Mise en œuvre de la réforme du baccalauréat sur les territoires
Question de :
Mme Zivka Park
Val-d'Oise (9e circonscription) - La République en Marche
Mme Zivka Park interroge M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la mise en œuvre de la réforme du baccalauréat. Le constat qui s'est imposé est que le baccalauréat était trop peu adapté aux ambitions de réussite pour la jeunesse. L'enseignement supérieur est marqué par un échec très important à l'université, avec 60 % des étudiants qui échouent à obtenir leur licence en trois ans et 25 % des jeunes actifs sont aujourd'hui au chômage. L'organisation du baccalauréat est également très complexe. Les Français sont très attachés au baccalauréat, véritable symbole républicain. La forme actuelle du diplôme n'est pas satisfaisante. Avec cette réforme, sur des territoires bouleversés par la crise actuelle, les acteurs du monde de l'éducation se posent des questions sur la place qui veut être donnée à ce diplôme, comme passerelle vers l'enseignement supérieur. Le système actuel demeure un système faussement égalitaire, qui ne résout pas la question des inégalités entre les établissements. À travers la réforme du baccalauréat, l'enjeu est désormais de préparer la réussite des étudiants dès le lycée. Il n'en reste pas moins qu'un certain nombre de questionnement demeure quant à la mise en œuvre de cette réforme. Il faut avoir à l'esprit que la génération qui va connaître la réforme du baccalauréat est la génération qui a déjà vécu la réforme du collège. Sur les territoires, le corps enseignant et les parents des lycéens redoutent un accroissement des inégalités, avec un risque de concurrence entre les lycées d'un même bassin, entre les disciplines et entre les personnels. Elle l'alerte sur la nécessité d'intégrer la notion de territoire dans les politiques éducatives, et de penser en réseau d'établissements pour organiser au mieux la carte des spécialités et la progression des programmes, et d'anticiper le frein à la mobilité dans les territoires.
Réponse en séance, et publiée le 27 mars 2019
RÉFORME DU BACCALAURÉAT SUR LES TERRITOIRES
M. le président. La parole est à Mme Zivka Park, pour exposer sa question, n° 640, relative à la réforme du baccalauréat sur les territoires.
Mme Zivka Park. Monsieur le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, je souhaite vous interroger sur la mise en œuvre de la réforme du baccalauréat.
Un constat s'est imposé : le baccalauréat est trop peu adapté aux ambitions de réussite que nourrit notre jeunesse. L'enseignement supérieur est marqué par un taux d'échec trop important, notamment à l'université – 60 % des étudiants échouent à obtenir leur licence en trois ans et 25 % des jeunes actifs sont au chômage. En outre, l'organisation du baccalauréat est très complexe.
Les Français sont très attachés au baccalauréat, véritable symbole républicain. Toutefois, la forme actuelle du diplôme n'est pas satisfaisante. Dans le cadre de la réforme, dans des territoires bouleversés par la crise, les acteurs du monde de l'éducation se posent des questions sur la place qu'il convient de lui donner, en tant que passerelle vers l'enseignement supérieur.
Le système en vigueur demeure faussement égalitaire. Il ne résout pas la question des inégalités entre les établissements. L'enjeu de la réforme du baccalauréat est de préparer la réussite des étudiants dès le lycée. Il n'en reste pas moins que plusieurs interrogations demeurent s'agissant de la mise en œuvre de la réforme.
Il faut conserver à l'esprit que la génération qui connaîtra la réforme du baccalauréat a déjà vécu celle du collège. Dans les territoires, le corps enseignant et les parents des lycéens redoutent un accroissement des inégalités, en raison du risque de concurrence entre les lycées d'un même bassin, entre les disciplines et entre les personnels.
Monsieur le ministre, comment comptez-vous intégrer la notion de territoire dans les politiques éducatives ? Comment penser en réseaux d'établissements, afin d'organiser au mieux la carte des spécialités et la progression des programmes en vue d'anticiper le frein à la mobilité dans les territoires ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Madame Park, votre question est très importante. Dans le débat public en cours, on entend beaucoup d'affirmations partiellement fausses à ce sujet.
Comme vous le savez, la réforme du baccalauréat – qui comporte une réforme des lycées général et technologique comme de la voie professionnelle – a pour objectif non seulement l'élévation du niveau général, mais aussi la justice sociale, laquelle est aussi un enjeu de justice territoriale.
Il s'agit d'un enjeu de justice sociale, car l'objectif est justement de lever les prédéterminations. Par exemple, j'entends parfois dire que le nouveau système rendra l'orientation plus précoce qu'elle n'était précédemment. C'est totalement faux, c'est même le contraire.
Dans le système ayant prévalu jusqu'à présent, l'orientation était assez précoce. On devait choisir, en fin de seconde, entre l'une des trois voies d'enseignement général. Le plus souvent, si on ne choisissait pas la voie S, on se fermait plusieurs portes, notamment celles des études scientifiques.
Nous instaurons un système permettant au contraire de se déterminer en fonction d'un choix de spécialités bien plus vaste. N'oublions pas que le premier gain pour l'élève – de seconde, en l'occurrence –, si on le compare aux générations antérieures, est d'avoir un plus grand nombre de choix, ce qui est un vecteur d'équité.
Il s'agira en général d'une trentaine de combinaisons, parfois d'une vingtaine, en tout état de cause bien plus nombreuses que les trois combinaisons toutes faites d'aujourd'hui. Cette liberté est un vecteur d'égalité – c'est un fait.
L'implantation territoriale des spécialités a également fait l'objet de nombreux fantasmes. Il suffit, pour s'en rendre compte, de comparer les discours que certains tenaient aux mois de novembre et décembre et, juste avant les vacances de Noël, l'implantation territoriale des spécialités.
Chacun a constaté que la promesse était tenue. Nous avons fait preuve d'une volonté de justice territoriale, reposant sur une implantation, que je qualifierai de surcompensatoire, des spécialités attractives dans les établissements qui doivent gagner en attractivité.
Les statistiques le confirment. À l'heure actuelle, seuls 84 % des lycées publics offrent les enseignements des trois séries L, ES et S. Je n'entendais personne, soit dit en passant, s'émouvoir au sujet des 16 % de lycées publics qui ne les offraient pas.
Désormais, 92 % des lycées publics proposent au moins sept enseignements de spécialité. C'est donc un progrès au regard des trois voies préexistantes. Les 8 % d'établissements restants sont des lycées très petits, et non des lycées très défavorisés – ce n'est pas la même chose.
Par ailleurs, le nouveau lycée enrichit l'offre d'enseignement des établissements où sont scolarisés les élèves socialement les plus défavorisés. À l'heure actuelle, 82 % des lycées publics les plus défavorisés offrent les enseignements des trois séries L, ES et S. Désormais, 88 % des établissements de cette catégorie dispensent au moins sept enseignements de spécialité.
À l'évidence, l'existence d'une diversité de parcours est un enrichissement. À l'heure actuelle, certains élèves n'ont pas accès aux enseignements proposés dans la série qu'ils choisissent. Les défauts que l'on prête au futur système sont en réalité ceux du passé, que nous avons réussi à atténuer.
Ainsi, dans la voie générale, les enseignements artistiques approfondis ne sont accessibles qu'aux seuls élèves de la série L, soit 10,7 % des élèves de la voie générale en 2017. À la rentrée 2019, tous les élèves pourront choisir parmi les enseignements proposés dans leur établissement. Les enseignements de spécialité artistique, par exemple, sont proposés dans 43,8 % des lycées publics.
Les rectorats ont adopté une vision territoriale doublée d'une exigence d'équité, afin que, grâce à la mise en place de réseaux d'établissements, les élèves puissent bénéficier de cours dispensés dans un autre établissement que le leur si nécessaire.
Quoi qu'il en soit, l'offre est plus riche établissement par établissement. On peut en prendre plusieurs exemples. À l'heure actuelle, l'enseignement du latin ou du grec est proposé dans 12 % des lycées publics ; l'enseignement de spécialité « Littérature et langues et cultures de l'Antiquité » sera proposé dans 24 % des lycées publics, soit un doublement de cette proportion.
En outre, dans 74 % des établissements publics, les élèves pourront choisir de suivre l'enseignement optionnel de langues et cultures de l'Antiquité. Il s'agit d'un progrès considérable, salué comme tel par les spécialistes du sujet.
S'agissant de l'enseignement de l'informatique, seuls 3,5 % des élèves l'étudient au lycée. Dans la nouvelle configuration, 53 % des établissements publics proposeront l'enseignement de spécialité « Numérique et sciences informatiques ». Le progrès sera donc indéniable. Voilà, me semble-t-il, ce qu'il faut d'abord noter s'agissant de la réforme du lycée.
M. le président. La parole est à Mme Zivka Park.
Mme Zivka Park. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. J'ai rapidement contacté le directeur académique des services de l'éducation nationale – DASEN – du Val-d'Oise, qui m'a pleinement rassurée à ce sujet. Hormis trois lycées du département, celui-ci sera couvert par tous les enseignements de spécialité.
S'agissant de la neuvième circonscription du Val-d'Oise, si toutes les options ne sont pas enseignées dans chaque lycée, elles ont été réparties en fonction de la distance entre lycées, afin d'éviter que ceux-ci ne soient mis en concurrence. Il faudra demeurer vigilant.
Auteur : Mme Zivka Park
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement secondaire
Ministère interrogé : Éducation nationale et jeunesse
Ministère répondant : Éducation nationale et jeunesse
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 mars 2019