Défrichement
Question de :
M. Pierre Morel-À-L'Huissier
Lozère (1re circonscription) - UDI, Agir et Indépendants
M. Pierre Morel-À-L'Huissier appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la réglementation des défrichements en vue de la reconquête d'anciens terrains agricoles et plus particulièrement sur la compensation. Afin de tendre vers l'autonomie fourragère des exploitations agricoles, l'ouverture des milieux et la remise en valeur d'anciens terrains de culture, pacage ou d'alpages envahis par une végétation spontanée peuvent être des réponses. L'alinéa premier de l'article L. 341-6 du code forestier stipule notamment que la compensation financière ou le reboisement suite à un défrichement repose sur la règle du 1 pour 1. Cela correspond pour un hectare de terrain défriché à un hectare de terrain reboisé ou au versement d'une indemnité minimale de 4 000 euros par hectare. Ce montant est calculé sur la base d'un coût de plantation d'un hectare et non sur la valeur du bois récolté. Dans le département de la Lozère, de nombreux bois sont issus d'une végétation spontanée suite à une déprise agricole et la valeur de vente du bois est de l'ordre de 1 000 à 1 500 euros par hectare. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer dans quelle mesure, à titre expérimental dans un premier temps, la valeur du bois récolté pourrait être prise en compte dans le calcul du montant de la compensation suite à un défrichement dans le département de la Lozère.
Réponse en séance, et publiée le 11 décembre 2019
DÉFRICHEMENT EN LOZÈRE
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Morel-À-L'Huissier, pour exposer sa question, n° 854, relative au défrichement en Lozère.
M. Pierre Morel-À-L'Huissier. Rappelons, sans entrer dans les détails, que le département de la Lozère a subi au cours du siècle dernier un fort exode rural et une importante baisse de sa population active, notamment agricole. Il compte de nos jours 76 000 habitants, et présente une densité de quinze habitants au kilomètre carré, qui tombe à deux dans les Causses. Les éleveurs lozériens comptent parmi leurs préoccupations la possibilité de nourrir leur cheptel en toute saison.
L’objectif est donc de tendre vers une autonomie fourragère, et la remise en valeur d’anciens terrains de culture, de pacages ou d’alpages envahis par une végétation spontanée peut à cet égard constituer une réponse.
En vertu du premier alinéa de l’article L. 341-6 du code forestier, la compensation financière ou le reboisement, à la suite d'un défrichement, repose sur la règle du 1 pour 1 : pour chaque hectare de terrain défriché, il faut reboiser 1 hectare de terrain – ce qui est très difficile dans le département de la Lozère – ou verser une indemnité minimale de 4 000 euros. Ce montant est calculé sur la base du coût de plantation d’un hectare et non sur la valeur du bois récolté. Celui-ci est identique pour toute la France mais tous les terrains français le sont-ils ? On ne peut pas comparer 1 hectare de forêt des Landes avec 1 hectare de forêt en Lozère.
Dans le département de la Lozère, de nombreuses forêts sont issues d’une végétation spontanée et le bois est vendu entre 1 000 à 1 500 euros par hectare, bien loin des 4 000 euros d’indemnité.
Les services de l’État en Lozère ont proposé une expérimentation visant à intégrer dans le calcul de l'indemnité la valeur du boisement défriché, à laquelle serait appliqué un coefficient multiplicateur pour tenir compte de sa valeur environnementale. La Lozère se porte volontaire pour cette expérimentation. Êtes-vous disposé à accompagner cette initiative locale ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Je vous prie de bien vouloir excuser le ministre de l’agriculture et de l’alimentation qui ne peut pas être présent ce matin.
Votre question porte sur le calcul de la compensation des défrichements. Aujourd’hui, le montant est calculé sur la base d’un coût de plantation. Vous proposez, à titre expérimental, de calculer la compensation en fonction de la valeur du bois récolté.
Permettez-moi de revenir sur la situation actuelle : la compensation des défrichements répond à l'enjeu d'intérêt général qu'est la protection des forêts compte tenu des services économiques, climatiques, écologiques et sociaux qu'elle rend à la société. Aussi, la compensation vise à restaurer les fonctions supprimées par le défrichement, en prescrivant prioritairement des travaux d'amélioration des peuplements forestiers existants. Elle doit donc porter, au minimum, sur une surface équivalente à celle qui a été perdue.
La compensation financière sous forme d'indemnité constitue une solution alternative dans le cas où les porteurs d’un projet de défrichement ne peuvent ou ne veulent pas compenser par des travaux en nature. Par souci d'équivalence, la compensation financière est calculée en fonction des coûts d'un boisement ou d'un reboisement d'une surface au moins équivalente, assortis d’un coefficient multiplicateur selon la valeur économique, climatique et écologique de la forêt objet du défrichement.
Vous l’aurez compris, une compensation financière fondée uniquement sur le prix des bois récoltés ne permettrait pas de garantir une capacité suffisante de boisement ou reboisement, ni la compensation des services économiques, climatiques, écologiques et sociaux disparus avec le défrichement.
C'est pourquoi il ne nous apparaît pas opportun de lancer une expérimentation en ce sens.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Morel-À-L'Huissier.
M. Pierre Morel-À-L'Huissier. Votre réponse est assez décevante. Venez en Lozère pour voir la réalité : la forêt a pris la place de terrains autrefois cultivés. Alors que la chambre d'agriculture cherche des terrains pour installer des jeunes exploitants, votre refus de l'expérimentation est bien regrettable pour le département.
Auteur : M. Pierre Morel-À-L'Huissier
Type de question : Question orale
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 décembre 2019