Question orale n° 89 :
Attractivité du territoire et difficultés financières des casinos du Calvados

15e Législature

Question de : M. Christophe Blanchet
Calvados (4e circonscription) - La République en Marche

M. Christophe Blanchet alerte M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation des casinos du Calvados. Certains traversent en effet une phase difficile, sortant juste de plusieurs années de vache maigre. Or la reprise du tourisme au niveau national, et dans la circonscription en particulier, ne profite que peu aux casinos. Si les plus gros d'entre eux survivent tant bien que mal, les plus petits connaissent une situation financière de réelle précarité qui peut s'apparenter à celle des éleveurs, qui travaillent toute l'année sans parvenir à se verser de salaire. La réalité des casinotiers est bien différente de l'image préconçue qu'en ont les Français : il s'agit avant tout d'hommes et de femmes qui exercent une profession extrêmement réglementée pour offrir un divertissement de qualité aux citoyens, et non de lieux de perdition brassant des millions d'argent sale. Après la récente publication du rapport d'information sur la mise en œuvre des conclusions du rapport d'information du 8 février 2017 sur l'évaluation de la régulation des jeux d'argent et de hasard du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques, il lui demande quelle sont les pistes de réflexion du Gouvernement pour améliorer le sort des casinos.

Réponse en séance, et publiée le 24 janvier 2018

SITUATION DES CASINOS DU CALVADOS
M. le président. La parole est à M. Christophe Blanchet, pour exposer sa question, n°  89, relative à la situation des casinos du Calvados.

M. Christophe Blanchet. Madame la secrétaire d'État, on compte en France 200 casinos, qui génèrent 15 000 emplois directs et 30 000 emplois indirects ou saisonniers, pour l'essentiel rémunérés à un niveau tout juste supérieur aux minima sociaux. Ils rapportent 1,2 milliard d'euros de prélèvements par an, dont 60 % pour l'État, 21 % pour les communes et 19 % pour les affaires sociales.

Cette importante filière sort à peine d'une période de régression de plus de dix ans. Son produit brut a baissé de plus de 25 % en raison des effets conjugués de la crise économique, de l'application de la loi antitabac, du contrôle d'identité aux entrées et de l'essor des jeux en ligne et des jeux clandestins.

Le produit brut des jeux – 2,2 milliards d'euros, en hausse de 2,5 % l'année passée – ne doit pas masquer le fait que plus de cent casinos ont un chiffre d'affaires inférieur à 8 millions d'euros, avec une moyenne de dix emplois pour 1 million d'euros. Le chiffre d'affaires des sept casinos de ma circonscription a progressé cette année, mais au prix du sacrifice d'embauches ou d'investissements. L'augmentation de la CSG pour tous, que nous avons votée, aura elle aussi des conséquences directes sur les comptes de ces établissements, pour plus de 20 millions d'euros selon les estimations.

Or les casinos contribuent pour une grande part à l'activité et à l'attractivité touristique du territoire, et représentent une ressource budgétaire indéniable pour les communes où ils se trouvent.

Quelles mesures prendre pour accompagner le fort investissement dont ils ont besoin, eux qui sont aussi financeurs du tourisme, lequel est une priorité gouvernementale ?

Par ailleurs, ces acteurs économiques souffrent silencieusement dans leur gestion du quotidien, car l'image de leur activité fait les frais de clichés venus d'une époque révolue. Ils ont pris l'habitude d'être déconsidérés auprès du grand public, de quelques politiques, mais aussi de certaines administrations. Pourtant, les conditions d'exploitation de ces entreprises sont officiellement scrutées, vérifiées, au moyen de procédures qui mériteraient aussi d'être revues. Un casinotier est avant tout une personne morale, un commerçant déclaré ; mais il est trop souvent vu comme un délinquant potentiel et subit une présomption de culpabilité.

Au titre de la protection du jeu, des joueurs et de la lutte contre le blanchiment d'argent, les pouvoirs publics et Tracfin demandent aux casinotiers de faire preuve d'une vigilance plus qu'accrue. Leur sens civique les y pousse naturellement. Mais dans quel cadre le peuvent-ils, et avec quel accompagnement des services de l'État ?

Madame la secrétaire d'État, c'est toute une profession qui espère des marques de considération, une profession qui n'a de cesse de donner des gages de son civisme, de son sens des responsabilités, de son souci de l'intérêt public en coopérant avec tous les services de l'État, et qui peine pourtant à être considérée comme un partenaire. Les casinos veulent relever ces défis, mais avec les pouvoirs publics pour partenaires. Comment renouer le contact ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Monsieur le député, au-delà du contexte propre au département du Calvados, lié à la présence de nombreux établissements de jeux dans une zone géographique restreinte, il ne faut pas nier les difficultés que vous constatez, notamment eu égard à la concurrence des jeux en ligne. Je me permettrai toutefois de signaler que dans trois des huit établissements du Calvados, qui ne sont pas forcément les plus importants, le produit brut des jeux a augmenté entre 2015 et 2016 – date des derniers chiffres connus de mes services. Mais il faut assurément étudier les moyens de remédier à ces difficultés.

À cet égard, plusieurs recommandations peuvent être soutenues.

Premièrement, nous devons travailler à renforcer le lien entre les acteurs du tourisme et les exploitants des casinos. En effet, tous les casinos sont exploités au sein de stations classées de tourisme et ces établissements constituent, pour certaines clientèles, des lieux d'attraction importants : au-delà de la pratique des jeux, les clients s'y rendent également pour s'y restaurer et s'y divertir grâce aux spectacles proposés, et la qualité de ces dernières prestations dépend aussi, notamment pour le choix et la promotion de la programmation, de l'ingénierie apportée localement par les offices de tourisme.

Deuxièmement, les mesures de simplification annoncées lors du conseil interministériel du tourisme du 19 janvier dernier concernant les stations classées fourniront le cadre de réflexion adapté pour encourager la diversification des activités des casinos et inciter à leur faire une plus grande place dans la politique locale du tourisme.

Enfin, il me semblerait souhaitable que le ministère chargé du tourisme puisse retrouver son siège au sein de la commission consultative des jeux de cercle et de casinos, qui décide des ouvertures et des renouvellements des autorisations d'exploitation, pour que les arguments en faveur du tourisme y soient à nouveau défendus.

M. le président. La parole est à M. Christophe Blanchet.

M. Christophe Blanchet. Merci, madame la secrétaire d'État, de votre réponse claire et précise. En ce qui concerne la situation spécifique du Calvados, je l'avais déjà évoquée dans ma question.

Je suis chef d'entreprise depuis vingt-cinq ans. Ce que les casinos réclament, c'est de pouvoir passer plus de temps avec leurs clients qu'à effectuer des démarches administratives. C'est aussi le sens de notre engagement pour la simplification administrative et pour le droit à l'erreur.

Données clés

Auteur : M. Christophe Blanchet

Type de question : Question orale

Rubrique : Jeux et paris

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 janvier 2018

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