernement n'a pris aucune disposition réaliste pour inclure les jeunes EPCI dans le dispositif : ceux-ci sont traités de la même manière que des communautés urbaines dont le régime de croisière est déjà bien établi. Dans la mesure où l'on ne s'interroge que sur les dépenses, toute action autofinancée ou quasi autofinancée devient impossible, ce qui peut conduire les collectivités et EPCI à refuser, entre autres, le portage de financements européens ou de financements au titre de la politique de la ville.

Ce dispositif a une autre conséquence : le refus d'analyser certains types de dépenses en vue de les exclure, notamment les intérêts de la dette ou la participation à des syndicats mixtes, dont l'objet même est de réaliser des équipements. Dès lors, Grand Paris Seine et Oise, communauté urbaine en phase de création qui réunit soixante-treize communes très hétérogènes par leur taille et compte 408 000 habitants, ce qui en fait la première communauté urbaine de France, a vu le taux d'évolution de ses dépenses de fonctionnement réduit à 1,05 % par an. Pourtant, elle joue un rôle fondamental en matière d'aménagement du territoire, son objectif étant de développer l'emploi et d'assurer un cadre de vie de qualité à toutes les générations qui habitent ses communes membres. Elle ne devrait pas être stoppée ainsi dans son élan, ni privée de sa liberté d'action.

Il est clair que la contractualisation n'a de contractuel que le nom, puisque rien n'est négociable et que ce dispositif interdit l'exercice normal des compétences dévolues aux collectivités et EPCI concernés. Cette situation amène à s'interroger sur la possibilité de financer et d'accompagner des projets identifiés comme emblématiques et stratégiques. La communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise se demande ainsi comment financer les travaux en matière de mobilité pour accompagner l'arrivée d'Eole, les acquisitions foncières pour accompagner les projets structurants, l'aménagement de la sortie de l'A13 à Mantes-la-Jolie, les projets liés à la sortie de l'A13 à Orgeval ou encore les équipements liés à la rénovation urbaine.

Il est donc nécessaire de prendre en considération la spécificité des jeunes communautés urbaines dans le cadre d'une contractualisation réellement négociée. Par ailleurs, Grand Paris Seine et Oise, qui est issue de la fusion de six communautés d'agglomération, détient des compétences plus larges que la somme des compétences de ces six EPCI. Il lui est donc indispensable d'achever sa structuration pour que son organisation soit efficiente. La limitation de sa capacité de recrutement lui interdira d'exercer certaines compétences, qui ne peuvent pourtant plus, légalement, être du ressort des communes.

Que prévoyez-vous, monsieur le ministre, afin de résoudre ce problème pernicieux ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre chargé des collectivités territoriales.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Vous avez abordé plusieurs points dans votre question, monsieur le député.

D'abord, je défends la méthode. Nous avions d'ailleurs combattu tous les deux la méthode précédente, qui consistait à réduire de manière autoritaire la dotation globale de fonctionnement – DGF – pour l'intégralité des collectivités territoriales françaises, les plus petites comme les plus grandes. Désormais, la DGF ne diminue plus pour les plus petites collectivités, notamment les plus petites communes de votre circonscription, que je connais bien. La DGF peut bien évidemment diminuer si la commune perd de la population, par exemple, mais le concours global de l'État reste stable.

Par ailleurs, le Gouvernement a fait le choix de se concentrer sur les 322 collectivités les plus importantes, en leur demandant de limiter leurs dépenses – il ne s'agit pas d'une baisse de la DGF. Autrement, dit, on leur demande un effort, par précaution, pour des raisons, que nous pouvons tous comprendre, liées notamment à la situation financière de notre pays et au respect que l'on doit au contribuable, notamment au contribuable local.

S'agissant toujours de la méthode, nous avons retenu uniquement les dépenses de fonctionnement, et non celles d'investissement, ce qui est logique. En outre, nous n'avons pas imposé de choix, puisque les collectivités avaient la possibilité de contractualiser ou non. D'ailleurs, la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise – GPS&O –, que vous avez évoquée, a choisi de ne pas signer de contrat, ce qui montre bien qu'il y avait une forme de liberté. Dès lors, c'est le préfet qui a fixé le taux, par arrêté. Si l'on s'était engagé dans une démarche de contractualisation, des négociations auraient pu avoir lieu, ce qui aurait pu permettre, le cas échéant, de moduler le taux.

Ensuite, vous avez posé une question précise sur la possibilité d'un retraitement, c'est-à-dire, au fond, sur la capacité à s'adapter aux différentes situations, par exemple à celle d'une jeune communauté urbaine telle que GPS&O, que je connais bien. Oui, le retraitement sera possible, je profite de cette occasion pour le dire. Nous avons d'ailleurs commencé à procéder à un tel retraitement, par exemple en faveur des conseils départementaux qui doivent prendre en charge un grand nombre de mineurs non accompagnés, comme je l'ai indiqué à M. Pierre Bédier, président du conseil départemental des Yvelines et ancien secrétaire d'État.

Cala vaut d'ailleurs pour toutes les collectivités et les EPCI, qu'elles aient signé un contrat ou que le taux ait été fixé par arrêté. Les préfets seront amenés à examiner, cas par cas, les situations spécifiques qui peuvent donner lieu à un retraitement. À cet égard, il sera particulièrement intéressant d'étudier les implications d'Eole, que vous avez évoquées dans votre argumentation, compte tenu des marges de manœuvre financières que GPS&O doit dégager à ce titre.

Nous allons donc examiner les situations cas par cas, et je me tiens personnellement à la disposition des élus de GPS&O à cette fin. Si certains critères sont parfois technocratiques, le préfet des Yvelines n'a rien d'un technocrate ! À mon avis, il aura à cœur, à mes côtés, d'examiner ce qui peut être fait, avec l'ensemble des élus de GPS&O et avec vous, monsieur le député. Nous pourrions envisager, pourquoi pas, une négociation en vue d'une contractualisation, celle-ci n'étant pas encore intervenue jusqu'à présent. Tous les points que vous avez évoqués pourraient entrer dans le cadre de cette négociation.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Vialay.

M. Michel Vialay. Je prends note de ces évolutions. Comme vous pouvez l'imaginer, le taux de 1,05 % constitue une limitation considérable, compte tenu, d'une part, de l'effet du glissement vieillesse technicité et, d'autre part, des besoins en ingénierie, c'est-à-dire de la nécessité de recruter des collaborateurs à même de traiter les dossiers d'investissement. Il importe que la jeune communauté urbaine qu'est GPS&O puisse évoluer de façon normale.

Données clés

Auteur : M. Michel Vialay

Type de question : Question orale

Rubrique : Collectivités territoriales

Ministère interrogé : Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales

Ministère répondant : Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 11 décembre 2018

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