14ème législature

Question N° 100814
de M. Patrice Carvalho (Gauche démocrate et républicaine - Oise )
Question écrite
Ministère interrogé > Familles, enfance et droits des femmes
Ministère attributaire > Familles, enfance et droits des femmes

Rubrique > prestations familiales

Tête d'analyse > conditions d'attribution

Analyse > couples divorcés. garde alternée.

Question publiée au JO le : 22/11/2016 page : 9546
Réponse publiée au JO le : 04/04/2017 page : 2711
Date de changement d'attribution: 07/12/2016
Date de signalement: 21/02/2017

Texte de la question

M. Patrice Carvalho attire l'attention de Mme la ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes sur la question de la répartition des prestations familiales entre époux divorcés ou concubins séparés pour lesquels a été prononcée une résidence alternée des enfants. Si le juge aux affaires familiales ne s'est pas prononcé sur le sort de ces prestations, notamment de la répartition entre les deux parents de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) et de la prise en compte de l'enfant dans le calcul des droits à l'allocation logement des parents, la caisse d'allocations familiales statue que seul l'un des parents (et le plus souvent la mère) peut être considéré comme allocataire prévu à l'article R. 313-1 du code de la sécurité sociale. Il ressort toutefois d'un avis n° 006005 du 26 juin 2006 de la Cour de cassation que « la règle de l'unicité ne s'oppose pas à ce que, lorsque la charge effective et permanente de l'enfant est partagée de manière égale entre les parents, en raison de la résidence alternée et de l'autorité parentale conjointe, le droit aux prestations familiales soit reconnu alternativement à chacun des parents en fonction de leur situation respective et des règles particulières à chaque prestation ». La cour d'appel de Colmar, dans une décision n° 10103893 du 8 septembre 2011, a émis un avis similaire. Il est de même de la HALDE, dans une délibération n° 2009.214 du 18 mai 2009, qui établit que la règle de l'unicité dans le cas d'une résidence alternée est discriminatoire, contraire aux dispositions de l'article 14 combiné à l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'Homme. Elle recommande au Gouvernement de modifier, en particulier, l'article R. 351-8 du code de la construction et de l'habitation de façon à ce que les enfants, qui résident alternativement dans le foyer de leurs deux parents, soient pris en charge dans le calcul de l'APL de l'un et de l'autre. Ces considérations valent pour l'ensemble des prestations : allocations familiales et allocations de rentrée scolaire non évoquées ci-dessus. Il souhaiterait savoir quelles mesures elle compte prendre afin que les CAFs appliquent la jurisprudence sans que les demandeurs n'aient plus besoin d'avoir recours aux juridictions compétentes.

Texte de la réponse

Les règles d'attribution des prestations familiales en cas de séparation renvoient avant tout à un accord entre les parents. Le principe général qui s'applique est celui de l'allocataire unique, ce qui signifie que les prestations familiales ne peuvent être partagées entre les parents. Ainsi, les parents doivent s'entendre pour désigner celui qui doit être considéré comme l'allocataire unique, bénéficiaire des prestations, indépendamment du temps qu'il passe réellement auprès de l'un ou de l'autre. De ce fait, l'enfant ne sera pris en compte, dans le calcul des allocations de logement, que pour un seul des deux parents. En cas d'accord entre les parents séparés ou divorcés, l'organisme débiteur des prestations familiales retient comme allocataire celui qui a été conjointement désigné par les parents. Ce n'est qu'en cas de désaccord entre les parents que, en cas de résidence alternée, l'organisme débiteur des prestations familiales maintient la qualité d'allocataire à celui des deux parents qui bénéficiait – pour ces enfants - des prestations familiales avant la séparation. Une fois le parent allocataire choisi, les parents ont la possibilité de demander conjointement une alternance de l'allocataire après une période minimale d'un an. Si aucun des deux parents n'était allocataire pour ces enfants avant la séparation, c'est le premier des deux parents qui en fait la demande qui est reconnu comme allocataire. La seule exception à ce principe concerne les allocations familiales qui peuvent être partagées entre les parents dont les enfants sont en résidence alternée et ce, à la demande des deux parents ou d'un seul d'entre eux, auprès de la caisse d'allocations familiales. Prendre en compte la résidence alternée pour le calcul du droit aux prestations familiales et aux aides personnelles au logement pourrait conduire, pour les prestations soumises à condition de ressources (complément familial, allocation de rentrée scolaire, allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant…) et les aides personnelles aux logement, à une réduction du montant global des prestations octroyées à l'un des deux parents, alors même que l'autre parent ne pourrait pas en bénéficier, dès lors qu'il dispose de revenus supérieurs aux plafonds de ressources spécifiques à chaque prestation. Ce partage pourrait donc s'avérer contraire à l'intérêt de l'enfant. De plus, la mise en place d'un partage pour toutes les prestations familiales se révèlerait d'une complexité exceptionnelle pour les caisses d'allocations familiales ou de mutualité sociale agricole (prise en compte de deux fois plus de dossiers ; examen et contrôle des ressources de deux fois plus d'allocataires ; prise en compte du temps de résidence réelle de l'enfant chez chacun des parents ; articulation avec les accords de résidence alternée prévoyant que l'enfant passe non pas 50 % du temps chez chacun des parents mais 30 % ou 40 % chez l'un et 70% ou 60% chez l'autre. Saisie d'une question préjudicielle sur le droit aux prestations familiales en cas de résidence alternée par le tribunal des affaires de sécurité sociale du Mans, la Cour de cassation a rappelé le droit de l'alternance de la qualité d'allocataire prévu à l'article R. 513-1 du code de la sécurité sociale. Cet avis ne revient donc pas sur la règle de l'allocataire unique et ne prévoit pas le partage des prestations familiales en cas de résidence alternée. La reconnaissance alternative de la qualité de l'allocataire a été également consacrée par la jurisprudence de la Cour de Cassation (Cour de cassation, 6 juin 2010, no 09-66445). Aussi, les règles appliquées par les organismes débiteurs des prestations familiales sont conformes à la jurisprudence de la Cour de cassation. Pour ces raisons, il n'apparaît pas souhaitable de modifier les règles applicables à ces prestations.