Question écrite n° 12309 :
Entreprises

9e Législature

Question de : M. d'Aubert Fran�ois
- Union pour la démocratie française

M Francois d'Aubert attire l'attention de M le ministre d'Etat, ministre de l'economie, des finances et du budget, sur les faits suivants : en decembre 1988, la societe Pathe a ete rachetee par la societe Max Theret investissement (MTI) pour une somme de 950 millions de francs. Cette operation d'une ampleur considerable pour le secteur audiovisuel n'a pu se realiser que grace a un pret de 480 millions de francs octroye par le Credit lyonnais Bank Nederland (CLBN), filiale a pres de 100 p 100 du Credit lyonnais, banque nationalisee, dont la tutelle est assuree par le ministere des finances. En realite, cette operation a ete menee au profit de M Gian Carlo Parretti, qui est devenu, en fait, le proprietaire de Pathe : I - 1o N'y-a-t'il pas lieu de s'inquieter de l'ampleur des engagements financiers pris par la filiale hollandaise du Credit lyonnais dans le cinema, quand on constate qu'elle semble accorder de preference ses prets aux producteurs independants americains, et parmi ceux-ci a des societes qui connaissent de graves difficultes financieres ou une grande fragilite ? D'apres M Brutschi (interview dans Le Monde du 9 fevrier 1989), president du directoire du CLBN, ces engagements representeraient 700 millions de dollars par an. Les garanties obtenues par le CLBN aupres de ses emprunteurs ont-elles ete dans le passe suffisantes pour eviter des pertes pour la banque ? 2o Dans quelles conditions exactes le CLBN a-t-il ete amene a octroyer un pret de 480 millions de Francs a MTI ? A quel taux, pour quelle duree, et surtout avec quelles garanties ? D'apres M Briffault, membre du directoire du CLBN (interview dans Le Monde du 9 fevrier 1989), ces fonds auraient ete pretes « a MTI, via M Parretti, qui a organise le tour de table ». S'il s'agit en realite d'un pret a M Parretti, quelles garanties celui-ci a-t-il apportees ? S'il s'agit de titres deposes en garantie, a quelle(s) societe(s) correspondent-ils, quelles valeurs representent-ils au 1er avril 1989 ? 3o Pour quelles raisons le CLBN est-il devenu apparemment l'un des financiers principaux - sinon principal - des activites audiovisuelles de M Parretti, comme le suggere (voir article dans la revue Variety du 12 avril 1989) l'existence des lettres de credit que le CLBN lui aurait accordees pour diverses acquisitions ou tentatives d'acquisition aux Etats-Unis, notamment pour les societes Dino de Laurentis et New World ? Pour cette derniere societe, l'engagement du Credit lyonnais aurait represente un montant de 138 millions de dollars si l'operation s'etait realisee. Ces engagements financiers du CLBN ne representent-ils pas un risque considerable pour la banque, compte tenu de la reputation controversee de M Parretti, ainsi que des antecedants facheux de la banque Slavensburg, rachetee par le Credit lyonnais en 1980 et devenue depuis le CLBN ? Est-il normal pour un banque nationalisee comme le Credit lyonnais de continuer a autoriser sa filiale hollandaise a accorder des credits aussi risques a une personnalite aussi contestee que M Parretti, alors que l'assainissement de l'ex-banque Slavensburg a deja coute plusieurs milliards de francs ces dernieres annees ? L'accroissement important des provisions pour risque du Credit lyonnais en 1988 est-il lie aux operations menees par sa filiale hollandaise ? 4o Compte tenu du montant important du credit accorde a M Parretti pour le rachat de Pathe, il parait impossible que le conseil d'administration du Credit lyonnais n'ait pas ete informe a temps, c'est-a-dire au prealable, de cette operation qui etait suivie de tres pres par les pouvoirs publics et en particulier par M le ministre de la culture. Quelles ont ete les instructions donnees par le ministere des finances a ses representants au conseil d'administration du Credit lyonnais ? Quel avis ont-ils exprime et cet avis a-t-il ete suivi ? 5o Le rachat de Pathe s'est deroule dans des conditions de non-transparence qui ont frappe beaucoup d'observateurs. Elles concernent en particulier la composition exacte du capital de MT Investissement, dont les actionnaires connus apparaissent a l'evidence comme des prete-noms, ou comme des filiales de societes appartenant a la nebuleuse « Interpart », societe de droit luxembourgeois dont M Parretti est l'animateur, ou encore a la societe Sasea, dont le siege est en Suisse. Il est apparu a certains observateurs que le montage financier mis en place pour le rachat de Pathe aurait ete en fait destine a « franciser » une operation dans laquelle les interets non communautaires (par l'intermediaire de la Sasea ou de ses tres nombreuses filiales) representeraient directement ou indirectement plus de 20 p 100 du capital. Cette « francisation » aurait permis d'eviter la presentation du dossier de rachat de Pathe devant le comite des investissements etrangers. Ce comite a-t-il eu officieusement connaissance du dossier ? Une enquete approfondie a-t-elle ete menee par l'un des services du ministere des finances pour connaitre l'origine exacte des capitaux de MTI et de M Gian Carlo Parretti ? II. - M Parretti declare avoir de grandes ambitions europeennes pour Pathe. Les professionnels du cinema craignent a juste titre que cette politique se fasse au detriment des interets du cinema francais et de la creation audiovisuelle. Les diverses aventures financieres de M Parretti dans un passe recent, comme les interrogations qui subsistent sur l'origine d'une partie de ses fonds, devraient inciter a la plus grande prudence les etablissements bancaires - surtout s'il s'agit de banques nationalisees ou de leurs filiales meme etrangeres - dans leurs relations avec lui. M Parretti prevoit maintenant une augmentation tres importante du capital de la societe Pathe, (1,8 milliard de francs). Un certain nombre de conditions legales et reglementaires sont requises, concernant notamment l'identite exacte des actionnaires. Si, du fait des circonstances, certaines de ces conditions n'etait pas remplies, il serait tout a fait inadmissible que Pathe obtienne des pouvoirs publics de quelconques derogations. M d'Aubert souhaiterait etre pleinement rassure a ce sujet par le ministre de l'economie et des finances. III. - Les activites de M Parretti, notamment dans l'audiovisuel, soulevent de tres nombreuses questions. Les conditions dans lesquelles il a pris le controle de Pathe restent particulierement obscures. Le role joue par le Credit lyonnais d'Amsterdam dans cette operation et dans les autres projets de M Parretti est pour le moins etonnant et de nature a perturber l'image de ce grand etablissement financier sur le plan international. Or,il s'agit d'affaires qui sont contraires a l'interet du cinema francais et vont a l'encontre des objectifs affiches par les pouvoirs publics dans le programme Eureka-audiovisuel qui semble bien mal engage. Il lui demande que toute la lumiere soit faite par ses services sur les activites financieres de M Parretti sur le territoire francais depuis 1985, et que soient verifiee leur conformite avec toutes les legislations financieres, fiscales et douanieres en vigueur. Il suggere que, pour approfondir leurs propres informations, les services du ministere des finances demandent des informations complementaires a leurs homologues des pays de la Communaute, de Suisse et des Etats-Unis.

Données clés

Auteur : M. d'Aubert Fran�ois

Type de question : Question écrite

Rubrique : Cinema

Ministère interrogé : économie, finances et budget

Ministère répondant : économie, finances et budget

Date :
Question publiée le 2 mai 1989

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