Je voulais voter ! Le recours à l’article 49, alinéa 3, ne l’a malheureusement pas permis. Je le déplore. J’ai toutefois décidé de maintenir la publication de cette contribution. En transparence, elle permet de connaître ma position sur la réforme des retraites.

Notre système de retraite est un héritage des politiques sociales mise en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. La France peut en être fière. Son modèle est construit autour d’un principe de solidarité redistributive et intergénérationnelle : les salariés en activité payent des cotisations qui financent les pensions des retraités.

Ce modèle précieux doit être protégé face aux évolutions sociétales intervenues depuis sa mise en place. Une première évolution concerne l’équilibre entre le nombre de salariés qui cotisent et le nombre de retraités qui perçoivent une pension. Depuis quelques décennies cet équilibre évolue défavorablement : le nombre de cotisants diminue quand celui des retraités augmente. Une autre évolution concerne l’allongement de la durée de vie qui augmente le nombre d’années de retraite et donc le montant des pensions à verser. Si c’est une bonne nouvelle, c’est in fine l’équation financière qui est déstabilisée : le système n’est plus en capacité de s’autofinancer et nécessite des moyens financiers supplémentaires pour le versement des pensions.

En responsabilité, ce déséquilibre ne peut être éludé et doit être corrigé. Mais une réforme du système de retraite n’est jamais insignifiante : elle nous concerne tous dans notre rapport au travail comme dans notre projet de vie au terme de nos engagements et de nos efforts professionnels.

Bien avant l’arrivée du texte à l’Assemblée nationale, j’ai dit et répété que la période que nous traversions n’était pas favorable au débat sur l’allongement de la durée des cotisations. Nous avons tous été malmenés par la COVID 19 et ses conséquences individuelles et collectives. Nous sommes nombreux à être inquiets des conséquences du risque d’emballement du conflit ukrainien. Beaucoup de français peinent à finir les fins de mois dans un contexte d’inflation des prix. Les entreprises doutent sur leur avenir face à la flambée de leurs factures énergétiques. Les conséquences du changement climatique questionnent notre qualité de vie dans un avenir proche. Les sujets d’inquiétudes sont donc nombreux et il était inutile d’en rajouter un.

Je suis malgré tout pleinement conscient qu’au-delà de ce contexte défavorable, l’importance de retrouver un équilibre financier du système de retraite est indispensable. Je suis également conscient que pour de nombreux Français le sujet de l’équilibre financier passe au second plan d’autres préoccupations plus essentielles à leurs yeux : parmi lesquels la prise en compte différenciée des carrières longues et des métiers les plus pénibles, la protection des femmes ayant interrompu leur carrière pour s’occuper de leurs enfants, la garantie de l’emploi pour les plus de 50 ans.

Désormais, le financement de notre système de retraite nécessite un recours toujours plus important à la dette, en contradiction avec son principe de base : ce sont les actifs d’aujourd’hui comme les générations futures qui en supportent le financement.

La réforme présentée par le Gouvernement est loin d’être parfaite. Si elle tend à répondre au déséquilibre financier, elle prête le flanc à des critiques en termes de justice sociale.

Je regrette la forme prise par les débats à l’Assemblée nationale, je regrette qu’un système fondé sur les annuités (tel qu’envisagé par la réforme de 2019 ; bien plus ambitieuse et juste) n’ai pas vu le jour, je regrette une communication imparfaite provoquant des lectures déformées de la loi débattue.

Malgré ces regrets, en dehors de toute question de destin personnel, je soutiens cette réforme d’abord pour l’équilibre financier du système et ensuite pour les améliorations obtenues par mon groupe politique à l’Assemblée nationale (groupe Démocrate - MoDem et indépendants). Nous avons cherché à répondre à plusieurs des sujets d’injustices exprimés par les Français et nous avons obtenus des améliorations : facilitation du rachat de trimestres, prise en compte des congés maternités, départ anticipé à taux plein pour les carrières longues, maintien de la clause du « grand-père ».

En conclusion, si cette réforme n’est pas la meilleure, elle reste nécessaire. Le principe de revoyure obtenue par le groupe Démocrate permettra d’évaluer les effets négatifs, indirects et inattendus de la réforme. D’autres réformes seront nécessaires dans les prochaines années sur la retraite, la justice sociale, la justice fiscale et le partage de la valeur.