Attentats aux moeurs
Question de :
M. Colombier Georges
- UDF
Reponse. - La preoccupation manifestee par l'honorable parlementaire de voir figurer dans la loi des sanctions dissuasives a l'egard des auteurs de sevices sexuels exerces sur des mineurs est pleinement partagee par le garde des sceaux. Il releve cependant que l'eventail des peines prevues en la matiere par le code penal a ete etabli en tenant compte, precisement, de la necessite d'assurer la protection de l'enfance. Ainsi le viol, qui est normalement puni de dix ans de reclusion criminelle, est-il considere comme aggrave et puni d'une peine de vingt ans de reclusion criminelle s'il est commis soit sur un mineur de quinze ans, soit par un ascendant legitime, naturel ou adoptif de la victime ou par une personne ayant autorite sur elle. L'attentat a la pudeur sur un mineur de quinze ans est, quant a lui, puni de cinq ans d'emprisonnement lorsqu'il est commis sans violence, contrainte ni surprise, et de dix ans d'emprisonnement lorsqu'il est commis soit avec l'une de ces circonstances, soit par un ascendant legitime, naturel ou adoptif de la victime ou par une personne ayant autorite sur elle. L'attentat a la pudeur commis avec violence, contrainte ou surprise sur un mineur de plus de quinze ans est puni d'une peine de cinq ans d'emprisonnement ; la peine encourue est portee au double si l'auteur des faits est un ascendant legitime, naturel ou adoptif de la victime ou une personne ayant autorite sur elle. De la meme maniere, les penalites prevues pour les coups et blessures volontaires se trouvent aggravees lorsque la victime est un mineur de quinze ans. On ne saurait donc raisonnablement parler, meme si la plupart de ces infractions constituent effectivement des delits, d'une insuffisance des penalites prevues par la loi, celles-ci s'inscrivant dans la coherence de l'echelle des peines definies par le code penal. L'insuffisance de la repression qui a pu etre parfois relevee peut en fait tenir, dans cette matiere delicate, a la difficulte de rassembler d'autres preuves que les temoignages de la victime ou de ses proches, souvent d'ailleurs reticents a deposer devant la justice. Les services de police, comme les magistrats, sont bien entendu sensibilises aux difficultes particulieres inherentes a la conduite de ce type de procedures. Le garde des sceaux n'ignore pas, par ailleurs, que la loi no 82-683 du 4 aout 1982, en abrogeant le second alinea de l'article 331 du code penal, a supprime l'incrimination des actes impudiques ou contre nature commis a l'egard d'un mineur du meme sexe. Le Parlement avait en 1982 considere cette disposition comme discriminatoire a l'encontre des homosexuels, susceptibles d'etre poursuivis dans tous les cas, alors que les relations heterosexuelles librement consenties ne tombaient sous le coup de la loi que lorsqu'elles concernaient des mineurs de moins de quinze ans. Il convient toutefois de rappeler que plusieurs textes repressifs permettent, a l'heure actuelle, de proteger les jeunes adolescents qui se trouvent en danger moral : il s'agit notamment, independamment de celles evoquees ci-dessus, des incriminations de proxenetisme, d'incitation de mineurs a la debauche ou le detournement de mineur. En presence de cet ensemble de dispositions repressives, ainsi que des diverses mesures prises par les ministeres concernes chacun dans son domaine propre pour assurer la protection de la jeunesse, le retablissement de l'incrimination prevue par le deuxieme alinea de l'article 331 du code penal n'apparait pas indispensable en l'etat. Il est d'ailleurs a noter que les poursuites exercees du seul chef d'infraction a l'article 331, alinea 2, du code penal etaient devenues extemement rares : au nombre d'une cinquantaine en 1980 comme en 1981, ces poursuites avaient entraine, pour chacune de ces annees, une trentaine de decisions de condamnation sur l'ensemble du territoire national. En defintive, le garde des sceaux considere que la fermete des requisitions des parquets qu'il encourage dans ce domaine comme sur les autres fronts de la delinquance depuis deux ans, ainsi que, de facon preventive, le developpement des actions entreprises a son initiative pour renforcer la protection de la jeunesse en danger, constituent les moyens les mieux adaptes pour lutter avec efficacite contre la multiplication des faits denonces par l'honorable parlementaire.
Auteur : M. Colombier Georges
Type de question : Question écrite
Rubrique : Delinquance et criminalite
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 23 novembre 1987
Réponse publiée le 18 avril 1988