Meilleure prise en charge cancer du sein
Question de :
M. Jean-Paul Lecoq
Seine-Maritime (8e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Jean-Paul Lecoq interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l'ampleur des frais de santé et des frais de dispositifs médicaux restant à la charge des patientes atteintes d'un cancer du sein.
Réponse en séance, et publiée le 11 décembre 2019
PRISE EN CHARGE DES FRAIS LIÉS AU CANCER DU SEIN
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour exposer sa question, n° 826, relative à la prise en charge des frais liés au cancer du sein.
M. Jean-Paul Lecoq. Près de 60 000 cancers du sein – cancer le plus fréquent chez la femme – sont diagnostiqués chaque année dans notre pays. Malgré d’extraordinaires progrès, les traitements pour prévenir la récidive sont très lourds et provoquent de nombreux effets secondaires.
Fort heureusement, il existe des dispositifs médicaux et non médicaux permettant aux femmes de pallier ces effets, comme des perruques, des prothèses ou du maquillage spécifique. Cependant, si la prise en charge de la maladie en tant que telle est correcte, l’accès à ces dispositifs médicaux et non médicaux est limité, puisqu'ils ne sont pas pris intégralement en charge par la sécurité sociale.
L’aide à la lutte contre la maladie dépend donc de la complémentaire santé de la patiente et de son niveau de ressources. Depuis le 1er avril 2019, les perruques en fibres synthétiques sont remboursées à hauteur de 350 euros au maximum, et le remboursement des perruques en fibres naturelles est restreint à 250 euros pour un prix de vente maximal de 700 euros ; aucun remboursement n’est prévu au-delà de ce plafond. Or le prix d'une perruque en cheveux naturels varie entre 800 euros et 2 000 euros.
La perruque naturelle n’est en rien une coquetterie. Elle répond à un besoin réel. En outre, leur qualité et leur durée de vie sont largement supérieures aux perruques synthétiques. Le crâne, mis à rude épreuve par les chimiothérapies, supporte difficilement les perruques synthétiques bas de gamme.
D'autre part, certains traitements postprotocole, à prendre pendant une durée pouvant aller jusqu’à dix ans, entraînent des effets secondaires, comme des infections à répétition, des sécheresses intimes, des problèmes articulaires, des bouffées de chaleur, une prise de poids ou encore des migraines. Ainsi, au choc lié à l’ablation d’un ou deux seins, s’ajoutent, dans de nombreux cas, de multiples désagréments physiques, entraînant un risque élevé de perte d’estime de soi des patientes.
Il existe là encore des solutions, mais aucune d'elles n’est remboursée. Un gel contre la sécheresse intime coûte entre 10 euros et 15 euros, un ovule contre les infections vaginales entre 3 euros et 5 euros. L’atrophie vaginale liée à une ménopause provoquée par l’hormonothérapie peut être soignée par laser, mais la séance coûte environ 300 euros, non remboursés par la sécurité sociale.
Cet état de fait constitue une inégalité face à la maladie et limite la solidarité nationale aux dispositifs bas de gamme, comme le dénonce, parmi d'autres acteurs, la Ligue contre le cancer.
Madame la secrétaire d'État, les frais de santé restant à la charge des patientes atteintes du cancer du sein sont trop importants. Les dispositifs médicaux et non médicaux doivent être mieux remboursés. Or il n’appartient pas au législateur de le décider, puisque cela relève du règlement et de la direction de la sécurité sociale.
Comment le Gouvernement compte-t-il améliorer ces remboursements et permettre aux femmes atteintes d’un cancer du sein de mieux lutter au quotidien contre la maladie ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Les frais de santé et ceux liés aux dispositifs médicaux qui restent à la charge des patientes atteintes d'un cancer du sein sont une préoccupation que nous partageons. Votre question me donne l'occasion de dresser un état des lieux de la prise en charge.
Tout comme l'ensemble des traitements du cancer du sein ou la prise en charge thérapeutique des séquelles, la reconstruction mammaire est prise en charge à 100 %, dans le cadre de l'affection de longue durée, sur la base du tarif de l'assurance maladie. Toutefois, il est vrai que cette exonération ne couvre pas les éventuels dépassements d'honoraires, ni la participation forfaitaire ou le forfait journalier hospitalier.
Il est donc indispensable que les patientes en soient informées avant de faire leur choix, notamment dans le cas où l'établissement pratique des dépassements d'honoraires. Le chirurgien doit proposer un devis détaillé avant l'intervention.
Plusieurs mesures ont été prises, dans le cadre du plan cancer 2014-2019, pour améliorer l'accès de toutes les femmes à la reconstruction mammaire après un cancer du sein, en agissant sur le reste à charge, d'un montant parfois élevé, qui pèse sur les malades et crée des inégalités.
De nouvelles techniques reconnues de reconstruction mammaire ont été inscrites dans la nomenclature des actes. Les tarifs de remboursement de six actes de reconstruction mammaire ont été revalorisés de 23 % entre 2013 et 2015. Depuis juin 2014, l'assurance maladie prend également en charge les actes de symétrisation mammaire quand ils sont réalisés après un traitement du cancer du sein par chirurgie. S'agissant des dispositifs médicaux, les prothèses mammaires internes sont prises en charge à 100 %.
Enfin, les alternatives à la reconstruction par prothèses mammaires internes sont elles aussi prises en charge, par exemple l'utilisation de tissus provenant d'autres parties du corps. La reconstruction du sein par lambeau a été intégrée au panier de soins remboursé par l'assurance maladie, dans la suite du plan cancer. Le tarif de responsabilité des prothèses mammaires externes est passé de 158 % à 244 % et a été assorti d'un prix limite de vente, permettant de limiter le reste à charge des patientes.
Plus largement, vous avez évoqué nombre d'autres prises en charge de la plus haute importance pour la vie quotidienne des patientes. Nous y travaillons dans le cadre du plan cancer. En outre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 comporte une mesure attendue par beaucoup de patientes : la prise en charge post-cancer, qui inclura un accompagnement physique et psychologique et donnera accès à d'autres dispositifs. Ceux-ci constitueront une avancée majeure dans le quotidien des patientes, afin de leur permettre d'aller mieux dans ce contexte de santé très particulier auquel nous continuons de porter la plus grande attention.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.
M. Jean-Paul Lecoq. Madame la secrétaire d'État, votre réponse portait sur un sujet que je n'ai pas vraiment abordé ; je ne vous en blâme pas, car ce sujet est important. En revanche, vous n'avez guère répondu à mes interrogations concernant tout ce qui peut paraître accessoire aux institutions, mais qui est loin de l'être pour les personnes et améliorerait réellement leurs conditions de vie, leur dignité, leur bien-être.
Je vous propose donc, avant que vous-même me le proposiez, de vous envoyer l'ensemble des éléments afin que vous puissiez me donner une réponse étayée et travaillée, voire prendre des décisions dans le cadre du budget de la sécurité sociale.
Auteur : M. Jean-Paul Lecoq
Type de question : Question orale
Rubrique : Maladies
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 décembre 2019