vétérinaires
Question de :
M. Olivier Audibert Troin
Var (8e circonscription) - Les Républicains
M. Olivier Audibert Troin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur les difficultés relatives à l'indemnisation des vétérinaires pour défaut d'affiliation au titre de l'exercice de mandats sanitaires. De nombreux vétérinaires rencontrent des difficultés avec l'administration pour obtenir la réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait de leur défaut d'affiliation, par l'État, aux organismes de retraite, au titre de l'exercice de mandats sanitaires (dans le cadre de la lutte contre les grandes épidémies animales). Le Conseil d'État a jugé, par deux arrêts du 14 novembre 2011 (n° 334.197 et n° 341.325), que l'État a commis une faute ayant privé les personnes concernées d'une affiliation et que « le défaut de déclaration auprès des organismes de sécurité sociale ne peut être imputé aux vétérinaires concernés ». En conséquence, un processus d'indemnisation amiable a été mis en place par le ministère de l'agriculture, afin d'éviter la saisine des juridictions administratives par plusieurs centaines de requérants et pour assurer une indemnisation rapide aux victimes des carences de l'État en ce domaine, qui sont - pour une grande partie - âgés ou retraités libéraux. Cependant, dans l'application de ce processus d'indemnisation, l'administration invoque la prescription quadriennale (principe qui implique que pour les créances sur l'État, les départements, les communes et les établissements publics, l'action en responsabilité doit être introduite dans un délai de 4 ans) pour refuser à de nombreux anciens praticiens ces indemnités. Ceux-ci ne comprennent pas cette décision, notamment à cause du fait que pour une majorité d'entre eux, ils ignoraient totalement les obligations de l'État à leur sujet. Aussi il lui demande d'examiner toutes les mesures possibles afin de parvenir à une solution acceptable et équitable pour ce dossier.
Réponse publiée le 20 décembre 2016
L'État a tiré toutes les conséquences des deux décisions du Conseil d'État du 14 novembre 2011. Il a mis en place, dès 2012, une procédure harmonisée de traitement des demandes d'indemnisation du préjudice subi par les vétérinaires du fait de leur défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de sécurité sociale au titre des activités exercées avant 1990 dans le cadre du mandat sanitaire. Cette procédure s'appuie sur la reconstitution des rémunérations perçues annuellement par chaque vétérinaire sur la période d'exercice de son mandat sanitaire. L'activité sanitaire des vétérinaires s'avère, en effet, avoir été très variable et ce indépendamment du département d'exercice. Si le traitement des demandes d'indemnisation peut apparaître long, il convient de souligner que la procédure amiable concerne un pré-contentieux de masse, qu'elle est lourde, car composée d'une analyse de chaque dossier selon des règles harmonisées, et de plusieurs étapes requérant l'implication non seulement du ministère chargé de l'agriculture mais aussi d'un ensemble de partenaires extérieurs. Cette procédure est ouverte aux vétérinaires retraités comme aux vétérinaires actifs. A ce jour, 1 273 dossiers recevables sont parvenus au ministère. 1 067 ont été complètement instruits. Priorité a été accordée, dans le traitement des demandes, aux vétérinaires en retraite qui subissent d'ores et déjà un préjudice. Trois séries de protocoles ont ainsi été envoyées en 2014, 2015 et 2016. Au 25 novembre 2016, 501 protocoles ont été signés. Près de 80 % des vétérinaires en retraite, ayant accepté la proposition d'assiette qui leur a été faite, ont ainsi été indemnisés, ce qui montre la pertinence de la procédure retenue. Ce processus se poursuivra en 2017. Certains dossiers présentent néanmoins des difficultés particulières. Les modalités techniques de règlement des dossiers des conjoints survivants sont en cours de finalisation. Elles sont complexes, compte tenu de la législation en vigueur. C'est néanmoins une priorité pour les mois qui viennent. Le recours à l'assiette forfaitaire prévue à l'article R. 351-11 du code de la sécurité sociale, qui est demandé par certains professionnels, n'est pas adapté aux vétérinaires sanitaires. Ceux-ci étaient avant tout des praticiens libéraux ayant exercé une activité d'agent public de manière partielle et fractionnée, en complément de leur activité principale libérale. L'article 1er de la loi no 68-1250 du 31 décembre 1968 dispose que « sont prescrites au profit de l'État… toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». Le Conseil d'État a confirmé, dans ses décisions no 388198 et 388199 du 27 juillet 2016, que le délai de prescription de la demande d'indemnisation courrait à partir du 1er janvier suivant le jour de la liquidation de la retraite. Il a aussi souligné que la nature de salaires des sommes correspondant à la rémunération des missions effectuées par un vétérinaire dans le cadre d'un mandat sanitaire avait été clairement établie par ses décisions du 12 juillet 1969 et du 12 juin 1974 qui ont donné lieu à diffusion et à retranscription dans plusieurs instructions de la direction générale des impôts. Ce n'était qu'à compter du 1er janvier 1990, date d'entrée en vigueur de la loi du 22 juin 1989 modifiant et complétant certaines dispositions du livre deuxième du code rural, que les rémunérations perçues au titre des actes accomplis dans le cadre du mandat sanitaire avaient été « assimilées », pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale. Ainsi le Conseil d'État a-t-il jugé que les vétérinaires ne pouvaient être légitimement regardés comme ignorants de leur créance au moment où ils ont liquidé leur droit à pension. Le Conseil d'État, dans une décision du 10 janvier 2007 (Mme Martinez, no 280217), a en outre jugé que l'erreur de l'administration était sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle l'administration opposait la prescription quadriennale à la réclamation d'un administré. L'article 6 de la loi précitée dispose également que « les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi ». Si l'article 6 de la loi no 68-1250 du 31 décembre 1968 prévoit aussi que les créanciers de l'État peuvent être relevés en tout ou partie de la prescription, ce n'est qu'en raison de circonstances particulières, notamment de la situation du créancier. Cette possibilité ne peut être qu'exceptionnelle, au risque, en cas de généralisation, de remettre en cause toute sécurité juridique et toute égalité des citoyens devant la loi.
Auteur : M. Olivier Audibert Troin
Type de question : Question écrite
Rubrique : Professions de santé
Ministère interrogé : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère répondant : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Dates :
Question publiée le 29 novembre 2016
Réponse publiée le 20 décembre 2016