Frais bancaires
Question de :
M. Emmanuel Maquet
Somme (3e circonscription) - Les Républicains
M. Emmanuel Maquet attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les frais bancaires. Il y a un an, les banques s'engageaient à geler leurs frais en 2019 et à plafonner à 25 euros par mois les frais d'incidents bancaires pour les clients les plus fragiles. Dernièrement, le magazine « 60 Millions de consommateurs » et l'Unaf ont révélé que beaucoup de clients en difficulté ne bénéficiaient pas de ce plafonnement. Le Gouvernement a indiqué qu'un plafonnement de ces frais ne serait pas la solution la plus efficace, car les banques pourraient compenser en augmentant d'autres frais. Toutefois, les frais bancaires sont très variés et certains sont plus injustes que d'autres : si les frais de tenue de compte ou les frais de carte bleue concernent tous les clients, d'autres, comme les agios ou les frais de rejet de chèque, sont une sanction supplémentaire et souvent surprise pour des clients déjà en difficulté. Les frais correspondent à une prestation de régularisation d'incident, même si le client ne sait pas qu'il déclenche cette intervention et qu'il ne le souhaite pas. Au-delà d'un encadrement qui serait inefficace, il souhaite donc connaître ses intentions pour améliorer l'information des consommateurs avant le déclenchement de tels frais, éventuellement précédé d'un blocage de l'opération. Il souhaite également connaître ses prévisions quant à la hausse généralisée des frais bancaires, eu égard à la baisse des taux et donc de la rentabilité des banques.
Réponse en séance, et publiée le 11 décembre 2019
FRAIS BANCAIRES
Mme la présidente. La parole est à M. Emmanuel Maquet, pour exposer sa question, n° 842, relative aux frais bancaires.
M. Emmanuel Maquet. Voici un an, les banques s'engageaient à geler les frais bancaires en 2019 et à plafonner à 25 euros par mois les frais d'incidents pour les clients les plus fragiles financièrement.
Tandis que la durée de validité de cet engagement touche à sa fin, une enquête conjointe du magazine 60 millions de consommateurs et de l'Union nationale des associations familiales – UNAF – a révélé que de nombreux clients en difficulté n'en ont jamais profité. Déjà, les grilles tarifaires des principales banques prévoient une reprise généralisée de la hausse des frais.
Le Gouvernement estime que leur plafonnement réglementaire ne constitue pas la solution la plus efficace, car les banques pourraient en compenser les effets en augmentant d'autres frais. Or c'est justement en pareil cas que les Français attendent des décisions politiques.
Les frais bancaires présentent une forte diversité, et certains sont plus injustes que d'autres. Si tout le monde est logé à la même enseigne s'agissant des frais de tenue de compte et des frais de carte bleue, d'autres frais, tels que les agios et les frais de rejet de chèque, constituent une sanction supplémentaire infligée à ceux qui sont déjà en difficulté.
Bien souvent, ces frais particulièrement punitifs sont imputés sans que les clients en aient conscience. L'enjeu est donc d'améliorer la prévention. Il serait normal que les banques préviennent leurs clients avant de satisfaire une demande susceptible de déclencher des pénalités, quitte à mettre en attente l'opération concernée.
Monsieur le secrétaire d'État, ma question est la suivante : dans un contexte de baisse durable des taux d'intérêt, le Gouvernement prévoit-il une hausse non moins durable des frais bancaires ? Si tel est le cas, comment le Gouvernement compte-t-il les rendre plus simples, plus compréhensibles et surtout plus équitables ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du numérique.
M. Cédric O, secrétaire d'État chargé du numérique. Monsieur Maquet, je vous remercie de votre question, qui me permet d'apporter certaines précisions au sujet des frais bancaires, en présentant notamment le bilan du plafonnement des frais d'incidents – annoncé au mois de décembre dernier par les établissements bancaires – pour les 3,4 millions de Français considérés comme fragiles.
Au cours du premier semestre de cette année, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – ACPR – et l'Observatoire de l'inclusion bancaire – OIB – ont mené auprès des principaux établissements de la place des contrôles ayant permis de constater que le plafonnement des frais d'incidents a bien été appliqué par les banques. Ceux-ci se sont élevés, pour les personnes financièrement fragiles qui en paient, à 17 euros par mois en moyenne.
Simultanément, 58 000 clients supplémentaires – soit 435 000 au total à la fin du mois de juin 2019 – ont bénéficié de l'offre spécifique et de son effet protecteur, avec des frais d'incidents s'élevant en moyenne à 8 euros par mois, soit un chiffre significativement inférieur au plafond de 20 euros par mois.
En fin de compte, plus d'un million de personnes ont constaté un plafonnement de leurs frais bancaires depuis les engagements pris au mois de décembre 2018. Il me semble que nous devons nous réjouir de ce bilan, même s'il demeure insuffisant.
Il ne doit pas occulter le fait que la mise en œuvre technique des engagements pris par les banques a parfois entraîné des frictions transitoires, s'agissant notamment de l'application automatique du plafonnement des frais d'incidents à certains clients et du remboursement de frais excédant le plafond prélevés lorsque les établissements bancaires travaillaient à la mise en œuvre de leurs engagements. Ces difficultés devraient être rapidement résorbées.
Nous attendons également des établissements bancaires qu'ils poursuivent leurs efforts visant à renforcer la détection des clients en situation de fragilité financière. À cet égard, les travaux menés au sein de l'OIB nous semblent particulièrement importants.
L'information sur les frais bancaires a été significativement renforcée au cours des dernières années. C'est pourquoi le Gouvernement a préféré mettre l'accent sur la limitation effective des frais d'incidents et le renforcement de la détection des situations de fragilité financière par les banques. La conjonction de ces actions permettra de soulager nos concitoyens les plus en difficulté.
Enfin, je rappelle que les banques ont respecté l'autre engagement qu'elles ont pris auprès du Président de la République voici un an, relatif au gel des tarifs bancaires pour 2019. En tout état de cause, nous devons être particulièrement attentifs à la situation globale du secteur bancaire, dans le contexte de taux bas, voire négatifs, que nous connaissons. Pour l'heure, nous estimons que rien ne laisse présager une hausse généralisée des frais bancaires, qui ont été – contrairement aux frais induits par d'autres services – relativement contenus au cours des dernières années.
Mme la présidente. La parole est à M. Emmanuel Maquet.
M. Emmanuel Maquet. Monsieur le secrétaire d'État, l'enquête menée par le magazine 60 millions de consommateurs et l'UNAF n'incite pas à partager votre optimisme. On y apprend que 78 % des clients interdits bancaires et surendettés n'ont bénéficié d'aucun plafonnement des frais d'incidents. Quant aux autres clients à faibles revenus, habitués aux incidents bancaires, 91 % d'entre eux ont vu leurs frais afférents excéder 25 euros par mois.
À présent, la durée de validité de l'engagement pris l'an dernier touche à sa fin. Que fait-on ? Quand mettra-t-on de l'ordre dans la jungle des frais bancaires, que leur diversité rend incompréhensibles ?
Auteur : M. Emmanuel Maquet
Type de question : Question orale
Rubrique : Banques et établissements financiers
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 décembre 2019