Conséquences de la mise en application de l'article 67 loi finance sécu sociale
Question de :
M. André Chassaigne
Puy-de-Dôme (5e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. André Chassaigne interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les conséquences de la mise en application de l'article 67 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 qui a profondément modifié les conditions de prise en charge des patients dans le cadre des transports sanitaires. En effet, les risques encourus par les petites entreprises de taxi, maillon indispensable aux territoires ruraux, sont grands et peuvent amener à terme à la disparition de ces structures. Dans la réponse à sa question écrite du 13 novembre 2018, la ministre indiquait avoir décidé de marquer une pause dans la mise en œuvre de cette réforme. Or les petites entreprises concernées se disent toujours très inquiètes des conséquences des conventions qu'elles ont été contraintes de signer avec les caisses primaires d'assurance maladie locales. En effet, sous peine de ne plus avoir d'activité suffisante et d'être contraintes à la liquidation, elles ont dû valider des conditions de prise en charge des patients particulièrement rigoureuses, avec une forte augmentation des remises effectuées. Cette situation mettra à mal leur trésorerie, déjà fragile, d'autant plus qu'elles vont également être confrontées aux appels d'offres des groupements hospitaliers de territoire (GHT), fondés seulement sur le coût et ne prenant pas en compte la relation avec les patients qu'ils conduisent régulièrement, pour des actes de chimiothérapie, de dialyse, etc. Aussi, il lui demande des actions concrètes afin de stopper ces mesures visant à éradiquer les petites entreprises de transports sanitaires.
Réponse en séance, et publiée le 3 avril 2019
PRISE EN CHARGE DES TRANSPORTS SANITAIRES
M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour exposer sa question, n° 667, relative aux nouvelles conditions de prise en charge des transports sanitaires.
M. André Chassaigne. Ma question porte sur les conséquences de l'application de l'article 67 de la loi de financement de la sécurité sociale de 2018, qui a profondément modifié les conditions de prise en charge des transports sanitaires. Cette réforme fait courir de grands risques aux petites entreprises de taxi, maillon indispensable aux territoires ruraux ; elle peut entraîner, à terme, la disparition de ces structures. Les artisans de nos campagnes sont catastrophés et, si vous me permettez l'expression, très remontés.
Dans sa réponse à ma question écrite du 13 novembre 2018, Mme la ministre des solidarités et de la santé m'indique avoir décidé de « marquer une pause dans la mise en œuvre de cette réforme ». Or les petites entreprises concernées se disent toujours très inquiètes des conséquences des conventions qu'elles ont été contraintes de signer, le pistolet sur la tempe, avec les caisses primaires d'assurance maladie locales.
Sous peine de ne plus avoir d'activité suffisante et d'être contraintes à la liquidation, elles ont dû valider des conditions de prise en charge des patients particulièrement rigoureuses, avec une forte augmentation des remises effectuées. Cette situation mettra à mal leur trésorerie, déjà fragile ; certains ont déjà dû interrompre leur activité. De plus, ces petites entreprises devront répondre aux appels d'offres des groupements hospitaliers de territoire – GHT –, dont le seul critère sera le coût, au détriment de la relation des conducteurs de taxis avec les patients qu'ils conduisent régulièrement, pour des actes de chimiothérapie, de dialyse… Or on sait qu'une grande proximité se construit dans ces moments-là.
Quelles actions concrètes le Gouvernement entend-il mener afin de stopper ces mesures visant de fait à éradiquer les petites entreprises de transport sanitaire ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Permettez-moi de vous rassurer d'emblée : l'action du Gouvernement en matière de transport de patients ne vise pas à éradiquer telle ou telle catégorie d'acteurs, transporteurs sanitaires ou taxis conventionnés avec l'assurance maladie.
Tout d'abord, la réforme de l'article 80 de la loi de financement de la sécurité sociale de 2017 a pour objet de confier aux établissements de santé l'organisation et le financement d'une partie des transports qu'ils prescrivent, une partie réduite mais essentielle, c'est-à-dire les transports entre plusieurs sites ou établissements différents de patients déjà hospitalisés. L'amélioration du parcours de soins de ces derniers suppose que les établissements de santé se voient confier une nouvelle responsabilité, et c'est le sens de cette réforme.
Pour autant, nous ne sous-estimons pas les difficultés rencontrées dans l'organisation de ces parcours. C'est la raison pour laquelle Mme la ministre des solidarités et de la santé a annoncé une pause dans le déploiement de la réforme, afin d'y apporter des améliorations en concertation avec les représentants des intéressés.
Les petites entreprises ne sont pas exclues de cette activité ; elles seront, au contraire, accompagnées pour s'adapter à cette évolution de leur environnement, et en particulier pour répondre à des appels d'offres organisés par des établissements de santé.
Par ailleurs, vous mentionnez un autre sujet, celui des conventions entre taxis et caisses primaires. Les évolutions conventionnelles en cours visent à maîtriser l'évolution des dépenses de l'assurance maladie ; elles résultent d'une action concertée avec les représentants des taxis, retranscrite dans un protocole d'accord signé le 12 novembre dernier. Il s'agit, pour permettre une meilleure régulation de ces dépenses, de proposer à la profession des taxis un équilibre économique dans un contexte où le transport de malades représente une part significative de leur activité, tout en garantissant le caractère soutenable de ces prises en charge pour le système de santé.
M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.
M. André Chassaigne. Merci de cette réponse claire et précise.
Néanmoins, il faut comprendre que les concertations sur le transport sanitaire qui se déroulent au niveau national ont lieu avec les grandes compagnies, et que celles-ci se livrent à un lobbying extrême pour récupérer la totalité de ce marché. Sur le terrain, les petits artisans locaux rendent un service indispensable, mais leur équilibre financier est très précaire. Et la réalité, c'est que les caisses primaires d'assurance maladie, en particulier, doivent absolument limiter les coûts, et que dans ces conditions, les petits artisans locaux ne peuvent pas répondre aux appels d'offres.
De la même façon, les groupements hospitaliers de territoire, comme ils l'ont fait pour nombre d'autres marchés, vont lancer des appels d'offres ; mais seules les grandes compagnies de taxi et de transport sanitaire pourront y répondre.
Auteur : M. André Chassaigne
Type de question : Question orale
Rubrique : Sécurité sociale
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mars 2019