Privatisation partielle de l'aéroport Toulouse-Blagnac
Question de :
M. Jean-Luc Lagleize
Haute-Garonne (2e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés
M. Jean-Luc Lagleize interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur la privatisation partielle de l'aéroport de Toulouse-Blagnac. M. le député rappelle tout d'abord certains éléments de contexte. En avril 2015, l'État a cédé au consortium chinois CASIL Europe 49,99 % du capital qu'il possédait dans l'aéroport Toulouse-Blagnac et en a préservé 10,01 %. Les collectivités locales possèdent le reste du capital, à savoir 40 % détenus par la région Occitanie, le conseil départemental de la Haute-Garonne, Toulouse Métropole et la chambre de commerce et d'industrie de la Haute-Garonne. Au moment de cette vente, l'État a conclu un pacte d'actionnaires avec le nouvel acquéreur, pacte dont le contenu n'a d'ailleurs jamais été rendu public. C'est ce pacte qui intéresse M. le député car en dépit des parts possédées par les actionnaires locaux et la puissance publique, qui s'élèvent donc à 50,01 %, ce pacte particulier permet à CASIL Europe d'exercer le contrôle opérationnel de la société. Comme l'a souligné la Cour des comptes dans un rapport publié en novembre 2018, la privatisation demeure donc inaboutie et l'aéroport Toulouse-Blagnac reste dans la situation, ambiguë et instable, d'une entreprise dont le capital est majoritairement public, mais dont le contrôle appartient à l'actionnaire privé par l'effet du pacte d'actionnaires qu'il a conclu avec l'État. M. le ministre avait indiqué qu'il ne souhaitait pas exercer l'option de vente à CASIL Europe des 10,01 % du capital de l'aéroport Toulouse-Blagnac que l'État détient encore, option qui est exerçable jusqu'au 17 avril 2019. Lors d'une récente audition, la Cour des comptes a opposé à M. le député l'argument du secret des affaires à ses interrogations sur ce pacte d'actionnaires. Il cantonne donc ses questions aux seuls points suivants : premièrement, il lui demande quelles sont les caractéristiques de ce pacte d'actionnaires, en termes juridiques et de durée notamment ; deuxièmement, une fois la date du 17 avril 2019 passée, il lui demande s'il sera possible de céder les dernières parts détenues par l'État à un acquéreur public, semi-public ou privé qui souhaiterait les racheter ; troisièmement, le cas échéant, il lui demande ce qu'il adviendrait des obligations figurant dans ce pacte d'actionnaires.
Réponse en séance, et publiée le 19 décembre 2018
PRIVATISATION PARTIELLE DE L'AÉROPORT DE TOULOUSE-BLAGNAC
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Lagleize, pour exposer sa question, n° 489, relative à la privatisation partielle de l'aéroport de Toulouse-Blagnac.
M. Jean-Luc Lagleize. Ma question s'adressait à M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances, mais je suis ravi que ce soit vous qui formuliez la réponse, monsieur le secrétaire d'État chargé du numérique.
Permettez-moi tout d'abord de rappeler certains éléments de contexte. En avril 2015, l'État a cédé au consortium chinois Casil Europe 49,99 % du capital de l'aéroport de Toulouse-Blagnac. Il en a conservé 10,01 %, les 40 % restants étant détenus par les collectivités locales, à savoir la région Occitanie, le conseil départemental de la Haute-Garonne, Toulouse Métropole et la chambre de commerce et d'industrie de la Haute-Garonne.
Au moment de cette vente, l'État a conclu avec le nouvel acquéreur un pacte d'actionnaires, dont le contenu n'a jamais été rendu public. C'est ce pacte qui m'intéresse aujourd'hui. Bien que la puissance publique détienne 50,01 % des parts, ce pacte particulier permet à Casil Europe d'exercer le contrôle opérationnel de la société. Comme l'a souligné la Cour des comptes dans un rapport publié le mois dernier, la privatisation demeure donc inaboutie et l'aéroport de Toulouse-Blagnac reste dans une situation ambiguë et instable : il s'agit d'une entreprise dont le capital est majoritairement public mais dont le contrôle revient à l'actionnaire privé, par l'effet du pacte d'actionnaires qu'il a conclu avec l'État.
M. le ministre de l'économie et des finances avait lui-même indiqué qu'il ne souhaitait pas que l'État exerce l'option de vente à Casil Europe des 10,01 % du capital de l'aéroport de Toulouse-Blagnac qu'il détient encore, sachant qu'il peut exercer ladite option jusqu'au 17 avril 2019. Lors d'une audition récente, la Cour des comptes a opposé l'argument du secret des affaires à mes interrogations sur ce pacte d'actionnaires. Dont acte. Je m'en tiendrai donc aux seules questions suivantes. Premièrement, quelles sont les caractéristiques de ce pacte d'actionnaires du point de vue juridique et en matière de durée ? Deuxièmement, une fois la date du 17 avril 2019 passée, l'Etat pourra-t-il céder les dernières parts qu'il détient à un acquéreur public, semi-public ou privé qui souhaiterait les racheter ? Enfin, qu'adviendrait-il, dans ce cas, des obligations figurant dans le pacte d'actionnaires ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du numérique.
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État chargé du numérique. Bruno Le Maire ne pouvait pas être présent ce matin et m'a demandé de vous répondre, monsieur le député. Vous aviez déjà pu échanger avec lui à ce sujet.
En 2015, vous l'avez rappelé, l'État a cédé 49,99 % du capital de l'aéroport de Toulouse-Blagnac au consortium chinois Casil Europe. Il en a conservé 10,01 % et a perçu une prime de contrôle grâce à la conclusion d'un pacte d'actionnaires avec Casil Europe. Ce pacte, sur lequel porte votre question, est effectivement couvert par le secret des affaires. Il prévoit notamment des règles de gouvernance et de fonctionnement – ce qui est assez habituel –, des obligations de concertation sur des sujets stratégiques et les modalités d'une possible cession des 10,01 % détenus par l'État. Comme Bruno Le Maire l'a déjà indiqué, l'État n'a pas exercé son option de vente à Casil Europe, ce qu'il pouvait faire à partir du 17 avril 2018. Cette option au profit de Casil Europe n'a pas été renouvelée et ne sera pas exercée.
Quant à l'opportunité et aux modalités d'une éventuelle évolution de la participation de l'État, elles n'ont pas été complètement évaluées ; rien n'est donc arrêté en la matière. Je ne réponds donc que partiellement à votre deuxième question, mais nous pourrons y revenir dans les prochains mois.
Je tiens à rappeler que les investissements réalisés par l'aéroport depuis sa privatisation sont conformes au projet industriel qui avait mené à la signature du pacte d'actionnaires ; ils s'élèveront à 160 millions d'euros sur la période de 2017 à 2020. Les résultats de l'évaluation du trafic et de l'évaluation financière sont aujourd'hui satisfaisants : ils indiquent une gestion de niveau « adaptée » à « bonne ». En 2017, le trafic s'est accru de 14 % pour s'établir à 9,2 millions de passagers, et le chiffre d'affaires a augmenté de 18,5 % pour atteindre 142 millions d'euros. Les premiers résultats de 2018 confirment cette dynamique, malgré l'ouverture à proximité, au cours de l'été 2017, de la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux. La situation économique est donc meilleure, et la relation équilibrée.
Nous pourrons revenir dans quelques mois sur la question de l'opportunité et des modalités d'une éventuelle évolution de la participation de l'État.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Lagleize.
M. Jean-Luc Lagleize. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de votre demi-réponse, à laquelle je réagirai par une demi-remarque supplémentaire : si l'aéroport de Toulouse-Blagnac se porte bien, c'est avant tout grâce à Toulouse et à son attractivité.
Par ailleurs, ma question portait essentiellement sur l'éventuelle transférabilité, à un futur actionnaire, des obligations qui figurent dans le pacte conclu entre l'État et Casil Europe. Pour qu'un investisseur puisse éventuellement venir à la rencontre des représentants de l'État et leur faire part d'un projet pour Toulouse-Blagnac, encore faut-il qu'il sache à quoi il s'engage. Nos prochaines conversations porteront donc sur la question de la transférabilité.
Auteur : M. Jean-Luc Lagleize
Type de question : Question orale
Rubrique : Transports aériens
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 11 décembre 2018