Avenir de l'enseignement supérieur et de la recherche en Bourgogne-Franche-Comté
Question de :
M. Ian Boucard
Territoire de Belfort (1re circonscription) - Les Républicains
M. Ian Boucard alerte Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, sur le devenir de l'enseignement supérieur en Bourgogne-Franche-Comté. La loi du 22 juillet 2013, dite loi « Fioraso », imposait aux établissements d'enseignement supérieur de se regrouper. En Bourgogne-Franche-Comté, il a été choisi de créer la COMUE Université Bourgogne-Franche-Comté dont Nicolas Chaillet fut élu président. En décembre 2018, il décidait de démissionner avec l'ensemble de son équipe en raison d'un conflit de gouvernance déclenché par certains chefs d'établissement qui ont usé d'une stratégie de blocage au détriment de l'intérêt général. Pourtant, les premiers résultats de la COMUE-BFC sont prometteurs ce que les différents acteurs, dont le ministère, ont souligné. La politique portée dès 2016 était basée sur deux piliers : le développement de l'excellence, incarnée par ISITE-BFC et la coordination territoriale qui renvoie à l'aménagement et au développement des territoires. Or, dans le nouveau projet qui a déjà été présenté dans plusieurs conseils d'administration, il n'y a plus aucune référence aux pôles universitaires territoriaux et le nord Franche-Comté est à peine cité, alors que plus de 300 000 habitants y vivent et que des industries de pointe y sont implantées. Il est à redouter que soit mise en place une métropolisation de l'enseignement supérieur et de la recherche et ainsi une fusion des établissements avec comme capitale Dijon alors que le projet initial de la COMUE-BFC était de favoriser une organisation pluri-polaire, structurée à partir de pôles universitaires territoriaux. Ce projet initial étant soutenu par les acteurs et élus locaux. Aussi, il souhaite connaître la position du Gouvernement sur l'organisation de l'enseignement supérieur et de la recherche en Bourgogne-Franche-Comté et comment elle entend s'impliquer pour peser dans les arbitrages stratégiques qui doivent intervenir pour garantir le succès du projet ISITE-BFC, un maillage territorial juste et efficace et une bonne coordination des établissements.
Réponse en séance, et publiée le 6 mars 2019
ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR EN BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ
M. le président. La parole est à M. Ian Boucard, pour exposer sa question, n° 617, relative à l'enseignement supérieur en Bourgogne-Franche-Comté.
M. Ian Boucard. La loi, dite Fioraso, du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche imposait aux établissements d'enseignement supérieur de se regrouper. En Bourgogne-Franche-Comté, il a été choisi de créer une communauté d'universités et d'établissements, la COMUE-BFC, dont M. Nicolas Chaillet fut élu président en mars 2016. En décembre 2018, ce dernier démissionnait avec l'ensemble de son équipe de direction en raison d'un conflit de gouvernance déclenché par certains chefs d'établissement, auteurs d'une stratégie de blocage au détriment de l'intérêt général. Cette situation a déstabilisé l'ensemble de la communauté universitaire de notre région. Les premiers résultats étaient pourtant prometteurs, ce qui a été souligné par l'ensemble des acteurs, parmi lesquels le ministère. De nombreuses coopérations scientifiques ont vu le jour et la COMUE-BFC a été la seule à être lauréate de trois appels à projet successifs du PIA, le programme d'investissements d'avenir.
Dès l'origine a été menée une politique fondée sur deux piliers : d'une part, le développement de l'excellence, incarnée par l'ISITE-BFC – pour « initiatives science innovation territoire économie en Bourgogne-Franche-Comté » –, et, d'autre part, la coordination territoriale. Si le développement à moyen terme d'une grande université fédérale de recherche était inscrit dans le projet ISITE-BFC, le ministère n'a pas pris la responsabilité d'arbitrer contre les intérêts d'un ou deux chefs d'établissement qui n'ont pas tenu les engagements qu'ils avaient pris devant un jury international, chefs d'établissement auxquels vous avez d'ailleurs réclamé depuis un plan d'action sur ce projet.
S'agissant de la coordination territoriale, le nouveau projet présenté à plusieurs conseils d'administration, et qui devrait donc être soumis dans les prochaines semaines à Mme la ministre, ne comporte plus aucune référence aux pôles universitaires territoriaux. Le nord Franche-Comté y est à peine cité alors qu'il compte plus de 300 000 habitants et que des industries essentielles à notre région et à notre pays y sont implantées – je ne citerai qu'Alstom, General Electric, PSA, Faurecia ou encore LISI.
Dans le même temps, Dijon Métropole a jugé bon de lancer, partout dans la région, une campagne de communication sous la marque Just Dijon to study en se proclamant capitale universitaire de Bourgogne-Franche-Comté.
Je suis convaincu que l'union de nos territoires et de nos établissements supérieurs sera la clé du développement universitaire de notre région face à la compétition internationale, mais l'union est un combat qui vaut mieux que ces querelles de clocher, car la force de notre enseignement supérieur passera par des pôles forts, de Belfort à Nevers, de Chalon-sur-Saône à Besançon en passant évidemment par Dijon. L'autonomie des universités ne peut pas aboutir à ce type de dérives. L'État doit garder sa capacité stratégique et arbitrer lorsque les enjeux le nécessitent.
Aussi, je souhaite savoir si le Gouvernement s'apprête à défendre une métropolisation de l'enseignement supérieur et de la recherche et une fusion des établissements, avec Dijon comme capitale, ce que je ne peux pas croire, ou si, comme l'ensemble des acteurs et des élus locaux, Mme la ministre compte s'impliquer personnellement – et si oui, comment – pour favoriser une organisation de l'enseignement supérieur structurée à partir de pôles universitaires territoriaux, et garantir ainsi la réussite du projet ISITE-BFC et de l'enseignement supérieur et de la recherche dans la région Franche-Comté ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, retenue ailleurs, vous prie d'excuser son absence. Elle m'a prié de vous répondre.
Vous l'avez rappelé, le fonctionnement de la COMUE Bourgogne-Franche-Comté a été entravé ces dernières années par une accumulation de difficultés de gouvernance interne. Au-delà de cet enjeu important pour le devenir de ce site, votre question porte à la fois sur la consolidation de l'ISITE, mais également sur les équilibres territoriaux de l'offre de formation et de recherche dans l'ensemble de la région Bourgogne-Franche Comté – vous avez le souci du respect des équilibres territoriaux et de l'unité de la politique menée.
L'ISITE est articulé autour de trois axes d'excellences : matériaux avancés, ondes et systèmes intelligents ; territoires, environnement, aliments ; soins individualisés et intégrés. Ces trois axes ont vocation à être les éléments constitutifs d'une signature territoriale forte pour la COMUE, ouvrant ainsi la voie à une reconnaissance internationale de l'UBFC, l'université Bourgogne-Franche-Comté.
La construction de cette reconnaissance passe, pour le jury international des IDEX, les initiatives d'excellence, par plusieurs éléments clés, en particulier par le pilotage par l'UBFC de l'ensemble de la politique de recherche, et par un transfert effectif de postes des établissements vers la COMUE afin de porter cette ambition commune dans l'ensemble du territoire.
Entre les mois de juillet et de novembre derniers, le comité de pilotage de l'IDEX a regretté de constater les faibles évolutions allant dans le sens de la consolidation de l'ISITE. Cela a conduit Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, avec M. Guillaume Boudy, secrétaire général au grand plan d'investissement, au nom du comité de pilotage de l'IDEX, à demander par courrier, au mois de novembre dernier, la mise en place d'un plan d'action au sein de la COMUE afin de dessiner le chemin critique permettant de remplir les objectifs qui permettront de conforter l'ISITE dont bénéficie l'université. Mme Frédérique Vidal doit recevoir ce plan d'action à la fin du premier trimestre de 2019. Vous aurez donc l'occasion d'échanger sur ce sujet le moment venu avec la ministre.
S'agissant de la vie interne de la COMUE et des équilibres territoriaux propres à l'offre de recherche et de formation, le recteur de l'académie de Besançon, M. Jean-François Chanet, a nommé M. Luc Johann administrateur provisoire de la COMUE UBFC pour une période de six mois minimum. M. Johann, personnalité reconnue pour son expérience en tant qu'ancien recteur de la région académique des Hauts-de-France, est le président de l'université Paul Verlaine de Metz. La nouvelle gouvernance provisoire de la COMUE travaille à ce nouveau plan d'action dans un sens constructif.
S'agissant des enjeux territoriaux, un point d'équilibre a été trouvé permettant d'installer la COMUE, le CROUS et le rectorat à proximité immédiate de Besançon. Le Grand Besançon comme la région ont pris des engagements financiers significatifs à cet égard.
Rien n'indique à l'heure actuelle que cet équilibre aurait vocation à être bouleversé. Bien au contraire, il nous semble que l'État travaille à investir et à développer tous les pôles de la région Bourgogne-Franche-Comté. Cela s'est traduit récemment dans le cadre du pacte territorial pour l'avenir. Je tiens donc à vous rassurer, monsieur le député : ni la métropolisation excessive ni la remise en cause des équilibres territoriaux actuels ne constituent des objectifs pour le Gouvernement.
Auteur : M. Ian Boucard
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement supérieur
Ministère interrogé : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Ministère répondant : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 février 2019